Je viens de retrouver un texte de Nishijima roshi, traduit par Brad Warner.
Je vous le fais passer.
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Le chien de maître Joshu
par Gudo Wafu Nishijima (traduit du Japonais par Brad Warner)
"On m'a demandé de fournir une contribution pour une collection d'articles sur le fameux kôan zen "Mu" ou "Non". Une des idées fondamentales du Bouddhisme (Mahayana) est que tout possède la Nature-de-Bouddha. Mais dans cette histoire, un maître zen célèbre semble nier cette idée. Afin de pouvoir ajouter mes propres commentaires à cette histoire, j'ai décidé de traduire ceux de mon maître (Nishijima roshi).Le kôan "Mu" est célèbre comme étant le kôan de départ traditionnel dans le cursus de l'école Rinzaï. L'école Sôtô l'enseigne, elle aussi, mais de façon totalement différente. Dans ce court texte, Nishijima explique la différence d'approcher fondamentale. Ceci est la première partie d'un très court livre que Nishijima avait publié en 2004, en commentant douze des kôans de la collection Rinzaï appelée Mumonkan, ou "Portail sans porte". Allez, Nishijima sensei..."
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Un jour, un moine demanda à maître Joshu: "Un chien a-t-il la Nature-de-Bouddha ou pas?" Maître Joshu répondit: "Non."
Dans le chapitre du Shôbôgenzô intitulé Bussho ou “Nature-de-Bouddha,” maître Dôgen parle du sens de ce "Non" dans son rapport avec une conversation entre le cinquième et le sixième patriarches. Il y dit: “Ce ‘non’ n'est pas le ‘non’ de ‘avoir’ ou de ‘ne pas avoir.’ C'est le non de non non.”
Le non de non non est une façon de s'exprimer qu'on n'entend guère. Cela signifie que même non est nié.
Autrement dit, ce n'est pas la sorte de non que l'on conçoit dans son cerveau en réponse à la question de savoir si quelque chose existe ou non. Le sens de non, ainsi qu'il est ici utilisé, ne requiert aucune sorte de réflexion.
Dans le cas de ce kôan, on ne manque nullement d'explications à l'effet que ce "non" représente le non de non, autrement dit, le non absolu, ou qu'il représente la vacuité absolue, ou qu'il est quelque chose qu'on ne peut absolument pas comprendre, ou autre sottises du même genre que même ceux qui les bredouillent ne semblent même pas comprendre.
Mais en salissant la vérité du Bouddha avec ces sottises, ceux qui fournissent ce type d'explications ne font que trébucher dans l'obscurité, sans savoir ce qui est quoi et en goûtant les misères de l'Enfer.
Dans le chapitre du Shôbôgenzô intitulé "Soutra des montagnes et des rivières", maître Dôgen dit que tout kôan possède un sens théorique splendide. Le but des kôans est d'éclaircir des points difficiles de la philosophie bouddhique en utilisant un exemple concret. La tendance chez de nombreux moines chinois à considérer les kôans comme une sorte d'énigme dont le sens originel serait impénétrable faisait beaucoup rire maître Dôgen.
Un chien qui existe devant vos yeux est très certainement un chien. Il n'y a rien d'extra ajouté à ce chien. Et il n'y manque rien non plus, rien qui serait séparé de lui et dont il aurait besoin afin d'être ce qu'il est: un chien. Un chien est un chien. Joshu comprenait que d'échafauder des théories sur la question de savoir si un chien a ou non la Nature-de-Bouddha n'est rien d'autre que d'ajouter un extra. Lorsqu'on traite n'importe quel kôan, il est nécessaire de le lire de cette façon à partir de la philosophie bouddhique.
Je suis un vieux moine de plus de 70 ans qui a passé les dernières cinquante années à étudier le Shôbôgenzô de maître Dôgen. Je suis donc un amateur, lorsqu'il s'agit des kôans inclus dans le Mumonkan et j'ai quelques préventions. Mais, à partir de la philosophie bouddhique que j'ai absorbée tout au long de mes années d'étude du Shôbôgenzô, il n'y a en moi pas l'ombre d'un doute sur le sens de ce kôan. C'est donc avec ce sens en tête que je voudrais poursuivre l'étude de quelques uns des autres kôans de la collection.
Je vous le fais passer.
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Le chien de maître Joshu
par Gudo Wafu Nishijima (traduit du Japonais par Brad Warner)
"On m'a demandé de fournir une contribution pour une collection d'articles sur le fameux kôan zen "Mu" ou "Non". Une des idées fondamentales du Bouddhisme (Mahayana) est que tout possède la Nature-de-Bouddha. Mais dans cette histoire, un maître zen célèbre semble nier cette idée. Afin de pouvoir ajouter mes propres commentaires à cette histoire, j'ai décidé de traduire ceux de mon maître (Nishijima roshi).Le kôan "Mu" est célèbre comme étant le kôan de départ traditionnel dans le cursus de l'école Rinzaï. L'école Sôtô l'enseigne, elle aussi, mais de façon totalement différente. Dans ce court texte, Nishijima explique la différence d'approcher fondamentale. Ceci est la première partie d'un très court livre que Nishijima avait publié en 2004, en commentant douze des kôans de la collection Rinzaï appelée Mumonkan, ou "Portail sans porte". Allez, Nishijima sensei..."
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Un jour, un moine demanda à maître Joshu: "Un chien a-t-il la Nature-de-Bouddha ou pas?" Maître Joshu répondit: "Non."
Dans le chapitre du Shôbôgenzô intitulé Bussho ou “Nature-de-Bouddha,” maître Dôgen parle du sens de ce "Non" dans son rapport avec une conversation entre le cinquième et le sixième patriarches. Il y dit: “Ce ‘non’ n'est pas le ‘non’ de ‘avoir’ ou de ‘ne pas avoir.’ C'est le non de non non.”
Le non de non non est une façon de s'exprimer qu'on n'entend guère. Cela signifie que même non est nié.
Autrement dit, ce n'est pas la sorte de non que l'on conçoit dans son cerveau en réponse à la question de savoir si quelque chose existe ou non. Le sens de non, ainsi qu'il est ici utilisé, ne requiert aucune sorte de réflexion.
Dans le cas de ce kôan, on ne manque nullement d'explications à l'effet que ce "non" représente le non de non, autrement dit, le non absolu, ou qu'il représente la vacuité absolue, ou qu'il est quelque chose qu'on ne peut absolument pas comprendre, ou autre sottises du même genre que même ceux qui les bredouillent ne semblent même pas comprendre.
Mais en salissant la vérité du Bouddha avec ces sottises, ceux qui fournissent ce type d'explications ne font que trébucher dans l'obscurité, sans savoir ce qui est quoi et en goûtant les misères de l'Enfer.
Dans le chapitre du Shôbôgenzô intitulé "Soutra des montagnes et des rivières", maître Dôgen dit que tout kôan possède un sens théorique splendide. Le but des kôans est d'éclaircir des points difficiles de la philosophie bouddhique en utilisant un exemple concret. La tendance chez de nombreux moines chinois à considérer les kôans comme une sorte d'énigme dont le sens originel serait impénétrable faisait beaucoup rire maître Dôgen.
Un chien qui existe devant vos yeux est très certainement un chien. Il n'y a rien d'extra ajouté à ce chien. Et il n'y manque rien non plus, rien qui serait séparé de lui et dont il aurait besoin afin d'être ce qu'il est: un chien. Un chien est un chien. Joshu comprenait que d'échafauder des théories sur la question de savoir si un chien a ou non la Nature-de-Bouddha n'est rien d'autre que d'ajouter un extra. Lorsqu'on traite n'importe quel kôan, il est nécessaire de le lire de cette façon à partir de la philosophie bouddhique.
Je suis un vieux moine de plus de 70 ans qui a passé les dernières cinquante années à étudier le Shôbôgenzô de maître Dôgen. Je suis donc un amateur, lorsqu'il s'agit des kôans inclus dans le Mumonkan et j'ai quelques préventions. Mais, à partir de la philosophie bouddhique que j'ai absorbée tout au long de mes années d'étude du Shôbôgenzô, il n'y a en moi pas l'ombre d'un doute sur le sens de ce kôan. C'est donc avec ce sens en tête que je voudrais poursuivre l'étude de quelques uns des autres kôans de la collection.