Je rejoins Yudo à 100%. J'espère, Yudo, que tu pourras expliquer comment tu es arrivé à progresser via le zen, je vais faire part de mon expérience "tibétaine", que je pratique depuis longtemps (je suis "zen" seulement depuis quelques mois).
La méditation peut t'apprendre à faire la différence entre les souffrances réelles (chez toi), et à les diminuer en réduisant l'impact des émotions, qui peuvent fort les augmenter ou les diminuer, voire les supprimer. Le corps a des capacités étonnantes pour diminuer la sensation de souffrance, aussi bien physique que psychologique. En changeant sa façon de voir les choses, en les voyant comme elles sont (et non pas déformées par les émotions, les projections, le traumatismes, les angoisses), on est moins perturbé.
Je comprends bien que ce n'est pas de cela que tu veux parler, mais un peu quand même puisque tu souffres de voir souffrir les autres. C'est aussi ma plus grande difficulté dans cette vie, j'ai un énorme problème avec cela. Ce n'est que dans le bouddhisme que j'ai trouvé la réponse.
Il y a deux aspects qu'il faut séparer: (1) TA souffrance, en réaction à (2) celle des autres.
Souffrir parce que les autres souffrent, c'est la compassion chrétienne, ça fait très chic, mais cela ne sert strictement à rien. Ces sont des "émotions perturbatrices" qui empêchent de voir clair et d'être efficace. La crainte qu'on a, si on diminue cette compassion, c'est de devenir insensible, ce qui un autre extrême à éviter. Il faut rester sensible, réceptif, compréhensif, sans souffrir soi-même sinon on est emporté par ses émotions. Et cela, c'est la compassion bouddhiste : comprendre, et agir efficacement pour aider les autres.
Le terme est "KARUNA", et "compassion" le traduit très mal. Karuna signifie "souhaiter que tous les êtres soient délivrés de la souffrance". Cela ne signifie pas "souffrir avec eux".
Jai trouvé des explications et éclairements dans les enseignements du bouddhisme tibétain, qui s'adressent plus à notre intellect, alors que le zen est moins "explicatif". C'est un avis purement personnel, pas une critique: chaque courant a ses avantages et inconvénients et ils se complètent. Le zen est le fondement, mais il est trop aride. J'ai dit "suivre des enseignements" et faire les méditations proposées, cela est infiniment mieux que lire des livres (mais c'est bien aussi, évidemment). Je ne me souviens plus du nom de cette médiation spécifique, j'avais fais un stage de 3 jours, ce n'est qu'au bout de ces 3 jours de théorie+pratique que j'ai compris le mécanisme, qui c'est LA réponse à notre question. C'est une méditation qui permet de transformer la violence extérieure. Ne me demande pas d'expliquer, je n'y arrive pas, cela doit se vivre, on le sent de l'intérieur avec les exercices pratiques.
Une autre piste de réflexion, totalement différente est la trilogie des dieux de Bernard Werber. Je suis en train de la lire. C'est loin d'être de la bonne littérature, mais il a plein d'idées géniales. Il propose sous forme de roman léger l'idée d'apprentis dieux qui doivent apprendre à diriger leur "peuple". Cette "théorie" est à mon avis infiniment supérieure à ce que nous proposent les religions, mais elle n'est pas crédible pour autant. Elle a cependant le mérite de nous faire voir les choses très différemment, de prendre du recul, et de nous détacher un peu de tous les événements douloureux.
Pour moi aussi, atténuer cette révolte qui gronde en moi est une question de survie. Je n'exagère pas: quand je vois cette injustice et cette violence et que je me sens si impuissante, j'aurais envie de me flinguer.
Je pourrais en parler encore longuement parce que cela me travaille depuis longtemps et j'ai quand même pas mal progressé, je pense que c'est à chacun de faire son cheminement.