Zen et nous

Le zen, sa pratique, ses textes, la méditation, le bouddhisme, zazen, mu


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    Shikantaza dans le Sôtô zen de M° Dõgen

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    Message par Kaïkan Dim 1 Jan 2017 - 17:56


    Shikantaza


    (Seulement assis)

    Rév. Kenshu Sugawara
    Centre pour les études zen Soto
    Moniteur de recherce senior

    1. Shikantaza en tant que doctrine essentielle du bouddhisme zen Sôtô
    Dans la constitution de la Sotoshu (Sotoshu shuken), la doctrine du bouddhisme zen Sôtô (shushi) est énoncée comme « … respectant le vrai Dharma transmis de personne à personne par les bouddhas patriarches, la doctrine Sotoshu consiste à réaliser shikantaza (seulement assis) et sokushinzebutsu (l’esprit lui-même est Bouddha) ». Cela signifie que nous, en tant que disciples du bouddhisme zen Sôtô, nous devrions pratiquer shikantaza conformément au Dharma correct purement transmis par les bouddhas patriarches. Le zazen correctement transmis est un art extraordinaire et essentiel pour tous les Bouddhas Tathagatas qui ont transmis un Dharma inconcevable pour réaliser l’éveil insurpassable, complet. Le zazen est la voie authentique pour nous libérer dans le royaume du samâdhi dont on fait l’expérience par soi-même (jijiyu zanmai).
    En chinois, l’expression shikantaza est du langage vernaculaire. Shikan indique l’idée d’« être uniquement concerné par quelque chose ».Taza signifie « s’asseoir ». Donc shikantaza veut dire « être uniquement concerné par le fait d’être seulement assis ».
    Cette expression a été mise en valeur dans le bouddhisme zen Sôtô sous la puissante influence du maître zen Tendo Nyojô (T'ien-t'ung Ju-ching). Il était l’enseignant principal du maître zen Eihei Dôgen, qui a fondé le monastère Eiheiji. On ne trouve pas cette expression dans les Propos attestés du maître zen Nyojô, mais dans le Hokyoki le maître zen Dôgen a dit :

    Le prêtre principal (Nyojô) a enseigné : « La pratique de zazen (sanzen) représente l’abandon du corps-esprit. Vous n’avez pas besoin de brûler de l'encens, de rendre hommage, d’effectuer le nembutsu, de faire pénitence, ou de lire des sutras. Juste d’être assis d’une manière résolue. »

    Le maître zen Keizan a dit du maître zen Nyojô : « Il a toujours excellé au zazen » (Denkoroku du maître zen Keizan, chapitre 50). Comme nous pouvons le voir dans les Propos du maître zen Eihei Dôgen (Shôbôgenzô Zuimonki), le maître zen Nyojô a pratiqué personnellement zazen avec une grande assiduité. Il a intégré zazen comme étant un élément important de l’apprentissage monastique, même s’il était critiqué pour cela. Dans le fascicule des « Sutras de Bouddha » (Bukkyo) dans le Shôbôgenzô, Dôgen dit que le maître zen Nyojô parlait « toujours » de l’extrême importance de shikantaza. Cela suggère que dans les sermons habituels il a fortement inspiré les disciples à pratiquer shikantaza.
    Dans le chapitre « Illumination de Xuefeng au mont Ao Shao à Tu-Tang-Ji » (Sodoshu 祖堂集), nous trouvons le mot « shikantaza » associé à « shikantasui » (seulement dormir). Mais plus tard, dans le « Shôbôgenzô » de Tahui, ils ont été remplacés par ikkozazen (zazen d’une manière résolue) et tadakoretasui (sommeil quotidien). Par le terme shikantaza les maîtres zen Nyojô et Dôgen ont essayé de communiquer l’idée d’une « manière résolue » et de « quotidien ». Nous pratiquons le zazen quotidiennement, mais il doit être pratiqué d’une « manière résolue » plutôt que d’être effectué comme une routine habituelle.
    C’est parce que nous admirons et aspirons à ressembler aux bouddhas et patriarches qui ont pratiqué shikantaza, et sommes profondément émus par l’esprit de la Bodhi qui suit la sagesse/vie des bouddhas et patriarches, que nous acceptons et nous installons dans la pratique de shikantaza.

    2. Le contenu de shikantaza
    Shikantaza possède deux aspects sur lesquels on peut insister :
    (1) L’emphase sur zazen et le rejet des autres pratiques (la dévotion complète à zazen)
    (2) Le rejet de zazen comme moyen pour arriver à une fin (unicité de la pratique et de la réalisation)

    En ce qui concerne le premier aspect, le maître zen Nyojô a rejeté les pratiques autres que zazen, du fait de brûler de l’encens à la lecture de sutras, dans les propos cités plus haut. Ce rejet possède plusieurs dimensions. La première est la valeur religieuse supérieure de zazen par rapport à d’autres pratiques. Dans le Shôbôgenzô Zuimonki, livre 6, le maître zen Dôgen a répondu à un pratiquant qui avait comparé zazen à la pratique du koan : « Même s’il peut sembler que vous ayez une compréhension en lisant des koans, la réalisation de l’illumination est due au mérite du zazen assis. » À un jodo à Eiheiji, il a dit : « Le vrai Dharma correctement transmis par les bouddhas et patriarches consiste seulement à rester assis » (Eihei Koroku vol. 4-319, jodo). Nous pouvons voir les autres types de pratique rejetés et l’accent mis sur le zazen, comme étant la pratique la plus importante. Cependant, Dôgen a écrit un fascicule sur la « Lecture des sutras » (Kankin). De plus, il y a une phrase concernant « la lecture de sutras et la récitation des noms de Bouddha » dans le « Eiheiji Chiji Shingi ». Cela implique que Dôgen n’a pas complètement exclu d’autres pratiques de l’apprentissage monastique.
    Dôgen décrit la bonne relation entre shikantaza et les sutras bouddhiques comme ceci : « … la pratique du zazen assis est incontestablement un sutra de Bouddha du début à la fin et de la fin au début » (Shôbôgenzô Bukkyo (« Sutras de Bouddha »)). Par cela Dôgen voulait dire que zazen est un sutra bouddhique. De la même manière, on peut dire qu’un sutra bouddhique est zazen. Ainsi, à Daibutsuji (Eiheiji) où les observances quotidiennes centrées sur zazen ont été établies, selon le Bendoho (« Modèle pour s’engager dans la Voie »), un point essentiel de l’apprentissage monastique était indubitablement shikantaza. À cause de cela, Dôgen a encouragé les pratiquants à favoriser zazen au détriment d’autres pratiques. Il a mis l’accent sur le fait qu’ils doivent pratiquer zazen « à l’exclusion de toutes les autres activités » comme l’a fait Hongren le cinquième patriarche sur le mont Huangmei (Shôbôgenzô Zazengi (« Instructions pour le zazen »)).
    En ce qui concerne le second aspect, si nous pratiquons comme un moyen pour arriver à une fin, cette pratique perd son rôle une fois le but atteint. Cependant, dans le Fukanzazengi le maître zen Dôgen attire l’attention sur l’exemple du Bouddha Shakyamuni qui est resté assis en position de zazen pendant six ans, bien qu’il fût suffisamment sage pour connaître le Dharma de Bouddha à sa naissance. Il mentionne aussi Bodhidharma, qui est resté assis face à un mur pendant neuf ans après être venu en Chine, bien qu’il eut déjà atteint le sceau de l’esprit. Dôgen insiste sur le fait que les bouddhas et patriarches ne pratiquent pas zazen comme un moyen pour arriver à une fin.
    Ainsi, comme cela est dit dans Gakudo Yojinshu, « La réalisation réside dans la pratique ». L’illumination est clairement manifestée dans le zazen des Bouddhas et patriarches. Dans la même veine, dans le Bendowa, le maître zen Dôgen a écrit : « Supposer que la pratique et la réalisation ne sont pas une chose unique est une vue de ceux qui sont en dehors de la Voie. Dans le Dharma du Bouddha elles sont inséparables. » Il affirme que lors de l’instruction des débutants nous devons leur enseigner à ne pas s’attendre à une réalisation en dehors de la pratique. La pratique est la réalisation immédiate, originale. La pratique de l’esprit du débutant est elle-même la réalisation originale complète.
    Dôgen distingue clairement le zazen des bouddhas et patriarches du zazen des autres écoles.

    Le principe du zazen dans d’autres écoles est d’attendre l’illumination. Par exemple, pratiquer est comme traverser un grand océan sur un radeau, en pensant qu’après avoir traversé l’océan on doit se débarrasser du radeau. Le zazen des bouddhas et patriarches n’est pas comme cela, c’est seulement la pratique du Bouddha. Nous pourrions dire que la situation de la maison du Bouddha est celle dans laquelle l’essence, la pratique, et l’exposition du Dharma sont une seule et même chose. (Eihei Koroku, vol. 8:11)

    Dans d’autres écoles, zazen est un moyen d’atteindre l’illumination. Comme un radeau, il n’est plus utile quand le but est atteint. Certaines personnes se vantent de leurs expériences de grande illumination et de kensho. Si leur pratique de zazen régresse à cause d’une telle expérience, cette expérience n’est rien qu’une illusion qui devient une entrave à la continuation de la pratique.
    Le maître zen Dôgen dit que le zazen des bouddhas et patriarches est la pratique de Bouddha. C’est la pratique très simple et pure de rester assis en nous débarrassant de nos opinions. Un tel zazen incarne la « situation de la maison de Bouddha » dans laquelle l’essence (fondation/illumination), l’exposition (explication du Dharma) et la pratique sont une seule et même chose. Ainsi, il n’y a pas besoin de rechercher le Bouddha en dehors de zazen. Zazen n’est pas une pratique qui produit un bouddha patriarche mais une action qui fait que les bouddhas et patriarches vivent en tant que bouddhas et patriarches. Les bouddhas et patriarches sont des êtres qui ont déjà clarifié toutes les sortes d’illumination et d’états psychologiques. Ils n’ont plus rien à obtenir, plus rien à réaliser. Quand zazen est apprécié en tant que pratique effectuée par ces bouddhas et patriarches, le contenu de ce zazen est appelé « rien à atteindre, rien à illuminer » (Shôbôgenzô Zuimonki, livre 6).
    Quand il n’y a rien à obtenir, rien à réaliser, le zazen assis est « l’abandon du corps-esprit (shinjin datsuraku) ». L’abandon du corps-esprit n’est pas un état psychologique merveilleux à obtenir comme résultat du zazen assis. C’est plutôt que zazen lui-même n’est rien d’autre que « l’abandon du corps-esprit ». C’est le fait d’échapper à toutes sortes de résistance. Quand nous sommes assis en zazen, notre corps-esprit s’abandonne naturellement et le vrai Dharma se manifeste (voir Fukanzazengi).

    Version originale écrite en japonais par le Rév. Kenshu Sugawara
    Traduit en anglais par le Rév. Issho Fujita
    Assisté du Rév. Tonen O'Connor et Rév. Zuiko Redding

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    Message par Fred Dim 1 Jan 2017 - 22:03

    Peut-être s'agirait-il de dire également que le terme "juste" de l'expression "juste assis" peut être employé pour toutes les actions de la vie quotidienne : juste manger, juste boire, juste marcher, etc.

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    Message par Kaïkan Jeu 5 Jan 2017 - 9:18


    Il y a donc vraiment une spécificité du Zen Sõtõ qui est clairement exposée dans ce texte et particulièrement dans la phrase :  
    "Zazen n’est pas une pratique qui produit un bouddha patriarche mais une action qui fait que les bouddhas et patriarches vivent en tant que bouddhas et patriarches."

    C'est aussi intéressant de relever cette assertion un peu plus loin :
    "Quand il n’y a rien à obtenir, rien à réaliser, le zazen assis est « l’abandon du corps-esprit (shinjin datsuraku) ». L’abandon du corps-esprit n’est pas un état psychologique merveilleux à obtenir comme résultat du zazen assis. C’est plutôt que zazen lui-même n’est rien d’autre que « l’abandon du corps-esprit »."
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    Message par Zenoob Jeu 5 Jan 2017 - 11:02

    Ah, super, j'ai justement une question sur cet abandon du corps-esprit.

    Autant, dans la pratique, je crois comprendre (et je suis sûr que je me trompe, surtout au vu de la citation de Dogen ci-dessus) ce qu'est l'abandon de l'esprit ; c'est à dire que je sens bien que je peux tout simplement (hum) laisser les pensées se faire et revenir à la posture, puis recommencer inlassablement.

    Mais l'abandon du corps, j'ai plus de mal. Cela veut dire quoi, abandonner le corps ? Pour moi, les sensations physiques peuvent parfois me faire peur, ou me distraire, ou déclencher tout un tas de trains de pensées. Comment abandonne-t-on le corps ? D'ailleurs j'ai l'impression que ce "corps", en fait, ça n'existe pas vraiment : j'ai des sensations et des trucs qui se passent, mais ce n'est qu'une représentation, en fait, parce que ça ne correspond pas forcément à ce qui se passe "vraiment" dans le corps, auquel je n'ai évidemment pas accès...

    Ca revient à une question sur "s'oublier soi même", je ne comprends pas comment c'est possible de "s'oublier soi même pour s'étudier soi même", puisque quelque part, tout ce qu'on appréhende fait partie de nous...
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    Message par bulleOcéan Jeu 5 Jan 2017 - 13:38

    @zenoob
    En fait je crois qu'il serait plus pertinent de l'exprimer par abandon de tout. Le demeurer nulle part.  
    Le problème est qu'on essaye d'actualiser cela avec notre esprit qui dissèque, qui discrimine.
    À la fois cet esprit qui veut contrôler la barque et cet effort d'essayer d'actualiser créent une distance.

    Aucun être , ni rien ne nous appartient.
    Pas même nous mêmes.
    Tout est insaisissable, impermanent, interdépendant.
    Mais il arrive que nous croyons
    parfois avoir les mains pleines et parfois les mains vides
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    Message par Kaïkan Jeu 5 Jan 2017 - 16:58


    Bonjour,

    Il faut garder comme postulat, même si on ne le comprend pas vraiment, que corps et esprit ne sont pas séparés. Donc il n'y a pas : lâcher l'esprit d'un côté, et lâcher le corps de l'autre. Ce serait plutôt lâcher le corps/esprit.
    Pour l'instant tu fais quand même zazen, mais tu dois te mettre en objectif d'être fait par zazen. Je veux dire que ce n'est pas toi qui montres à ton corps comment faire zazen, mais ton corps qui te montre comment il pratique zazen et puis finalement zazen qui montre à ton corps-esprit comment se vit cette pratique et t'enseigne en fait ce qu'est ton corps-esprit et comment le voir de façon tout à fait différente et bien plus approfondie que ce qui est vécu habituellement.
    Comme tu l'as remarqué c'est en fait sur une image mentale du corps que tu "travailles", alors que zazen, quand c'est lui qui a les commandes, agit sur le corps-esprit tout entier en le métamorphosant (en quelque sorte).

    Zenoob a écrit:Ça revient à une question sur "s'oublier soi même", je ne comprends pas comment c'est possible de "s'oublier soi même pour s'étudier soi même", puisque quelque part, tout ce qu'on appréhende fait partie de nous...
    C'est à l'envers : "s'étudier soi-même revient à s'oublier soi-même." Pourquoi ? Parce que en t'étudiant tu étudies l'être humain en général (toi en particulier mais si peu dans le fond), et tu te dépasses, tu dépasses les limites du moi-je et du mon-mien, mais sans aucun effort, cela apparaît naturellement. De plus ne pouvant garder l'observation de façon continue sur un objectif fixe et permanent, on perd pied et on "lâche les rubans", on part un peu dans le vague et c'est aussi quelque chose de nécessaire, on lâche prise de toute façon, et c'est donc inutile de vouloir s'imposer le lâcher-prise.

    Donc s'asseoir seulement, car :  " le zazen assis est « l’abandon du corps-esprit (shinjin datsuraku) ». zazen lui-même n’est rien d’autre que « l’abandon du corps-esprit » "
    C' est comme ça de toute façon. Comme disait souvent Stéphane : En fait, au début on lutte contre zazen. C'est après, lorsqu'on a abandonné cette dépense d'énergie inutile consistant à s'opposer, qu'on entre dans la pratique proprement dite.

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    Message par bulleOcéan Jeu 5 Jan 2017 - 17:28

    Effectivement , c'est un lâcher prise au lâcher prise, si on peut s'exprimer ainsi, de façon naturelle.
    Tout étant insaisissable, impermanent  (incluant soi même) il est vain de vouloir contrôler quoique ce soit.
    Simplement l'accueillir.
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    Message par Zenoob Jeu 5 Jan 2017 - 17:51

    Ok, merci beaucoup, vos remarques m'éclairent.

    Je vois là où je bloque : en ce moment, j'ai peur de mon propre corps-esprit, je ne lui fais pas confiance, parce qu'il me fait souffrir, quelque part, et j'ai peur qu'en le laissant aller cela s'aggrave, car j'ai l'impression de ne rien maîtriser du tout. Paradoxalement je sais bien que ça va toujours mieux quand je le laisse faire ce qu'il veut, et que c'est cette résistance qui me fait souffrir, mais c'est parfois dur de lâcher tant la résistance est instinctive.
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    Message par Yudo, maître zen Jeu 5 Jan 2017 - 22:05

    Zenoob a écrit:Ah, super, j'ai justement une question sur cet abandon du corps-esprit.
    (...)
    Mais l'abandon du corps, j'ai plus de mal. Cela veut dire quoi, abandonner le corps ? (...)

    Tu n'as jamais joué de musique, dansé, pratiqué un sport ou n'importe laquelle de ces activités physiques où l'on se donne à fond?

    Cela m'étonnerait.

    Dans ces activités, lorsqu'on est parfaitement dedans, il arrive toujours un point où le corps n'a plus d'existence. Tous les musiciens que je connais connaissent ce point. Les sportifs aussi. Et dans la danse, paradoxalement, aussi.

    Il arrive un point où plus rien n'existe d'autre que l'activité. Dans le cas de la musique, le musicien ne pense plus, son corps n'existe plus, l'instrument non plus, et sans trop comprendre comment, il y a la musique. Pour les autres, cela se passe de façon analogue.

    Et si l'on commet la sottise de se détacher pour pouvoir se dire "Ouah, c'que j'assure!" Crac! Fini! Foutu!
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    Message par zanshin Ven 6 Jan 2017 - 6:04

    Lorsqu'on travaille aussi on peut oublier son corps, mais il faut mieux se recentrer et agir en conscience du corps. Dans mon métier je me concentrais sur les mains et les pieds. Dans les soins hospitalier il est préférable de ne pas oublier le corps.
    Pour Zenoob c'est un peu l'inverse. Smile
    Oublier parfois son corps serait pour lui un soulagement d’après son profil légèrement hypocondriaque... Laughing
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    Message par Zenoob Ven 6 Jan 2017 - 11:43

    Hahaha oui, c'est pour ça que cette question m'intéresse !


    Petite réflexion anarchique en cours suite au zazen de ce matin :
    Ce matin pendant le zazen j'ai compris un truc : si on agrippe quelque chose avec la pensée, cette chose devient périssable, susceptible de disparaître. Par exemple, au moment où je pense "expiration", j'ai figé l'expiration en quelque chose, et donc elle disparaît, elle se termine et ne revient plus jamais. Mais si je n'agrippe rien, les notions d'apparaître et disparaître n'ont plus de sens... Puisque la peur vient de la perception du changement, ou de l'inadéquation des choses (saisies, donc) avec ce qu'on voudrait qu'elles soient, concernant d'ailleurs la possibilité de notre propre disparition, je comprends pourquoi on peut dire que le zen est la voie de la non peur : si on n'agrippe rien, si on ne saisit pas, alors on ne fabrique pas la possibilité pour les choses d'apparaître et de disparaître, et donc toute peur devient impossible... La difficulté vient de nos réflexes de survie, qui nous poussent à agripper tout sans cesse...
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    Message par bulleOcéan Ven 6 Jan 2017 - 13:47

    Il y a un temple bien connu qui a comme surnom "Temple de la non-peur"
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    Message par Yudo, maître zen Ven 6 Jan 2017 - 17:18

    bulleOcéan a écrit:Il y a un temple bien connu qui a comme surnom "Temple de la non-peur"

    Comme quoi les noms ne suffisent pas: s'il est un endroit où on cultive la peur, c'est bien là!
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    Message par lausm Sam 7 Jan 2017 - 1:16

    Zenoob a écrit:Ah, super, j'ai justement une question sur cet abandon du corps-esprit.
    .......
    Mais l'abandon du corps, j'ai plus de mal. Cela veut dire quoi, abandonner le corps ? Pour moi, les sensations physiques peuvent parfois me faire peur, ou me distraire, ou déclencher tout un tas de trains de pensées. Comment abandonne-t-on le corps ? D'ailleurs j'ai l'impression que ce "corps", en fait, ça n'existe pas vraiment : j'ai des sensations et des trucs qui se passent, mais ce n'est qu'une représentation, en fait, parce que ça ne correspond pas forcément à ce qui se passe "vraiment" dans le corps, auquel je n'ai évidemment pas accès...

    Ca revient à une question sur "s'oublier soi même", je ne comprends pas comment c'est possible de "s'oublier soi même pour s'étudier soi même", puisque quelque part, tout ce qu'on appréhende fait partie de nous...

    En fait, il me semble que tu as déjà la réponse à la question sur l'abandon du corps-esprit (cf passage en gras).
    Puis tu te mets à chercher la vérité ailleurs.
    Il n'y a effectivement pas de "je" qui ait accès à ce qu'il se passe vraiment dans le corps.
    Nous devenons ce corps, et en le devenant, la nécessité d'être un sujet qui vit dans un corps disparaît.
    Il ne reste que vivre.
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    Message par Zenoob Lun 9 Jan 2017 - 11:21

    Kaïkan a écrit:
    Pour l'instant tu fais quand même zazen, mais tu dois te mettre en objectif d'être fait par zazen. Je veux dire que ce n'est pas toi qui montres à ton corps comment faire zazen, mais ton corps qui te montre comment il pratique zazen et puis finalement zazen qui montre à ton corps-esprit comment se vit cette pratique et t'enseigne en fait ce qu'est ton corps-esprit et comment le voir de façon tout à fait différente et bien plus approfondie que ce qui est vécu habituellement.

    Salut !

    Je comprends pas trop mal l'histoire du "être fait par zazen". Mais en zazen, on ne laisse pas tout aller non plus ; quand on remarque qu'on pense, on revient à la posture etc. Il y a bien ici un "vouloir faire" qui ne se fait pas tout seul, non ?
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    Message par Kaïkan Mar 10 Jan 2017 - 10:11


    Oui il y a des efforts à faire dans le bouddhisme comme dans tout d'ailleurs. Pour devenir un bon danseur il faut d'abord apprendre. Par la suite on danse naturellement et on parle à sa partenaire en faisant les mouvements automatiquement, inconsciemment. Pareil pour conduire une voiture.
    Dans le Bouddhisme il y a aussi la volonté de suivre les préceptes, ça demande aussi des efforts.
    L'effort juste c'est l'un des huit chemins que suivent les bouddhistes. On retrouve cet effort dans les six paramitas également.
    C'est une voie du milieu et il faut trouver l'équilibre entre tension et détente, une tension juste en quelque sorte, qui devient naturelle et aisée lorsqu'on en prend l'habitude.  Smile
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    Message par Fred Mar 10 Jan 2017 - 17:16

    Kaïkan a écrit:Par la suite on danse naturellement et on parle à sa partenaire en faisant les mouvements automatiquement, inconsciemment.

    Ha oui, shikantaza c'est "être fait" qui danse avec "vouloir faire" et le public dans tout ça, il voit juste un gars ou une nana assis sur un zafu.

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