Je viens de lire un article qui me paraît important, sur Kôdô Sawaki et son meilleur ami, Katô Kôzan, par un Américain du nom d'Arthur Braveman.
Je vais vous le traduire.
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Nos corps sont la grande vie universelle
Posted on 30 April 2014 by Buddhism Now
"No, Sawaki n'était pas mon ami. J'étais un pauvre et lui était un tycoon. Il a eu pitié de moi."
C'est là ce que disait Katô Kôzan dans une interview alors qu'il avait 95 ans. Kôzan et Sawaki étaient de vieux amis et des frères de Dharma. Leurs pratiques étaient pourtant très différentes, et ils ne se lassaient jamais de se chamailler sur leurs différences. Le respect mutuel qu'ils avaient l'un pour l'autre était en fait renforcé par ces différences.
Photo de Katô Kôzan et de Sawaki Kôdô prenant le thé avec d'autres frères de Dharma, merci à Arthur Braverman
Il y a deux écoles principales de Zen au Japon, Rinzaï et Sôtô, chacune ayant leur approche très distincte de la pratique. Dans le Zen Rinzaï, les étudiants méditent généralement sur des kôans, histoires paradoxales qui cherchent à indiquer la vérité ultime, traditionnellement reprises de rencontres entre maîtres zen et leurs étudiants. Dans le Zen Sôtô, les étudiants s'asseoient en médittation dans ce que son fondateur, Dôgen, appelait shikantaza. On définit généralement shikantaza comme "juste s'asseoir" et l'énergie de l'étudiant est normalement concentrée sur la conscience d'être là tel qu'on est.
Sawaki Kôdô était clairement partisan du shikantaza de maître Dôgen et, lorsqu'il pouvait taquiner son ami sur ce qu'il appelait le "Zen d'escabeau" de Kôzan, sa façon de parler du Zen à kôans, il sautait sur l'occasion.
En disant de Sawaki qu'il était un Tycoon (Tycoon est un mot anglais dérivé du mot japonais taikun [大君]qui veut dire grand seigneur. Intéressante épithète pour un homme qui a passé sa vie à errer de par le pays en vivant sur le strict minimum) et un érudit, Kôzan l'appelait des deux mots les plus infamants qu'il pouvait imaginer.
Aussi pauvre qu'il avait pu être toute sa vie, Sawaki avait quand même pu sauver son ami de la pauvreté abjecte lorsque Kôzan était venu à Tôkyô. Il était arrivé là avec femme et enfant, sans un yen en poche, pour reprendre ce qui s'était révélé être un temple abandonné et en ruines. Il suffit à Sawaki de jeter un oeil au temple de Kôzan pour se rendre compte que son ami était dans la merde. Kôzan avait vécu difficilement dans un petit temple de Kurume, au Kyûshû, près du monastère où il avait complété sa formation. Lorsqu'un ami l'avait invité à prendre en charge le temple de Tôkyô, il avait imaginé une situation bien différente .
"De combien as-tu besoin par mois, pour survivre ici avec ta famille?" lui demanda Sawaki.
"Je puis y arriver avec quinze yen," répondit Kôzan.
Sawaki l'emmena alors chez quinze de ses disciples. A chacun il expliqua: "Voici mon frère aîné dans le Dharma (ani deshi). Permetetz qu'il vienne à chaque mois chez vous pour lire des sûtras à ma place et donnez-lui un yen."
Et c'est ainsi que Kôzan a pu survivre aux années de guerre à Tôkyô dans un temple qui tenait à peine debout.
(à suivre)
Je vais vous le traduire.
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Nos corps sont la grande vie universelle
Posted on 30 April 2014 by Buddhism Now
"No, Sawaki n'était pas mon ami. J'étais un pauvre et lui était un tycoon. Il a eu pitié de moi."
C'est là ce que disait Katô Kôzan dans une interview alors qu'il avait 95 ans. Kôzan et Sawaki étaient de vieux amis et des frères de Dharma. Leurs pratiques étaient pourtant très différentes, et ils ne se lassaient jamais de se chamailler sur leurs différences. Le respect mutuel qu'ils avaient l'un pour l'autre était en fait renforcé par ces différences.
Photo de Katô Kôzan et de Sawaki Kôdô prenant le thé avec d'autres frères de Dharma, merci à Arthur Braverman
Il y a deux écoles principales de Zen au Japon, Rinzaï et Sôtô, chacune ayant leur approche très distincte de la pratique. Dans le Zen Rinzaï, les étudiants méditent généralement sur des kôans, histoires paradoxales qui cherchent à indiquer la vérité ultime, traditionnellement reprises de rencontres entre maîtres zen et leurs étudiants. Dans le Zen Sôtô, les étudiants s'asseoient en médittation dans ce que son fondateur, Dôgen, appelait shikantaza. On définit généralement shikantaza comme "juste s'asseoir" et l'énergie de l'étudiant est normalement concentrée sur la conscience d'être là tel qu'on est.
Sawaki Kôdô était clairement partisan du shikantaza de maître Dôgen et, lorsqu'il pouvait taquiner son ami sur ce qu'il appelait le "Zen d'escabeau" de Kôzan, sa façon de parler du Zen à kôans, il sautait sur l'occasion.
En disant de Sawaki qu'il était un Tycoon (Tycoon est un mot anglais dérivé du mot japonais taikun [大君]qui veut dire grand seigneur. Intéressante épithète pour un homme qui a passé sa vie à errer de par le pays en vivant sur le strict minimum) et un érudit, Kôzan l'appelait des deux mots les plus infamants qu'il pouvait imaginer.
Aussi pauvre qu'il avait pu être toute sa vie, Sawaki avait quand même pu sauver son ami de la pauvreté abjecte lorsque Kôzan était venu à Tôkyô. Il était arrivé là avec femme et enfant, sans un yen en poche, pour reprendre ce qui s'était révélé être un temple abandonné et en ruines. Il suffit à Sawaki de jeter un oeil au temple de Kôzan pour se rendre compte que son ami était dans la merde. Kôzan avait vécu difficilement dans un petit temple de Kurume, au Kyûshû, près du monastère où il avait complété sa formation. Lorsqu'un ami l'avait invité à prendre en charge le temple de Tôkyô, il avait imaginé une situation bien différente .
"De combien as-tu besoin par mois, pour survivre ici avec ta famille?" lui demanda Sawaki.
"Je puis y arriver avec quinze yen," répondit Kôzan.
Sawaki l'emmena alors chez quinze de ses disciples. A chacun il expliqua: "Voici mon frère aîné dans le Dharma (ani deshi). Permetetz qu'il vienne à chaque mois chez vous pour lire des sûtras à ma place et donnez-lui un yen."
Et c'est ainsi que Kôzan a pu survivre aux années de guerre à Tôkyô dans un temple qui tenait à peine debout.
(à suivre)
Dernière édition par Yudo, maître zen le Dim 6 Juil 2014 - 19:27, édité 2 fois