A savoir interpellant sur la capacité à accepter une autre façon de faire, de fonctionner.
Pour ma part, tout peut exister, car tout existe. La bienveillance existe, le crime existe. Tout fonctionnement peut exister. Ce dont je parle existe, je n'ai pas à discuter que cela soit ou pas, car c'est.
Par contre, oui, cela me peine, et, oui, je ne suis pas d'accord avec cela.
Qu'un forum soit créé pour parler de bouddhisme, soit. Il y en a plusieurs, ce n'est pas un problème.
Par contre, ce qui me fait tiquer, c'est quand je lis qu'il est créé en se présentant comme l'endroit où on parlera de vrai bouddhisme, en se comparant à d'autres dont le fonctionnement est plus que critiqué (par ex exprimé dans une phrase comme « le forum X est probablement ce qui se fait de pire en la matière »ou quelque chose d'approchant).
Que des extraits d'interventions sur d'autres forums soient publiées avec le nom de leur auteurs, de toute évidence sans qu'ils soient prévenus, et qu'ils soient commentés d'une façon où il semble évident que la personne est visée à travers son écrit, puisque la chance de la confrontation ne lui est pas donnée, voire évitée. Qui est publié hors d'un contexte, parce que parfois extraire du contexte un écrit peut lui donner une signification autre que l'intention de son auteur. Donc oui, ça me pose question sur le but recherché.
La chose pourrait très bien se faire ainsi : dire « j'ai lu ça sur le net » et rendre compte en citant ou résumant le texte concerné, sans nommer son auteur, et dire alors ce qu'on pense de cet argument. Cela ne retirerait en rien la valeur de l'argumentation, et du fait que ce discours serait toujours complètement le reflet de ce que pense qui l'écrit, fut-ce en réaction à la parole d'un autre.
Sinon, il vaut mieux répondre sur le terrain où il est écrit, face au contributeur.
Qualifier en titre les propos de quelqu'un d'élucubrations, présente publiquement déjà une image biaisée et péjorative des propos dont il est question, et on ne va pas me faire croire qu'afficher publiquement « les élucubrations de X » n'est pas péjoratif pour la personne aussi. Concernant cette intervention, d'ailleurs, je n'ai rien à dire au sujet du contenu et se son argumentation, dont la logique se tient. Mais la façon dont c'est présenté, la forme, la façon de présenter la chose, me heurte et ne me paraît pas juste pour la personne mise en cause.
Faire quelque chose de différent, soit. Mais alors pas en y disant que le forum X ou Y c'est vraiment déplorable, pas en en extrayant le contenu pour le sabrer, et aussi ceux qui on écrit ce contenu, pas en critiquant la modération qui se passe ailleurs, alors que ce site qui se présente comme un forum, ne pratique pas de modération. Pour seule modération, l'admin interdit d'accès ceux dont il ne veut pas sur des critères subjectifs. Ce qui veut dire que ce n'est pas un forum, un forum étant par définition un espace public.
Cette différence revendiquée de pouvoir critiquer les autres en choisissant qui peut ou pas répondre, je ne peux penser qu'elle est juste.
Que l'on crée un forum parce qu'on est insatisfait du fonctionnement d'autres forums, et qu'on revendique d'y parler bouddhisme comme objet de discours, pour moi c'est ok. Complètement.
Le bouddhisme en est l'objet, et l'insatisfaction n'a pas lieu de s'y afficher, puisque on a maintenant ce qu'on voulait, un outil fonctionnel et propre.
Alors y faire paraître la critique des autres a-t-il vraiment un sens? Ou l'expression de ce ressentiment est-il l'objet non-dit de la création de ce forum?
Ca parle de bouddhisme ou de prouver sa supériorité sur les autres au nom du bouddhisme?
Quand je lis « maintien de la tradition », je suis perplexe sur cette façon de présenter le bouddhisme.
Car pour moi, le Bouddha a fait tout, sauf maintenir des traditions. Il a eu l'intelligence de ne jamais les nier, mais partant d'elles, il ne s'y est pas réduit. Il a digéré les enseignements de ses maîtres pour les utiliser, sans les rejeter, mais assumant ses propres déductions. Se risquant à penser autrement, plus large. A penser d'une façon inconnue. A ne maintenir aucune tradition, sans les rejeter.
J'ai pu lire parfois que le bouddhisme c'est revenir à l'expérience de Shakyamuni. Mais qu'est-ce que c'est, l'expérience de Shakyamuni??
C'est bien de le dire, mais ça n'explique pas ce que c'est. Alors quand j'ai un doute ainsi, je potasse les vieux sutras.
Alors, hier, voulant me rappeler ce que c'est, et m'instruire pour que Blutack voie que quand même je ne cherche pas à stagner dans mon ignorance profonde, j'ai ouvert « les entretiens du Bouddha ». Et lu le Kutadanta sutra. Ca raconte l'histoire d'un brahmane qui veut faire un sacrifice, et à l'époque ça voulait dire tuer plein d'animaux et gaspiller plein de richesses. Le Bouddha lui répond dans le cadre de son rite, il ne lui cause pas de trucs très compliqués. Il valorise les qualités des brahmanes et des chefs de famille...pour qu'à la fin ils voient comme un sacrifice le fait de ne pas tuer d'animaux, mais de partager les richesses, ils élargit leur vision sans leur demander de renoncer à leur rite, mais en utilise la forme pour montrer qu'ils peuvent avec ça faire autrement, et que tous y gagnent. Le brahmane lui demande si il y a mieux comme sacrifice. Bouddha lui dit que faire des dons aux renonçants est mieux. Et mieux? Leur donner l'asile. Et mieux encore?? Prendre refuge dans les trois trésors. Et mieux que ça? Respecter les préceptes. Et mieux encore?? Entrer dans les Jhanas, autrement dire s'asseoir en méditation et revenir à soi-même. Zazen. Après il n'y a pas mieux! Sacré Bouddha, un vrai malin pour nous emmener à la pratique!
Cependant, dans ce sutra, un passage m'a frappé. C'est le brahmane qui parle du Bouddha. Ses copains lui disent que s'il va le voir, on va penser qu'il s'infériorise. Or lui, a entendu du bien du Bouddha, et pense que ça vaut le déplacement. En gros il est prèt à faire fi des considérations d'image pour aller demander conseil au Bouddha. Belle preuve d'humilité et d'ouverture!
Donc il dit à un moment : « ...Vraiment, ô honorables amis, le Samana Gotama est pourvu des trente deux marques des grands hommes. Vraiment, ô honorables ami, le Samana Gotama accueille tous ceux qui viennent le voir, en disant « venez, vous êtes les bienvenus », il est sympathique, conciliant, il n'est pas dédaigneux, il parle souvent et il parle d'abord »... (je suppose que ce dernier point signifiait qu'il n'attendait pas que son interlocuteur vienne vers lui, mais que lui faisait le geste de l'accueillir sans attendre de marques de déférence).
Ce passage semble anecdotique dans l'ensemble, mais il témoigne d'une attitude, et c'est ce Shakyamuni-là que je vois aussi. Je ne le vois pas critiquer les gens en leur absence, je ne le vois pas se prendre le chou sur ce qu'est ou pas le satori, par contre il répond en parlant le langage que comprend son interlocuteur, se mettant à portée de sa compréhension, et ne le dévalorisant pas s'il ne comprend pas. Il ne convainc pas les gens par la force, mais il ne renonce pas à ce qu'il pense juste. Il ne se bat pas pour l'éveil, il en témoigne tranquillement. Il a confiance en son expérience, ne rejette rien de ce qui lui est différent, et explique, dialogue.
Et c'est ce bouddhisme-là auquel je crois, encore parler de bouddhisme est-il probablement une étiquette trop encombrante pour ce truc universel de l'être humain et du vivant dont il veut parler. Une identité trop limitée.
C'est pour ça que je n'aime pas parler de bouddhisme, de ce qui est le vrai éveil, le vrai satori. Je peux pointer la lune. On peut tous pointer la lune. Mais la lune, je ne peux la regarder à la place d'un autre.
Je peux comprendre que certains pensent que ce que je dis est faux, idéaliste, erroné. Soit. Mais je pense cependant que c'est la voie juste, et elle ne s'accorde pas avec sortir les armes, la guerre des mots, à montrer ce que serait le vrai bouddhisme. La vérité, elle se voit quand on ouvre les yeux. La montrer à un aveugle ne sert à rien, sa vérité est de ne rien voir. Mais il voit avec ses mains!
Deshimaru écrivait que le satori est parfois rond, parfois carré. Qui peut enfermer le satori dans une définition? Quels mots peuvent seulement définir une expérience aussi infinie?? Ils ne peuvent qu'en approcher. Je pense qu'on peut parler de ce qui permet d'aller vers l'expérience, comme comment se concentrer, comment vivre son quotidien, comment vivre l'énergie de son corps et esprit, comment s'asseoir sur son coussin, etc....après, c'est intime.
Alors pourquoi devrait-il devenir objet de controverse et de disputes??
Dogen disait lui-même que la Voie du Bouddha était le parfait dharma de paix et de bonheur!
D'ailleurs, il disait dans le Bodaisatta Shishobo, que la parole d'amour était une des quatre pratiques du bodhisattva. Après le don.
« La parole d'amour veut dire, en regardant les êtres, éprouver d'abord de la compassion à leur égard et leur adresser une parole d'attention bienveillante. Il n'y aura jamais de parole violente ni malveillante. Dans le monde profane, il est poli de prendre des nouvelles les uns des autres. Dans la Voie de l'Eveillé, il est bienséant de demander à l'autre de se ménager et de prendre soin de sa santé. La parole d'amour consiste à utiliser le langage avec cette pensée au coeur: « L'Eveillé regarde les êtres comme si le parent couvait son petit enfant .
Respectez ceux qui ont des mérites et ayez pitié de ceux qui sont sans mérites. A partir du moment où vous aimez la parole d'amour, celle-ci se met à croître. Ainsi, même la parole d'amour qui vous restait longtemps inconnue et invisible se présente devant vous yeux. Tant que votre vie et votre corps présent subsisteront, pratiquez volontiers la parole d'amour. Ne reculez pas durant toutes vos vies à venir.
On prend pour principe fondamental la parole d'amour afin de faire rendre les armes aux pires ennemis et d'apporter la réconciliation entre les princes. La parole d'amour entendue face à face rend nos visages joyeux et donne le plaisir à nos coeurs. La parole d'amour entendue par l'intermédiaire de quelqu'un, nous nous la gravons dans l'âme et l'esprit. Sachez-le, la parole d'amour sort du coeur aimant, et le coeur aimant a pour semence le coeur compatissant. Il faut apprendre que la parole d'amour a la force de pouvoir tourner le ciel. Il ne s'agit pas seulement d'admirer le talent de l'autre. »
Voilà donc le bouddhisme que j'aime, auquel je crois. D'ailleurs, en fait, le bouddhisme, ce mot, ça me gène.
C'est marcher dans les pas de ces gens-là, comprendre qui ils furent, comment ils ont vécu, comment ils ont marché dans le monde, et sans les singer, réaliser ce qu'ils ont réalisé.
Peut-être certains trouveront mon point de vue niais, mièvre, idéaliste, autistiquement inadapté à ce monde. Peut-être me trompé-je.
Mais c'est quand même ce que je pense juste, profondément juste, et que le bouddhisme ne cautionne aucune violence, et prône une attitude bienveillante pour tous. Et cette valeur de compassion, je la pense nécessaire dans notre monde, et que sans elle, il n'y a pas d'éveil véritable qui s'exprime.