Fureur et désespoir...

Bonjour.

Je n'aime pas me voiler la face et je me tiens, régulièrement, quotidiennement, au courant des horreurs, cruautés, déviances, violences, etc d'une partie de l'humanité, envers l'autre, et ses enfants, et la planète, et les animaux.
Tout cela m'accable et me désespère et m'enrage.
Je veux faire quelque chose pour que cela change et s'améliore. J'ai honte d'être un "blanc" et d'être occidental. J'ai envie de fuit l'Occident.
Je veux que ma fille puisse se dire un jour : "Papa s'est battu pour notre présent, et notre avenir".
Seulement, nous vivons une époque effroyable, où une minorité écrase la majorité, la contrôle, la manipule, la violente, se montrant très cruelle.
Je me sens impuissant.
Je me dois d'agir, et peut-être de prendre du pouvoir. Je dois cela à ma fille, à nos enfants, aux pauvres, aux miséreux, etc.

Hormis pratiquer le Dharma, que faites-vous au quotidien pour soulager les souffrances des hommes et améliorer notre quotidien ?

"A force de tout voir l'on finit par tout supporter...
A force de tout supporter l'on finit par tout tolérer...
A force de tout tolérer l'on finit par tout accepter...
A force de tout accepter l'on finit par tout approuver. " Saint Augustin.

Quel que soit le nombre de saintes paroles que vous lisez, que vous prononcez, quel bien vous feront-elles si vos actes ne s'y conforment pas ? - Le Bouddha

Salut !

La première étape, peut être, c'est d'accepter qu'on est aussi tous les salopards qu'on déteste. Seulement à partir de là, on peut faire changer les choses.

Peut être aussi qu'il faut se méfier des analyses rapides que l'on fait de notre monde. Notre époque n'est pas vraiment plus effroyable qu'une autre, par exemple. Des saloperies, il y en a toujours eu, il y en aura toujours.

Je crois de moins en moins à l'engagement "contre" quelque chose ; le plus souvent, en se révoltant contre quelque chose, quelque part on légitime cette chose. Et puis comme tu le décris bien, le travers dans lequel on peut tomber est de se dire "il faut que je prenne du pouvoir pour contrer ce qui me dégoûte" ; et bien souvent c'est exactement ça qui, insidieusement, entretient ce qu'on voudrait combattre. Y a qu'à regarder tous ces vieux soixante-huitards qui se sont complètement embourgeoisés et vivent et font vivre un capitalisme effréné. C'est pour moi comme ce qui se passe en zazen, parfois : à lutter contre quelque chose de douloureux, on renforce la souffrance. Très difficile de réussir à trouver une posture adéquate : je crois qu'il ne faut pas tout accepter non plus. Dans tous les cas, je crois que pour changer une situation que l'on trouve terrible, l'agression et la violence sont les pires moyens.

La haine de soi, la honte de soi, et la haine des autres (même les pires salopards) ne mène nulle part. Il va y avoir un bouquin d'Eric Rommeluère qui va paraître, en février, sur le bouddhisme engagé, tu auras peut être dedans des réponses ; il y a aussi une revue vachement intéressante, qui traite de l'engagement non violent dans des situations très concrètes, tout en proposant des articles de fond : http://www.nonviolence-actualite.org/

Il ne sert à rien de se tordre les mains devant la télé. (Ou à la lecture du journal, ou à l'écoute de la radio). Il faut accepter d'être impuissant devant ce sur quoi nous n'avons aucune prise: c'est à ce prix que nous pouvons diriger nos énergies sur ce que nous pouvons faire.
J'ai suffisamment entendu parler de personnes qui dépensent une énergie folle à "faire le bien", du genre médecins du monde ou autres formes de coopération, où l'on part loin de chez soi, en Afrique ou en Asie, pour "faire le bien", mais qui sont incapables de s'occuper correctement de leur épouse et de leurs enfants: en fait, à bien observer, on est obligés de constater qu'ils vont ailleurs "faire le bien" juste pour pouvoir fuir leur réalité quotidienne.
Ce n'est pas la bonne solution. Il faut faire ce qui est à notre portée, et souvent, comme le fait remarquer Brad Warner, cela commence par faire le ménage dans sa chambre. Cela parait dérisoire, mais c'est la condition sine qua non pour que quelque chose soit fait, selon le principe du battement de l'aile du papillon.

Merci pour ton intervention AncestraL, je songeais sérieusement à faire un post similaire au tien.
Et je rajoute même : à la vue de ces horreurs, je n'arrive pas à garder mon sang froid. Oh, je sais bien que je ne suis pas, dans l'absolu, meilleur qu'un autre, et que si j'étais né à un autre endroit, je serais peut-être dans le camp de la violence et de la haine.
Mais tout de même, quand je vois l'horreur telle qu'on l'étale dans les médias, ma tripe s'emballe, et c'est l'animal en moi qui s'exprime. Je deviens moi-même haineux, je ressens le besoin de vengeance. Alors oui, ma tête est raisonnable et me dit bien que ce n'est pas du tout l'attitude la plus constructive à avoir. Pourtant j'ai beaucoup de mal à étendre mon empathie à des gens qui tuent de sang froid, sans regret, et même avec jouissance.
Il y a une bête tapie dans chacun de nous. Non : l'homme est cette bête, cet animal, l'humanité est inscrite dans le cadre de l'animalité ne l'oublions pas (pour ceux qui ont une heure devant eux https://www.youtube.com/watch?v=ZlKJccM_ZUA ), il se met des barrières, s'inhibe, c'est tout, mais ces barrières sont fragiles, et sentir parfois poindre la cruauté au plus profond de soi, en réponse à une autre cruauté, me dérange profondément. En niant son animalité, on se perd, on ne se comprend plus et on ne comprend plus les autres, alors on fait les mauvais choix. Il faut commencer par l'accepter.

J'essaye de travailler là-dessus, et aussi d'avancer en allant dans le bon sens. J'ai songé aussi à partir. De par ma formation, j'ai des compétences à proposer. Mais même mes camarades les plus optimistes hier, confrontés à la réalité du terrain, avouent que certaines zones du monde ont une dynamique de désordre entretenu, un vrai déchirement pour les gens de bonne volonté.

Un malheur en vaut un autre, on peut agir positivement partout, même près de chez soi. AncestraL, tu es blanc, pas UN blanc. Tu habites en occident, mais tu n'es pas l'Occident. Tu n'as pas à avoir honte du comportement des autres. Pas plus que tu ne dois te flatter des réussites d'une tierce personne. Tout ça est affaire d'ego. Tu n'as pas de compte à rendre pour les choses envers lesquelles tu es impuissant. Continue à agir à ton échelle comme il te semble bon, en accord avec toi, et j'imagine (mais c'est ton choix), avec le Dharma. Si tu ressens le besoin de donner de toi, fais-le. Va donner un peu de chaleur dans les maisons de retraite, dans les associations, dans les prisons, même. Ne cherche pas à sauver le monde. Le complexe de l'Occidental ne mène à rien d'autre que de l'absurde. Les bonnes choses amènent les bonnes choses, c'est une loi naturelle, et ton investissement local, avec celui des autres, c'est le monde entier qu'il finira par rendre un peu plus doux.

Romain Gary a écrit:Il existe aujourd'hui une nouvelle casuistique qui vous dispense, à cause du Biafra, à cause du Vietnam, à cause de la misère du tiers-monde, à cause de tout, d'aider un aveugle à traverser la rue.

Pour ma part, au jour d'aujourd'hui, je me sèvre des informations. Elles ne font que nous enrouler dans du négatif, et moi ça ne me donne aucune énergie pour aider à changer en mieux. Au pire ça m'accamble, au mieux ça me rend désabusé.
Mieux vaut faire goûter la nature, le parfum de l'herbe, le soleil sur la peau, le son du vent, à ses enfants. Sortir des espaces limités et limitants des écrans qui prétendent nous montrer une réalité qui n'est en fait qu'un message partiel qu'on choisit de nous donner.
Il y a un précepte qui dit de ne pas s'intoxiquer le corps et l'esprit. Au-delà de la nourriture physique et de ce qu'on boit, il y a aussi les images et les sons qu'on se met dans le cornet.
PArfois, mieux vaut se mettre un bon film marrant, mais sans esprit sarcastique, passer une soirée à jouer, sortir voir de l'art, écouter de la musique, aller rencontrer des gens.
Tout le monde s'enferme devant sa télé, regarde son Iphone dans le bus sans plus regarder autre chose et pas son voisin,, on est connecté au monde entier mais pas à ce que nous entoure.
Ryokan s'arrètait contempler la lune, Dogen aussi.
Le dharma c'est déjà ça.
Invite des amis samedi soir. Parlez de choses ordinaires. la profondeur est là aussi, dans un partage simple. Pas besoin de trop en faire, les occasions viendront d'elles mêmes à force.

Faut sortir de ces sentiments négatifs, et reconnaître là où notre vie telle qu'elle est aide déjà le monde, et arrèter de vouloir en faire non pas pour aider les autres mais effacer sa culpabilité obscure.

Vivre simplement. Et l'hygiène mentale : attention aux infos, ça intoxique, c'est trop de douleur à digérer à laquelle on ne peut rien faire. Ca ne fait que se sentir encore plus impuissant.

Bonjour tous.

On m'a découvert la semaine dernière une maladie grave, à l'origine de mon hypersensibilité...
C'est pas la joie.
Il y a 1/5 que j'en meurs, mais il y a aussi l'espoir d'une rémission quasi totale, même si ça prend du temps...

Donc, ce n'est pas si mal. Moi, on m'a découvert que j'avais de très fortes chances de mourir d'ici une trentaine d'années...

Yudo, maître zen a écrit:Donc, ce n'est pas si mal. Moi, on m'a découvert que j'avais de très fortes chances de mourir d'ici une trentaine d'années...

Merci

Bon courage Ancestral ! J'espère que tu vas te rétablir.

Zenoob a écrit:Bon courage Ancestral ! J'espère que tu vas te rétablir.

Merci. Je veux guérir, mais ça va être un chemin de croix, car il est impossible de sortir totalement de ma maladie, et j'aurais toujours ce risque élevé de mourir subitement. J'ai du mal à vivre tout ça en ce moment.

Je sais que c'est un peu bateau et crétin de dire ça, mais peut être que paradoxalement tu vas découvrir quelque chose d'incroyable dans cette voie qui est devenue la tienne.

Zenoob a écrit:Je sais que c'est un peu bateau et crétin de dire ça, mais peut être que paradoxalement tu vas découvrir quelque chose d'incroyable dans cette voie qui est devenue la tienne.

Peut-être...

Pour l'instant, je me rends surtout compte des innombrables pièges qu'elle m'a tendu et dans lesquels elle m'a poussé. Ma maladie m'a fait - et je ne le savais pas ! C'est terrible ! Je bosse avec des prisonniers au quotidien, mais le plus captif d'entre nous, c'est moi !

Ouais je vois ce que tu veux dire ; mais un premier pas vers la liberté, c'est de prendre conscience de sa propre prison !

Zenoob a écrit:Ouais je vois ce que tu veux dire ; mais un premier pas vers la liberté, c'est de prendre conscience de sa propre prison !

Ma conscience a toujours été mon enfer. Là, en ce moment-même, c'est hyper-chaud.

Souvent c'est parce qu'on n'a pas appris à s'aimer, et on peut tous les jours commencer.
C'est dur de se remettre en cause, même si on en a l'intention.
Car ce qu'on ignore de soi étant par essence inconscient, quand ça nous saute à la gueule, et bien même si on s'y est préparé, et bien ça fait toujours aussi mal, et faut aussi admettre ça.
Et puis quand on est un homme particulièrement, on est peu éduqué à accepter ses faiblesses et à être vulnérable, et souvent la maladie nous l'apprend malgré nous si on résiste à ça.

ne t'inflige pas une double peine, c'est déjà pas facile de gérer une maladie, si en plus tu y surajoutes un stress cela va être encore plus difficile.

En regardant quelques extraits de cette video, je suis tombé sur un passage intéressant à 33.10 ! On sait que le moral est important pour mener une vie joyeuse et intéressante. C'est quelque chose qui contrairement a ce que l'on pourrait penser se cultive.

Gassho
Komyo

https://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=dmwPSt2JDAA#!

C'est dur pour tout le monde je pense, il faut se dire que c'est ainsi, ce mettre en position de bouddha et prier très fort...
A force on oublie on s'y fait...
Je vis aussi avec la maladie, psychologique, donc c'est encore moins facile.
Je n'ai eu sur ma route que des faux amis, des gens qui m'ont trahis, toute l'attention que je leur portais n'étais qu'un jeu pour eux...
je me sens froide, distante avec la vie, comme si je m'étais enfermé dans une bulle et plus on essaye de m'en sortir, moins on y arrive, dans un sens comme dans l'autre.
Pourtant la vie peut être si belle, qu'il faut en profiter même malade!
Moi j'ai décidé de sortir un peu plus, de faire des rencontres, allez dans des dojos, voyager peut-être pas trop vu que l'argent ne coule pas à flot, mais au moins essayer, peut-être qu'une opportunité se présentera...
Il faut toujours garder espoir...

Bonsoir,

En tout cas bravo pour l'avatar. Il est tellement esthétique qu'on arriverait à souhaiter qu'il ne change plus...