Zen et nous

Le zen, sa pratique, ses textes, la méditation, le bouddhisme, zazen, mu

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    Le concept d'éternité, (peut-on concevoir ce qui est éternel ?)

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    Message par Kaïkan Jeu 23 Mar 2017 - 17:17


    Le concept d'éternité



    Voici un concept très discuté, surtout lorsqu'on a commencé à enseigner les philosophes grecs au XIIIème siècle.

    En contradiction avec l'église qui voit l'univers créé par Dieu, Aristote dit : "le monde est éternel".

    C'est donc un débat très ancien et peut-être certains ont des idées sur ce sujet. En tout cas voici quelques petits renseignements :

    Dans le langage religieux, en tout cas chrétien, il s’agit d’une soustraction à l’emprise du temps. À ce titre, elle n’a ni commencement ni fin, ces termes n’y ayant pas même de sens. Elle est donc à distinguer de l’immortalité, qui a un début et pas de fin. ∞

    Dans la religion catholique, le temps est une création de Dieu au même titre que l'espace, et est lié à ce dernier.
    Dieu est dit éternel puisque son existence [ou mieux : son être] n'a pas de commencement. Chez les protestants, on appelle souvent Dieu : l'Éternel. Ce mot permet de traduire la réponse de YHWH (iod hé vav hé) à Moïse : "Je suis celui qui est", c'est-à-dire la plénitude d'être, donc sans commencement ni fin.

    Seuls peuvent admettre l'existence de l'éternité les philosophes qui, comme Aristote, saint Thomas, Descartes, Leibniz, mettent dans l'immobilité de l'acte pur et parfait l'idéal de l'existence. Il n'y a donc qu'une philosophie qui puisse admettre l'éternité, c'est une philosophie théiste et, dans cette philosophie, le seul être qui puisse être véritablement appelé éternel est Dieu. (G. Fonsegrive).

    L'éternité n'est pas un lieu, mais plutôt un état, ou mieux encore un éternel présent.

    Kierkegaard dans \"Le concept d'angoisse" a écrit:

    Qu'est-ce que l'instant ?


    « Le temps est donc la succession infinie ; la vie vécue dans le temps et relevant simplement du temps n'a pas de présent. Sans doute, pour caractériser la vie sensible, l'on dit communément qu'elle est dans l'instant. On entend alors par instant l'abstraction de l'éternel, qui, si elle se donne pour le présent, en est la parodie. Le présent est l'éternel ou plutôt l'éternel est le présent, et le présent est la plénitude. C'est en ce sens que le latin disait de la divinité qu'elle est praesens, et en lui appliquant ce mot, il désignait en même temps son puissant secours.
    L'instant désigne aussi le présent sans passé ni avenir ; c'est en cela que consiste l'imperfection de la vie sensible. L'éternel désigne aussi le présent sans passé ni avenir, et c'est en cela que consiste la perfection de l'éternel (...).
    Ainsi compris l'instant n'est pas à proprement parler l'atome du temps, mais l'atome de l'éternité. Il est le premier reflet de l'éternité dans le temps, et pour ainsi dire sa première tentative de l'arrêter. C'est pourquoi les Grecs ne comprenaient pas l'instant, car, s'ils concevaient l'atome d'éternité, ils ne voyaient pas que l'éternité était l'instant ; ils ne la plaçaient pas en avant, mais en arrière ; car l'atome d'éternité était essentiellement pour eux l'éternité ; et de la sorte ni le temps ni l'éternité ne recevaient leur plein droit. La synthèse du temporel et de l'éternel n'est pas une nouvelle synthèse ; elle est une traduction de la première selon laquelle l'homme est une synthèse d'âme et de corps portée par l'esprit. Dès que l'esprit est posé, l'instant est donné. Aussi peut-on dire à bon droit de l'homme en manière de blâme qu'il vit uniquement dans l'instant, lorsqu'il vit ainsi par une arbitraire abstraction. La nature n'est pas dans l'instant.
    Il en est de la temporalité comme du sensible, car elle semble encore plus imparfaite et l'instant encore plus chétif que le maintien en apparence assuré de la nature dans le temps. Et pourtant, c'est l'inverse ; car cette assurance de la nature se fonde sur l'absence de toute signification du temps pour elle. L'histoire ne commence qu'avec l'instant. La nature sensible de l'homme se trouve posée par le péché comme culpabilité ; elle est ainsi rabaissée au-dessous de celle de l'animal, et cependant justement parce qu'ici commence sa supériorité ; à ce point, en effet, l'esprit entre en jeu.
    (...) L'instant est cet ambigu où le temps et l'éternité sont en contact, posant ainsi le concept de temporalité où le temps interrompt constamment l'éternité, et où l'éternité pénètre sans cesse le temps.
    C'est alors seulement que prend son sens la répartition de tout à l'heure en temps présent, temps passé et temps à venir. »
    Kierkegaard, (Le concept d'angoisse)
    Ces petites citations vont permettre de développer les positions de ceux qui voudront exposer leurs points de vue.
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    Message par Fred Jeu 23 Mar 2017 - 19:14

    Il m’apparaît que les musiciens savent bien ce que signifie cette notion qu’on ne peut abstraire d’une réflexion sur le temps et l’éternité, à savoir la notion de durée.
    Les notes sur une partition ont une durée relative ; elle s’inscrivent donc dans une métrique les unes par rapport aux autres. Sans indication de tempo, la partition peut se jouer théoriquement sur une durée infinie tout autant que sur une micro durée proche du zéro ; le zéro ne pouvant pas être atteint, cette micro durée pourrait être de sorte réduite à l’infini. Ainsi le développement d’une mélodie sur une durée infiniment petite ou infiniment grande ne pourrait être perçue, plus, on le comprend bien, elle ne pourrait d'avantage être jouée et il ne saurait plus être question de musique ; ce tempo infini relève donc de la pure abstraction. Cela rejoint une interprétation qu’on pourrait faire de ce qu’a dit Nietszche lorsqu’il dit que "sans la musique la vie serait une erreur", car dans ce sens, parlant de musique, on désignerait purement et simplement la conscience qui pour s’exprimer, devrait le faire dans la sphère temporelle, de manière semblable à la manière dont un morceau de musique s'inscrit sur une durée perceptible. S’il n’y avait pas cet aspect temporel, si en somme il n’ y avait que pure infinité et que ce qui était, coïncidait dans sa manifestation avec cet infini, ce qui n'a de sens qu'abstraitement, rien ne serait susceptible d’être éprouvé, et à la manière dont on constate qu'il est impossible d'interpréter une mélodie sans tempo, rien ne serait susceptible d'exister.

    Essayer de concevoir ce qui est éternel c'est la même chose que d'essayer de jouer une mélodie sans tempo.
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    Message par tangolinos Jeu 23 Mar 2017 - 20:02

    Salut Kaïkan,

    je vois que les sottises du ''fou du roi'' animent et/ou réaniment tes préoccupations.
    Il y a en effet cette question essentielle de savoir une fois pour toute si le destin est déjà écrit, ou si c'est nous qui l' écrivons.
    Je dirais qu'il y a deux personnages (en nous-même) qui posent la même question:
    1/il y a celui qui croit qu'il est en train d' écrire ce qui émane de lui. (phénomène d'immanence)
    2/et il y a celui qui croit qu'il ne fait qu' exécuter ce que l' au-delà lui impose. (phénomène de transcendance), aussi il est possible de s' identifier à l' un ou à l'autre de ces deux personnages et de répondre par OUI ou par NON.
    Or ma propre expérience de vie m' a fait rencontrer quelqu'un qui m' a prouvé que le futur était aussi bien écrit que le passé.
    Aussi, je ne peux plus adopter l' identité de celui qui met en doute cette vérité.
    C’est pourquoi, il m’ arrive souvent d’ évoquer l’ idée que notre ignorance est un précieux fardeau.

    Précieux?… oui c’est notre ignorance qui nous fait croire qu’on y est pour quelque chose, et qui donc anime notre activité.
    Fardeau ?… oui c’est cette charge qui nous laisse dans l’ignorance, pour que notre ego garde une certaine consistance à vouloir manifester quelque chose.
    Cependant, la sage attitude est de considérer que nous sommes là pour quelque chose, et donc il est salutaire de penser qu'on y est pour quelque chose. (l'ignorance est un précieux fardeau !)

    Il serait en effet incompréhensible que notre impression d' y être pour quelque chose soit dénuée de sens.
    Ah ce sens !!! j' espère avoir un tant soit peu participé à l' évoquer, ce sens ?... fort de notre ego conquérant, ou dénué de cet ego, on continue à manifester là ce qui est depuis toujours et qui restera tout comme il est quelque part, l' espace, le temps, et toutes les manifestations sont une même et seule chose sous tous ses aspects.

    Je dis ''quelque part'', mais je ne sais pas où c'est, et pourtant c'est là.
    En finalité je dirais qu’il y a toujours ce ''quelque chose'' qui anime nos croyances en se croire être quelque chose ou pas.

    Vois-tu c'est ce ''quelque chose'' que je nomme l' éternel, mais qu'on pourrait aussi nommer l' Absolu ou de toutes autres manières pourvu que la nomination évoque la même chose.
    Ah cette chose là suprême !...Hummm en ai-trop dit ?
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    Message par zanshin Ven 24 Mar 2017 - 5:53

    Il faudrait peut-être bien commencer par le commencement c'est-à-dire définir ce qui est compris par tout le monde quand on prononce le mot : éternel.
    Je crois qu'on envisage quelque chose qui n'a ni commencement ni fin. Comme par exemple, si le temps avait toujours existé et par conséquent l'espace aussi.
    C'est vraiment une hypothèse car on ne peut qu'imaginer quelque chose qui est lointain dans le passé et qui va indéfiniment dans le futur.
    En fait on n'a aucune référence, à l'échelle humaine, de ce genre de concept, si ce n'est dans notre imagination.
    L'éternité et ce qui serait éternel, c'est donc un concept sans aucune réalité objective. Smile
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    Message par tangolinos Ven 24 Mar 2017 - 11:46

    Je dirais que le temps est à l’ image d’un éventail, qu’ on peut appréhender tantôt fermé et tantôt ouvert.

    Fermé, c’est quand l’ observateur s’extrait de sa condition manifestée… il peut alors dire que l’ éternité est comme une bobine de film rangée dans un placard.
    Un peu comme si le temps était enroulé sur lui-même, et que toute la réalité était une seule et même chose absolument immobile, contenant tous les instants dans une souveraine plénitude.

    Ouvert, c’est quand l’observateur fait cas de sa condition manifestée… il voit alors le temps se déployer sous ses yeux, d’instant à instant… tout comme la projection d’ un film qui n’est autre qu’une succession d’images évoquant un mouvement.


    Pour reprendre le concept d’impermanence, on peut dire que toute manifestation est impermanente puisque contenue dans une durée.
    Or ce qu’il y a de fantastiquement paradoxal, c’est de voir que cette impermanence est permanente.
    Autrement dit, l’ éternel est la chose permanente qui contient toutes les durées, et donc toutes les impermanences manifestées.

    Cet éternel est en quelque sorte l’ immuable source, l’ origine et la finalité de toutes choses, et, le temps en est l’ eau qui s’écoule dans l’ agitation manifestée.

    Quant à cette histoire d’un avant et d’un après, il s’agit là du constat que fait l’ observateur à partir de sa condition manifestée…
    il y a bien eu des choses avant sa naissance, et il sait bien qu’il y en aura après sa mort… en effet chaque durée est ponctuée par deux instants, qu’on pourrait représenter par 2 points délimitant un segment sur une ligne… et ce segment est bien plus petit que cette ligne.
    L’ éternel est en quelque sorte cette ligne, quant à dire quelle est vraiment sa forme, je crains fort que notre condition manifestée ne nous permette pas de l’ appréhender, tant cette ligne nous semble droite, alors que l’ éternité serait plutôt un cercle.
    Mais bon ces façons de représenter le temps ne sont que métaphores.
    On cherche à contenir cette chose, alors que c’est cette chose qui nous contient.
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    Message par Fred Ven 24 Mar 2017 - 12:34

    A propos d'éventail, je ne résiste pas à poster ici cette fameuse histoire zen :

    Le Maître Zen Hotetsu utilisait un éventail. Un moine vint et demanda : « La nature de l’air est toujours présente, et il n’y a aucun lieu que l’air ne puisse atteindre. Pourquoi alors le Maître se sert-il d’un éventail ? »

    Le Maître dit : « Vous avez seulement compris que la nature de l’air est toujours présente, mais vous ne comprenez pas le principe selon lequel il n’y a aucun endroit que l’air ne puisse atteindre. »

    Le moine dit alors : « Quel est le principe selon lequel il n’y aucun endroit que l’air ne puisse atteindre ? »

    En guise de réponse, le Maître se contenta d’agiter son éventail.

    http://zensotoreims.fr/genjo-koan/

    Je ne sais pas si on peut vraiment résumer cette histoire ainsi, mais il me semble que ce maître traite la problématique de l'air qui en l'occurrence me semble pouvoir être étendu au concept d'éternité, en faisant cas en quelque sorte de son usage spontané.
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    Message par tangolinos Ven 24 Mar 2017 - 15:51

    @Fred
    quand j’ ai utilisé la métaphore de l’ éventail, je ne pensais pas à ce koan de Hotetsu…je pensais plutôt à l’ éventail espagnol…
    je ne voulais pas évoquer un principe, mais plutôt les deux alternatives d’ appréhension qu’on pouvait adopter pour regarder le temps… mais effectivement on peut adopter ces deux attitudes pour regarder tout autre chose qui d’une manière ou d’une autre évoque la Grande Chose qui nous contient.
    En effet, d’une part on peut s’extraire de la manifestation, comme s’il nous était possible de contenir cette ‘’chose’’… et d’autre part il est difficile de s’en extraire puisque nous sommes bien en train de participer à la manifestation de cette ‘’chose’’ qui en fait nous contient.
    Il me semble qu’ Hotetsu a voulu montrer à son élève cette inextricabilité, et sa réponse silencieuse évoque bien que le principe absolu évoqué par son élève, se manifestait là dans le relatif, et qu’il était utopique de penser ne pas y être impliqué.

    Aussi comme tu l’ évoques il y a une certaine analogie entre la problématique de l’ air et celle de l’ éternité.

    C’est marrant puisque notre tendance serait de se considérer être un sujet qui pourrait attraper un objet, alors que c’est cet objet qui nous tient.
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    Message par Kaïkan Ven 24 Mar 2017 - 17:34


    Dans le bouddhisme le concept d'éternité n'a pas de place puisque tout composé (ou conditionné) est impermanent. L'éternité est donc du domaine de la métaphysique, bien qu'on puisse trouver aussi dans le bouddhisme des notions qui approchent celle d'éternité. Par exemple tout composé ou conditionné étant impermanent, le nirvana n'étant pas composé ou conditionné ne l'est pas. On pourrait envisager que le nirvana soit une sorte d'éternité pour ainsi dire.


    Pour le Bouddhisme theravāda ne reconnaît pas la réincarnation telle que nous la comprenons en occident.
    Pour le Bouddhisme, il n'y a pas d'âme (atma).
    S'il n'y a pas d'âme, il ne peut y avoir d'âme éternelle qui se réincarne de vie en vie car rien d'éternel n'existe.
    C'est un des principes fondamentaux du Bouddhisme basé en outre sur le fait que rien ne peut être éternel dans l'univers, car toute chose conditionnée est vouée à se transformer, puis à disparaître.
    La réincarnation de corps en corps d'une même entité pensante telle qu'imaginée en Occident n'est pas possible et ne fait pas partie de la théorie de la réincarnation du Bouddhisme.
    Néanmoins, chaque nouvelle vie va être fortement (mais pas totalement) influencée par son Karma, la somme des actions des vies précédentes. Le Bouddhisme sollicite la responsabilité de toutes personnes puisque les actes commis auront des conséquences dans une éventuelle vie future.


    Symbole du nœud sans fin du bouddhisme tibétain :

    Le concept d'éternité, (peut-on concevoir ce qui est éternel ?) 120px-10
    Nœud sans fin


    Dans le bouddhisme tibétain, il est à l’origine un symbole d’amour et de l'interdépendance des phénomènes.
    Sans début ni fin, il représente également la sagesse infinie du Bouddha, l’union de la sagesse et de la compassion.
    Il a pour nature de briller d'une multitude de couleurs, représentant l'accomplissement d'un état omniscient, sans obstacle, et symbolisant la réalisation des 10 perfections de l'esprit.

    Maître Dôgen a dit : "Sans attendre l'éveil, sans rechercher quoi que ce soit et juste s'asseoir, telle est la voie des bouddhas et des patriarches." C'est zazen qui fait zazen, non vous-mêmes avec vos idées idiotes sur l'éveil. Cette pratique est la manifestation de ce qu'il y avait bien avant trois mille kalpa, bien avant que le temps ne soit divisé. Dans la posture du lotus, le pied gauche est à droite et le pied droit est à gauche. Cela signifie qu'au moment de zazen, le temps et l'éternité sont entrelacés. De même pour l'espace : ce lieu de zazen atteint les confins de l'univers.

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    Message par Fred Ven 24 Mar 2017 - 17:44

    Tango a écrit:C’est marrant puisque notre tendance serait de se considérer être un sujet qui pourrait attraper un objet, alors que c’est cet objet qui nous tient.

    Quelque part lorsqu'une idée ou disons plutôt une sensation est prégnante elle se fait désirable et c'est peut-être la satisfaction qu'on a éprouvé à pouvoir étancher ce désir de l'exprimer correctement qui nous donne l'impression d'avoir dit quelque chose de juste, précisément, non pas parce que cette chose serait réellement juste mais parce qu'on l'aurait exprimée convenablement et de ce fait embrassée totalement ("il n'y a pas de sensations fausses" disait Cioran). Il y-a quelque chose d'éternel dans le sens d'infiniment répétitif dans ce désir et dans le fait de devoir l'assouvir. Quant à la spécificité interne de nos propos, elle ne serait peut-être que secondaire au regard de ce désir et de cet assouvissement, raison pour laquelle, ce désir étant inépuisable, on aurait jamais fini de dire la vérité quand bien même nous l'aurions exprimée déjà de mille façons.
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    Message par Fred Ven 24 Mar 2017 - 17:56

    Kaïkan a écrit:(...)Dans la posture du lotus, le pied gauche est à droite et le pied droit est à gauche. Cela signifie qu'au moment de zazen, le temps et l'éternité sont entrelacés.

    De là vient l'intérêt de cette notion "d'usage" je trouve. On voudrait savoir ce qu'est le temps, ce qu'est l'éternité et plus généralement ce qu'est la réalité. Mais en fait, ici et maintenant nous en faisons usage automatiquement, ainsi sont ils entrelacés dans le fait d'être, et être c'est ce que nous faisons à chaque instant en quelque sorte.
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    Message par tangolinos Ven 24 Mar 2017 - 18:19

    Pour autre métaphore évoquant ce qu’est l’ éternité, on pourrait dire que l’ éternité est un livre.
    Chaque page en serait une durée incluse dans ce livre, tout comme chaque phrase serait une durée incluse dans la page, tout comme chaque mot serait une durée incluse dans la phrase, tout comme chaque lettre serait un instant inclus dans ce mot.

    Aussi quand on est train de lire un mot de ce livre, doit-on penser et clamer qu’on lit ce mot ou ce livre ?

    haha, les deux réponses sont possibles, puisque les deux sont vraies !

    Disons que notre vie manifestée est une page de ce livre… il nous serait alors impossible de lire les autres pages… comment pourrait-on savoir combien il y a eu de pages avant, et combien après ?… et pourtant, il y a bien un livre qui contient toutes les pages.

    C’est cela l’ éternité, la chose qui contient toutes les autres choses.

    or il est bien évident que cette éternité échappe à notre champ de perception, puisque nous sommes manifestés (dans une seule page du livre), et que notre condition est bien de rester ignorants de ce que nous étions avant notre naissance physique, et de ce qu’ on sera après notre mort physique.

    Cependant, il m’ apparait évident que nous ne soyons pas notre manifestation, aussi il est possible de penser que nous étions déjà là au début du livre (si début il y a) et que nous serons toujours là à la fin du livre (si fin il y a)… il serait en effet incompréhensible que si destin il y a, il ne nous ait pas prévus depuis le début, et cela jusqu’à la fin, puisque nous participons à ‘’cela’’ jusqu’ à la fin (si fin il y a) à ce que les choses se manifestent tout comme c’est prévu.

    Ma conclusion m’ évoques de multiples questions, un peu comme si cette conclusion était une vision kaléidoscopique.

    Hmmmmm… c’est marrant de savoir que je ne sais rien, et que de ce rien puisse jaillir des choses que je ne sais pas.

    Ah ces choses ! sont-elles des choses que je tiens, ou des choses qui me tiennent ?

    En tout cas merci à Kaïkan d’avoir ouvert ce sujet pour me laisser délirer, et j’ espère que mes délires puissent servir à certains.

    Et pour finir: petit sourire à Dogen.
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    Message par Fred Ven 24 Mar 2017 - 19:34

    Tango a écrit:et pourtant, il y a bien un livre qui contient toutes les pages.

    Comment une infinité de pages pourraient-elles être contenues ? Shocked

    Les notions de contenant et contenu peuvent-elle avoir cours dans la notion d'éternité ?
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    Message par tangolinos Ven 24 Mar 2017 - 19:53

    @Fred
    si tu avais suivi mes propos, tu aurais vu qu’il nous est impossible de contenir la chose qui nous contient.
    Aussi la notion d’ éternité qui contient  toutes les manifestations est certes une déduction évidente mais ça nous restera toujours insaisissable puisque c’est cette chose qui nous saisit, et/ou qui nous contient.
    Il serait utopique de pouvoir la saisir et/ou de pouvoir la contenir.

    Hotetsu propose de s’éventer pour passer à un autre sujet, puisqu’il nous sera impossible de saisir la chose.
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    Message par Fred Ven 24 Mar 2017 - 22:02

    Comme tu veux. Néanmoins je profiterai de ce que ce sujet me semble être une occasion inestimable de parler de la conception bouddhiste de la vacuité.

    Je m’aperçois en fait que le concept d’éternité peut aisément nous conduire à comprendre celui d’interdépendance et de vacuité. En effet, conventionnellement on distingue des durées. Les durées ainsi distinguées seront dirons-nous interdépendantes, relatives les unes aux autres. Il est facile de comprendre que dans l’absolu, donc hors de ces segmentations conventionnelles du temps, toutes ces durées sont unes. Or, je ne pense pas qu’on puisse dans ces conditions parler encore de temps, c’est pour cela que le terme éternité pourrait aussi signifier peut-être « intemporalité ».

    Ce qu’il est facile de comprendre pour le temps peut se comprendre à présent pour tous les phénomènes. Là où il s’agissait de parler de l’interdépendance des durées conventionnellement établies, il s’agira ici de mentionner l’interdépendance de tous les phénomènes. Mais on comprend bien ici aussi que c’est conventionnellement qu’on parle de phénomènes et que dans l’absolu, tout comme nous l'avons précisé pour les durées, tous ces phénomènes sont un. Et de même que nous avons parlé d’intemporalité, nous parlerons ici de vacuité des phénomènes. Nous avons donc ici les deux niveaux de réalité qui m'apparaîsse avoir été exposés dans le bouddhisme ; la vue conventionnelle et la vue ultime et il serait à préciser que ces vues sont simultanées, à savoir que le conventionnel et l’ultime ne sont pas perçus comme deux choses distinctes, raison pour laquelle on peut lire dans le Sutra du Coeur que la forme est vacuité et que la vacuité est la forme.
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    Message par tangolinos Sam 25 Mar 2017 - 4:08

    @Fred
    C’est pas que je veux ou que je ne veux pas…
    C’est plutôt qu’il nous est impossible de saisir la grande chose.
    Comme tu l’ évoques cette éternité a un aspect d’intemporalité, puisque toutes les durées y sont contenues, comment pourrait-elle être elle-même une durée ?
    Comment pourrait-elle se contenir elle-même ?
    C’est pourquoi si on devait lui attribuer une forme, ce serait plutôt un cercle qu’une droite, pour évoquer son ultime plénitude…sans commencement, ni fin.

    On peut, tout comme tu le proposes voir une analogie entre mon éventail et les deux niveaux de réalité du Bouddhisme.

    Tantôt ouvert, tantôt fermé.
    Tantôt forme, tantôt vacuité.

    Et cette idée de vacuité ou non-forme, évoque bien l’ ultime insaisissabilité.
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    Message par zanshin Sam 25 Mar 2017 - 5:58

    Fred a écrit:Or, je ne pense pas qu’on puisse dans ces conditions parler encore de temps, c’est pour cela que le terme éternité pourrait aussi signifier peut-être « intemporalité ».
    Je trouve que cette idée développée par Fred est très intéressante et relève le débat en introduisant un nouvel aspect de sunyata.
    Dans la Prajñānāma mūla madhyamaka kārikā, dit Traité du Milieu, Nāgārjuna affirme quant à lui que « nous appelons vacuité ce qui apparaît en dépendance »
    Cependant, il serait erroné de ramener exclusivement la vacuité bouddhique à l'idée d'interdépendance ou de relativité : la vacuité n'est pas un concept qui relève seulement de la pensée discursive, elle est destinée d'abord à ouvrir l'intuition métaphysique (prajñā) du pratiquant. Il s'agit de comprendre qu'il y a une différence fondamentale entre la façon dont nous percevons le monde, y compris nous-même, et la réalité de ce monde.
    D'après Matthieu Ricard :
    « La vacuité n'est ni le néant ni un espace vide distinct des phénomènes ou extérieur à eux. C'est la nature même des phénomènes. Et c'est pour cela qu'un texte fondamental du bouddhisme, le Soûtra du Cœur, dit : "La vacuité est forme et la forme est vacuité". D'un point de vue absolu, le monde n'a pas d'existence réelle ou concrète. Donc, l'aspect relatif, c'est le monde phénoménal, et l'aspect absolu, c'est la vacuité. […] Les phénomènes surgissent d'un processus d'interdépendance de causes et de conditions, mais rien n'existe en soi ni par soi. La contemplation directe de la vérité absolue transcende tout concept intellectuel, toute dualité entre sujet et objet. »
    C'est justement ce que Fred nous invite à prendre en considération.
    C'est quand même important de ne pas rester toujours sur un aspect figé de notre compréhension. Smile
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    Le concept d'éternité, (peut-on concevoir ce qui est éternel ?) Empty Re: Le concept d'éternité, (peut-on concevoir ce qui est éternel ?)

    Message par tangolinos Sam 25 Mar 2017 - 12:58

    zanshin a écrit:C'est quand même important de ne pas rester toujours sur un aspect figé de notre compréhension.
    c’est justement cette fluctuation de compréhension que je voulais évoquer avec mon éventail.

    Pour moi, il n’ y'a qu’une seule réalité, et c’est notre regard qui la déforme…

    Je suis plutôt en accord avec Nishijima :
    Trois philosophies et une réalité
    À partir de son étude du Shōbōgenzō, Nishijima a développé une théorie appelée « trois philosophies et une réalité », qui présente son interprétation spécifique des Quatre Nobles Vérités, tout en expliquant la structure de l'œuvre de Dōgen. Selon Nishijima, Dōgen a soigneusement construit son Shōbōgenzō sur une structure quadripartite, où chaque problème est décrit selon quatre différentes perspectives. La première est « idéaliste, abstraite, spirituelle et subjective »; Nishijima dit qu'il s'agit là de l'interprétation correcte de la Première Noble Vérité, (généralement appelée dukkha). La seconde perspective est « concrète, matérialiste, scientifique et objective » (généralement appelée samudaya). La troisième perspective est décrite comme intégration des deux premières, ce qui produit une synthèse « réaliste "; (généralement appelée nirodha). La quatrième perspective est la réalité elle-même, dont Nishijima soutient qu'elle ne peut être décrite ni philosophiquement ni en mots, mais que Dōgen tente de suggérer par la poésie et le symbolisme. Dans le bouddhisme, on parle généralement pour la Quatrième Vérité, de Noble Octuple Sentier.[1]
    LIEN

    et je suis plutôt en désaccord avec Matthieu Ricard quand il dit:
    Les phénomènes surgissent d'un processus d'interdépendance de causes et de conditions, mais rien n'existe en soi ni par soi.
    Ce ne sont pas les phénomènes qui surgissent ou qui n’existent pas, ce sont nos interprétations qui fluctuent.
    Pour exemple: quand il fait nuit , Matthieu dirait que le soleil n’existe pas, puisque nous ne le voyons pas.
    Or nous savons bien que le soleil existait avant notre naissance et existera après notre mort, donc le soleil existe indépendamment de notre manifestation...Il serait utopique de penser que notre existence soit indispensable pour son existence.

    Mais bon, il est possible que le discours de Matthieu soit un moyen habile comme le suggère ton précédent message :
    Cependant, il serait erroné de ramener exclusivement la vacuité bouddhique à l'idée d'interdépendance ou de relativité : la vacuité n'est pas un concept qui relève seulement de la pensée discursive, elle est destinée d'abord à ouvrir l'intuition métaphysique (prajñā) du pratiquant.

    Je dirais que ce qui anime la fluctuation de notre regard, est l’ intention préliminaire de l’ observateur… quelque part, s’il est dénué d’intention, il verra la réalité telle qu’elle est, mais ne pourra rien en dire… ainsi dans ce cas là, ce n’est pas la réalité qui est sans existence, mais notre intention.
    Cette absence d’intention peut être entendue comme étant l’ absence de l’observateur, (ou plutôt l’ absence d’identité), c’est pourquoi sujet et objet ne sont plus qu’un.
    Par contre si l’ observateur est pourvu d’ une intention, il ne verra rien d’ autre que le reflet qu’il recherche… et toute autre chose lui semblera inexistante.

    Au sujet de cette intention, il importe de savoir qu’elle apparait plus ou moins à notre insu, et que quoi qu’on fasse, il y en aura toujours une. Il serait vain de penser pouvoir se dénuer de toute identification et pouvoir vraiment maintenir cet état, hors l’ ultime attitude méditative… attitude que les enfants savent maintenir naturellement quand ils sont dans la lune…. mais dans ce cas là peut-on encore parler d’objet et/ou de sujet ?

    Cependant, il est possible de penser que la pratique de zazen soit une façon de se rapprocher de cet état dénué d’identification.
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    Message par Fred Sam 25 Mar 2017 - 13:38

    Zanshin a écrit:Les phénomènes surgissent d'un processus d'interdépendance de causes et de conditions, mais rien n'existe en soi ni par soi.

    Petite précision : Ne pas comprendre par là que rien n'existe ou que les phénomènes n'existent pas. D'où le "en soi ni par soi".
    Les phénomènes dépendent pour leur existence de l'infinité des existences phénoménales. Et comme précisément on parle de myriade de phénomènes, ceux ci ne peuvent être contenus. Cette idée abstraite d'un contenu et d'un contenant évacuée on peut réaliser que "tout est dans l'un et que l'un est dans tout" ou encore que "la forme est vacuité et que la vacuité est la forme".
    Ainsi on pourrait dire d'une certaine façon que pour le bouddhisme, l'éventail est à la fois ouvert et fermé.
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    Message par tangolinos Sam 25 Mar 2017 - 15:07

    Fred a écrit:
    Zanshin a écrit:Les phénomènes surgissent d'un processus d'interdépendance de causes et de conditions, mais rien n'existe en soi ni par soi.

    Petite précision : Ne pas comprendre par là que rien n'existe ou que les phénomènes n'existent pas. D'où le "en soi ni par soi".
    C’est marrant, puisqu’il me semblait plutôt que Matthieu en précisant ‘’ en soi ni par soi’’ insistait pour dire que les phénomènes n’ existaient d’aucune manière.

    Tiens pour aller plus loin voici un LIEN où on peut lire:  
    ''Pour résumer, l’en soi est le mode d’être des choses, le pour-soi le mode d’être des hommes.''

    Autrement dit, il me semble que Matthieu fait usage d'un moyen habile, à l'image du neti-neti.
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    Message par bulleOcéan Sam 25 Mar 2017 - 15:24

    Sur ce sujet  Kaïkan

    "L'univers entier est l'éternel présent"

    dans nos signatures, exprime bien ce que cela exprime.

    En passant de qui est ce ?

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    Message par Fred Sam 25 Mar 2017 - 16:40

    Tango a écrit:C’est marrant, puisqu’il me semblait plutôt que Matthieu en précisant ‘’ en soi ni par soi’’ insistait pour dire que les phénomènes n’ existaient d’aucune manière.

    Bah non, "en soi ni par soi", est employé dans le bouddhisme pour dire que les phénomènes existent en interdépendance.
    Exemple : le "je" n'existe pas en soi ni par soi, il dépend du tu, il, elle, nous, vous, ils, elles.

    ''Pour résumer, l’en soi est le mode d’être des choses, le pour-soi le mode d’être des hommes.''

    Cette phrase a sa cohérence relativement à ce que veut dire son auteur.
    Quand dans le bouddhisme on utilise ce concept "d'en soi", cela s'inscrit dans la cohérence de ces enseignements. Si tu mélanges les deux, tu perds la cohérence et de l'un et de l'autre, ainsi le sens est perdu pour les deux.
    Ce point concernant la cohérence des enseignements est important. Le zen est un véhicule, Ramana (par exemple) en est un autre.
    Ne pas s’inscrire dans la cohérence d’un enseignement, dans son vocabulaire, ses moyens habiles etc c'est être inapte à en pénétrer la vérité, c’est être semblable à un prof de moto école qui voudrait enseigner à un élève comment conduire une voiture selon les points spécifiques propres à la conduite d'une moto. Certes la voiture comme la moto servent toute deux à aller d’un point A à un point B, mais il n’en reste pas moins que ce sont deux véhicules différents qui ont tout deux leurs spécificités et leur cohérence structurelle. Ce serait dommage de perdre l'essence (avec et sans jeu de mot) qui est d'aller de A jusqu'à B.
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    Le concept d'éternité, (peut-on concevoir ce qui est éternel ?) Empty Re: Le concept d'éternité, (peut-on concevoir ce qui est éternel ?)

    Message par tangolinos Sam 25 Mar 2017 - 18:25

    @Fred
    je ne suis pas stupide…quoi que…
    je sais bien que j’ arrive ici sur ce forum, à contre-pied, mais il m’importe de pénétrer autant la voie de Ramana que du Bouddhisme ou autres doctrines.
    Si les voies sont multiples, elles sont ultimement Une.
    Aussi, lorsqu’ un enseignant écrit une phrase prétendant décrire la réalité, elle devrait être compréhensible par tous.
    Si comme tu l’ évoques, je n’ ai pas compris en quoi le sens bouddhiste du ‘’en-soi’’ se distingue du concept philosophique commun, je te remercie par avance de me donner de plus amples explications.

    Pour précision, je suis vraiment convaincu qu’il y a un lien entre toutes choses, mais je renonce à me laisser penser que les choses n’ aient pas d’existence ''en soi''.
    Disons qu’ ultimement dans l’ absolu tout est Un, mais nous sommes bien dans le monde relatif manifesté.
    Aussi quand Matthieu dit que rien n’ a d’existence en soi, je l’ interprète comme un moyen habile, pour inciter les élèves à cheminer vers l’ Absolu. (ou si tu préfères, à adopter l’ ultime regard qui permet une interprétation de la réalité comme étant non-duelle).

    Pour reprendre ta métaphore de la moto ou de la voiture, les deux sont contraintes de respecter le code de la route… et dans notre cas de figure, le mieux est de toujours utiliser les concepts dans le sens le plus communément compréhensible, sans en modifier le sens… Sinon c’est la porte ouverte à n’ importe quoi !… et oui !.. autant l’ auto que la moto risquent fort de sortir de la route.

    Pour conclure, je dirais que je suis vraiment désolé d’ assumer l’ apparence de quelqu’un d’ emm… mais quelque chose me dit que c’est ma voie, et que derrière cette apparence se cache quelque chose qui ressemble à la chose qui me donne la force de continuer à Emm…
    Ah! cette chose qui nous anime et qui dans toute sa discrétion attend qu’on la reconnaisse… étoile
    Humm… en ai-je encore trop dit ?
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    Message par Kaïkan Sam 25 Mar 2017 - 19:15


    Dôgen a écrit:Dans la posture du lotus, le pied gauche est à droite et le pied droit est à gauche. Cela signifie qu'au moment de zazen, le temps et l'éternité sont entrelacés.

    Cette phrase de Dôgen ( dont la totalité est dans le message n°8 ), quand on la scrute attentivement, nous dit que le temps et l'éternité sont deux choses différentes mais qu'au moment de zazen, ces deux choses sont entrelacées.
    Comment peuvent-elles s'entrelacer ? Mais bien sûr, dans l'instant présent. Dans l’ "ici et maintenant". Dans ce moment présent qui unit présent passé et futur.

    Au bas de ma signature j'ai écrit cette phrase : " L 'univers entier est l'éternel présent ". J'ai très longuement réfléchi et fait de nombreuse tentatives avant d'opter pour cette phrase venue de très profond en moi. J'ai même eu des doutes qu'elle pourrait être mal interprétée. En fait j'aurais dû écrire :  " L 'univers entier est l'éternel présent et l'éternel présent est l'univers entier "
    J'ai attendu pour faire ce message et j'ai eu la surprise de voir que BulleOcéan avait capté ce dont je voulais parler. Oui cette phrase c'est en quelque sorte une intuition longuement mûrie au cours de nombreux zazen.
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    Le concept d'éternité, (peut-on concevoir ce qui est éternel ?) Empty Re: Le concept d'éternité, (peut-on concevoir ce qui est éternel ?)

    Message par Fred Sam 25 Mar 2017 - 19:35

    Tango a écrit:je ne suis pas stupide…quoi que…
    je sais bien que j’ arrive ici sur ce forum, à contre-pied, mais il m’importe de pénétrer autant la voie de Ramana que du Bouddhisme ou autres doctrines.
    Si les voies sont multiples, elles sont ultimement Une.
    Aussi, lorsqu’ un enseignant écrit une phrase prétendant décrire la réalité, elle devrait être compréhensible par tous.

    Premièrement, comme déjà mainte fois évoqué le bouddhisme ne vise pas à décrire la réalité. La vue développée par cette doctrine est celle qui mènera à la cessation de la souffrance. Tu n’arrives pas à voir la nuance.

    Deuxièmement :  Penche-toi avec conviction sur l’ensemble de ce qui est dit dans la doctrine bouddhiste. Non seulement tu en comprendras le sens, mais tu en saisiras la profonde cohérence.
    Je ne te vois pas faire beaucoup d’effort dans ce sens là. Je te vois bien plutôt poursuivre le but de faire valoir ta propre doctrine qu’au passage je comprends parfaitement bien et que je trouve par ailleurs fort intéressante, mais qui n’est pas le point de vue bouddhiste, donc le véhicule bouddhiste. La question n’est pas de savoir si toi ou les bouddhistes ont tort ou raison, la question est de savoir si on veut parvenir à comprendre ce qui se dit dans cette doctrine puisque jusqu’à preuve du contraire nous sommes sur un forum bouddhiste.

    Tango a écrit:Si comme tu l’ évoques, je n’ ai pas compris en quoi le sens bouddhiste du ‘’en-soi’’ se distingue du concept philosophique commun, je te remercie par avance de me donner de plus amples explications.

    Là encore, les explications t’ont été données plus haut, tu n’as qu’à relire. De plus « en soi » se comprend probablement en occident d’une manière commune, mais le bouddhisme n’est pas une philosophie d’origine occidentale, c’est pourquoi encore une fois, elle nécessite de faire l’effort tout particulier de se pencher sur ce qu'elle a à dire et sur sa manière non commune pour un occidental de le formuler.

    Tango a écrit:Pour précision, je suis vraiment convaincu qu’il y a un lien entre toutes choses,

    C’est pourquoi dans le bouddhisme on parle d’interdépendance.

    Tango a écrit:mais je renonce à me laisser penser que les choses n’ aient pas d’existence ''en soi’'.

    Le fait que les choses n’aient pas d’existence en soi, signifie proprement qu’elles sont interdépendantes, ou selon tes termes qu'elles sont en lien, non qu’elle n’existent pas. L’exemple que je t’ai déjà donné c’est que le je n’existe pas en soi, c’est à dire qu’il dépend pour son existence de tous les autres pronoms.

    Tango a écrit:
    Disons qu’ ultimement dans l’ absolu tout est Un, mais nous sommes bien dans le monde relatif manifesté.

    Dans le bouddhisme, il est dit qu’en définitive le manifesté et l’ultime, la forme et la vacuité sont un.


    Tango a écrit:Aussi quand Matthieu dit que rien n’ a d’existence en soi, je l’ interprète comme un moyen habile, pour inciter les élèves à cheminer vers l’ Absolu. (ou si tu préfères, à adopter l’ ultime regard qui permet une interprétation de la réalité comme étant non-duelle).

    Oui, dans le bouddhisme on chemine vers la compréhension de cet Absolu pour en définitive  reconnaitre qu’il est un avec le relatif. Ainsi, toutes les manifestations révèlent cet absolu.

    Tango a écrit:
    Pour reprendre ta métaphore de la moto ou de la voiture, les deux sont contraintes de respecter le code de la route… et dans notre cas de figure, le mieux est de toujours utiliser les concepts dans le sens le plus communément compréhensible, sans en modifier le sens… Sinon c’est la porte ouverte à n’ importe quoi !… et oui !.. autant l’ auto que la moto risquent fort de sortir de la route.

    Mon cher Tango, en toute amitié tu es sacrément gonflé  Laughing , puisqu’ici, le seul à ne pas respecter le code de la route c’est toi. Je te rappelle encore une fois que nous sommes sur un forum bouddhiste, et que le code de la route devrait bien être dicté par cet enseignement.

    Tango a écrit:Pour conclure, je dirais que je suis vraiment désolé d’ assumer l’ apparence de quelqu’un d’ emm… mais quelque chose me dit que c’est ma voie, et que derrière cette apparence se cache quelque chose qui ressemble à la chose qui me donne la force de continuer à Emm…
    Ah! cette chose qui nous anime et qui dans toute sa discrétion attend qu’on la reconnaisse… étoile
    Humm… en ai-je encore trop dit ?

    Ce n’est pas que tu en as trop dit. Mais c’est que tu dis des bêtises.  Le concept d'éternité, (peut-on concevoir ce qui est éternel ?) 20451037-motic-ne-excited

    Bon, j'arrête là. J'ai l'impression de pisser dans un violon Laughing
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    Message par tangolinos Sam 25 Mar 2017 - 21:05

    et le violon chante. Very Happy
    Fred a écrit:Premièrement, comme déjà mainte fois évoqué le bouddhisme ne vise pas à décrire la réalité. La vue développée par cette doctrine est celle qui mènera à la cessation de la souffrance. Tu n’arrives pas à voir la nuance.
    Hum…je vois souvent des propos habiles tels des doigts tendus vers la Lune…mais permets-moi de penser que ce qui importe est de décrire la réalité telle qu’elle est, sinon il serait possible de penser que le Bouddhisme soit une voie illusoire, qui certes propose de calmer la souffrance, mais quelque part elle mettrait les pratiquants dans un état illusoire.
    Deuxièmement :  Penche-toi avec conviction sur l’ensemble de ce qui est dit dans la doctrine bouddhiste.
    Comme tu l’ évoques il faudrait que je sois convaincu, pour me pencher de la façon éperdue que tu proposes…Or je suis de nature très sceptique, aussi le moindre chaos m’interroge.
    Et même si je ne suis pas un adepte proclamé du Bouddhisme, j’ ose espérer que mes réticences puissent servir à certains, qu’ils soient Bouddhistes ou pas.
    Ma doctrine ?… je n’ ai pas de doctrine !… en effet, je n’ ai pas reçu d’enseignement, et je n’ ai aucune prétention de pondre une école… je ne fais que partager mes expériences, à prendre ou à laisser… loin de moi est l’ idée d’imposer quoi que ce soit.
    Cependant, je suis à mon insu, un fervent défenseur de mes convictions et je remercie d’avance tous ceux qui me permettront de les affiner.

    Gonflé ?…haha excuse-moi, mais je n’ ai pas pour habitude de prendre l’ autoroute… je préfère les petits chemins avec des virages secs qui me mettent deci delà devant des véritables obstacles qui ne sont pas prévus…. Disons que je suis un aventurier qui se passe d’assistance.

    Des bêtises?…haha je ne suis pas dupe, les idées qui ne conviennent pas sont cataloguées comme bêtes. Or la véritable question est de savoir qui est celui qui catalogue…n’ a-t-il quelque part des convictions à défendre ?… n’ est-il pas en train de dénigrer, ce qui le dérange ?

    Fin du chant du violon. Very Happy

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