Ah ah, elle est bien bonne celle là!
Le tyran, a envie de tout, sauf de disparaître! La seule chose qui l'intéresse, c'est qu'on le regarde, qu'on l'adule, qu'on ait besoin de lui, son éveil, et son enseignement, et s'il ne disparaît, c'est pour faire les comptes ou glander dans sa piaule pendant que tout le monde bosse pour lui!
Mais ça convient à certains qui sont conditionnés au patriarcat, à qui le père a manqué, qui connaissent la relation dominant-dominé comme fonctionnement de base.
Quant à ce que Fred me répondait plus haut, juste pour rappel, nous (moi et ma compagne), avons commencé notre pratique personnelle hors groupe certifié, parce qu'on a été virés d'un groupe certifié.
Donc nous n'avons pas de papelard, pas de légitimité extérieure, autre que notre propre expérience.
Mais ce n'est qu'hors de ce système qu'est l'AZI, qu'on voit que le discours stéréotypé est celui-ci : sans maître point de salut, on ne peut pratiquer seul sans se tromper, l'on doit être autorisé pour enseigner, être dans une lignée...Et tout le reste.
Or, quand on observe de près, la question de la lignée est surtout une lignée de discours : la validité d'une transmission dépend souvent de l'argent versé pour le shiho (qui est mythifié en occident, là où au Japon tous les moines l'ont)...et après, les lignées sont souvent plus que bricolées, fabriquées.....et la validité d'un enseignement, comment l'objectiver? Le premier qui peut me rendre cette réalité saisissable et formulable, il aura mon pied au cul, ça le réveillera quand il s'assiera dessus! Ce truc n'est pas saisissable par un bout de papier...ceux qui ont des bouts de papiers, on en connaît, et certains sont spirituellement des billes, mais ils savent par contre se concentrer sur la qualité du papier d'emballage!...pour moi ce n'est pas de la pratique siprituelle.
Après, je peux comprendre la nécessité de se sentir enseigné pour transmettre une pratique valide...mais si l'on regarde bien, tous les grands enseignants, ont été des gens qui avant que d'apprendre de quelqu'un d'autre, se posaient la question de leur chemin, de quoi pratiquer, quoi apprendre....ils ont toujours mis en cause enseignement, contenu comme contenant, et c'est ce questionnement resté ouvert, et non fermé sur des convictions ou du prèt à penser, qui a fait d'eux des maîtres, par capacité à ne pas reposer sur de l'acquis. Après, un maître certifie cela, ou pas....mais on fait soi-même le chemin.
Je lisais Maud Séjournant, une tenante des voies chamaniques amérindiennes...un jour, un couple d'amérindiens la bouscula dans une conférence. En fait ils ne supportaient pas qu'une occidentale, parle au nom d'une culture qui pour est étaient la leur avant que d'être universelle.....et pour toute réponse, elle se surprit à assumer son expérience, et à leur répondre, à leur question, qu'elle parlait à partir de sa propre autorité.
Dans le zen, apprend-on à parler à partir de soi-même, ou d'une resucée des paroles des autres?
Suffit de lire ce que Deshimaru disait du kusen, et de voir ce que beaucoup en ont fait (à savoir une lecture insipide d'un texte sans grande vie), pour voir qu'il voulait faire des enseignants qui ne faisaient pas de copier coller....lui avait bien moins peur que ses disciples, de toute évidence!
Un copain me racontait qu'un disciples ancien, qui a un lieu de pratique chez lui, dans un superbe cadre naturel qu'il a aménagé pendant des années, voulait faire des sesshins chez lui, tranquille....quand les grands patrons en ont eu vent, ils ont plombé son truc!...Faut pas enseigner quand on n'a pas été autorisé, même si on pratique depuis plus de trente ans! C'est minable!
Perso, le responsable qui m'a formé, m'a balancé dans cette situation très vite...il avait confiance, et il était là aussi pour nous montrer comment faire, sans faire à notre place.
Aujourd'hui, en lieu et place, on pond des règles et du cadre, en espérant que ça va résoudre le problème!...mais ça ne fait que le déplacer et rajouter des complications là où on n'en a pas besoin.
Donc oui Fred, quand on fait ça, on s'expose, un maximum...et ça interroge notre foi, notre motivation : pourquoi on fait ce truc? Pourquoi on veut le faire avec d'autres?
Parfois on ne sait pas, mais voilà, ce que je vois, c'est que parfois, c'est les autres qui vont nous enseigner, et que si on veut vraiment enseigner, faut accepter qu'ils soient aussi éveillés que nous.
Pour moi c'est évident : on ne fait rien, on ne transmet rien qui ne soit déjà là, on n'est que des révélateurs, on ne fait que se mettre au service de quelque chose de plus vaste que nous, et créer les conditions favorables à la prise de contact avec cela.
Mais même zazen, faut pas en faire un dogme : si quelqu'un n'y arrive pas, pas grave. Si quelqu'un n'arrive pas à ne pas bouger, pas grave. Si quelqu'un veut prendre une chaise, pas grave. Nous on a quelqu'un qui ne peut pas s'empècher de caresser le chien (qui pratique avec nous) parce qu'en fait elle est très angoissée par la confrontation à elle-même dans le silence nu, pas grave. On n'a pas de kyosaku, on ne fait plus de cérémonie, pas grave.
Par contre, juste on dédicace la pratique à tout ce qui est vivant, car nous ne sommes pas seuls, et on se prosterne...on a juste gardé cela comme forme minimale de dédicace...pour dire que zazen, ce n'est pas que pour soi tout seul. Soi tout seul n'a pas de sens, de toutes façons.
Pour ma part, je ne suis pas sûr qu'il y ait nécessité de définir un zen dévotionnel : il me semble que zazen est par lui-même un acte de dévotion, et qu'il suffit simplement de le rappeler....après, on a peut-être et sûrement des formes de cérémonies à faire évoluer....faire un petit truc pour les morts, pour ceux qui souffent, des dédicaces spécifiques, des intentions spécifiques.
Mais je pense que ça peut être très très simple : une petite formule, une offrande d'encens sur l'autel.
et rappeler que le Bouddha sur l'autel, n'est pas différent de nous assis.
et même si l'on n'est pas assis.
Puis pour la posture, juste ne pas oublier que nous connaissons cette expérience dans notre corps esprit, et qu'à partir de là on peut comprendre l'autre, et que cela est réciproque....puisque quelque part, nous sommes à la fois différents et non séparés.
Sinon, c'est vrai qu'on est deux, et ça ça nous porte....je pense que si on est seul, faut chercher des gens qui sont dans la même recherche, qui ont la même envie, et même poser des flyers à droite à gauche en invitant qui veut à se retrouver pour la pratique de la méditation...on n'est même pas obligé d'appeler ça du zen...mais en quoi cela sera-t-il vraiment différent? Ce ne sont que des mots.
Se créer un réseau, ne pas rester seul, et partager ça ensemble de façon très simple, mais présente.
En fait, la pratique n'est pas décentralisée : elle est centrée, et ce centre, ce peut être toi, moi, n'importe qui, et en même temps tout l'univers est ce centre...comment cela pourrait-il appartenir exclusivement à une personne, une association????
La réalisation spirituelle n'est pas affaire de propriété ou de certificat.
Ikkyu et Ryokan n'ont certifié aucun successeur...pourtant leur impact spirituel a été bien plus profond que celui de bien des maîtres ayant été certifié et ayant certifié.
Alors, qui a donc raison?
A la fin, il y a un truc mystérieux qu'on ne comprend pas, mais qui passe là, dans tout cela....Et cela, je ne peux en dire plus.......