Pourquoi les bouddhistes français sont autant "déistes" ?

Lorsque je lis les différents mails sur beaucoup de sites de la sphère bouddhiste je suis souvent étonné de cet a priori, pour les intervenants, concernant l'existence d'un dieu créateur, et de toute la mystique s'y référant.
Pour la "théorie" du dieu unique créateur je crois que l'on n'a jamais fait aussi bien que le christianisme instaurant ce dieu omnipotent d'amour pour le summum de sa création : l'homme.
Le Bouddha n'est pas sur ce registre. Le zen, me semble t'il, l'est encore moins. Je pense que rechercher dans le bouddhisme une substitution à Jésus, car pour différentes raisons le message du christianisme nous laisse un peu frustré, peut conduire à des formes de croyances empruntes d'occultisme, voire de sectarisme.
Pour moi le bouddhisme, et plus particulièrement le zen, n'est pas un "ersatz" du christianisme, bien que le message initial de Jésus, tel que retranscrit dans les 4 évangiles, n'en est pas très loin, hormis le "père créateur".
Merci de vos ressentis.
塚

Bonjour,

C'est très intéressant ce que tu dis. Je pense en effet que le Bouddhisme Tibétain est très proche du christianisme moderne.
Ce sont des approches dualistes qui opposent la matière à l'esprit.
Le Bouddhisme Zen, est a mon sens fidèle à la doctrine du Bouddha historique dans le sens où elle introduit l'être à la non-dualité, l'au delà des concepts.
On y retrouve une notion de mystère, comme dans le christianisme.
mais pour d'autre raison, tout simplement parceque la réalité ultime, vide, est insaisissable.

Fa

je pense que les gens ivres de modernité que nous sommes devenus ont finalement besoin d'un échappatoire métaphysique pour croire que ce qu'ils font est juste. Ils n'admettent pas l'insubstancialité et l'impermanence du monde, alors la vacuité est synonyme de nihilisme pour eux, et ils s'y perdent.

Le monde de ces gens est un monde totalement conceptualisé, la non-dualité est inconcevable, alors ils se réfugient dans autre chose, dans "un concept-maison, un dieu comme dans le christianisme, mais un peu différent sinon j'ai pas l'droit dire que chui bouddhiste et ca l'fait grave d'être bouddhiste."

Un peu caricaturé mais bon, voilà une réponse à la question.

Le monde de ces gens est un monde totalement conceptualisé, la
non-dualité est inconcevable, alors ils se réfugient dans autre chose,
dans "un concept-maison, un dieu comme dans le christianisme, mais un
peu différent sinon j'ai pas l'droit dire que chui bouddhiste et ca
l'fait grave d'être bouddhiste."

Cela me semble très juste, et c'est ce que je reproche au Bouddhisme Tibétain...qui a trouvé une échappatoire.
La non-dualité s'est muée en fantômes, tulkouïsés...

Bonjour,

Voici une histoire zen qui illustre très bien le sujet :

En cet hiver très froid un moine zen trouva refuge dans un temple semblant complètement abandonné. Pour se
rechauffer il fit un feu, puis déplia sa couverture et s'endormit devant.

Tôt le matin le bois vint à manquer et le moine se réveilla transi de foid. Regardant autour de lui il ne vit qu'une statue de Bouddha en bois, il la jeta dans les braises pour raviver le feu.



Le gardien du temple, passant par là, constata la disparition de la satue et entra dans une violente colère. :

• « Je vais vous faire arrêter pour
  sacrilège !!!!! » cria-t-il au moine.
  

Celui-ci ne répondit pas et se mit à fouiller dans les cendres.

• « Que faites vous ? » demanda le gardien
  

• « Je met de côté les reliques sacrées du Bouddha »
  

• «Comment pouvez-vous mettre de côté des
  reliques sacrées d'un Bouddha de bois ? Vous êtes
  complètement stupide ! »
  

• « Si les reliques ne sont pas
  sacrées, alors le Bouddha non plus ne l'est pas ! » Répondit le moine.
  

Joignant la pensée et l'action, il prit une deuxième statue de Bouddha en bois et la jeta dans le feu.

Excellente histoire qui illustre très bien, me semble til, le zen par son retour à l'essentiel.
Cette histoire devrait heurter d'autres écoles bouddhistes de part son côté iconoclaste. Bien sûr il ne s'agit pas de "brûler" le Tathagata,le 如来 (nyorai) mais de ne pas déifier ses représentations (le gasshô en entrant pour zazen n'est pas une "courbette" devant la statue du Bouddha mais un acte de respect vis à vis de la communauté devant les Boddhisatva potentiels que nous sommes).

On est bien d'accord qu'il y a des excès mais si vous condamnez la foi systématiquement, les gens ne s'égareront plus sur la voie car ils ne pourront même plus y rentrer.

Cette histoire me dit aussi autre chose.

N'avons nous pas chacun un feu quelque part qui doit être alimenté et que notre trop grande surdité aux rappels qui nous sont envoyés pour aller chercher du bois et lui offrir nous fait oublier?

Cette surdité, à quoi est-elle due.

Quel feu le moine a t'il alimenté en y jetant le premier Bouddha, et ensuite quel feu a t'il nourri en y jetant le deuxième?

Peut-être cela relève-t-il d'une soif indicible du sacré, et en même temps d'un distance vis-à-vis du sacré. On ne peut mettre de la distance vis-à-vis d'une chose, que si cette chose est, existe. L'harmonie des contraires peut-être.

Et que c'est reposant d'avoir un dieu / père ! Même des fois ça déresponsabilise : que ne fait on au nom d'un dieu (et malheureusement pas uniquement de l'amour!)
Mais on peut rêver : un jour les différents clergés monothéistes seront peut être tous contre la peine de mort, les châtiments corporels, l'égalité des humains : courage, certains n'en sont pas loin !

Ces clergés reflètent souvent leurs sociétés. Quand la prospérité, la paix, et surtout l'équité règneront partout, alors, on pourra voir les divers clergés monothéistes opposés à la peine de mort, etc. etc.

J'ai dit "quand la prospérité (...) régneront...", il serait plus juste de dire "si la prospérité (...) régnait, ou finirait par régner...".