Lausm a pu dire certaines choses, il n'empèche que si je peux dire qu'il faut se centrer sur la pratique sans s'occuper des institutions, je constate plusieurs choses :
-Quand je fais allusion aux comportements d'exclusion que j'ai pu vivre dans l'institution-qui a choisi que je sois hors de ses murs sans m'en donner d'autre choix- je constate les réactions suivantes : adhésion à la décision de l'institution sans connaitre le pourquoi du comment, déni de ma parole relative au vécu violent de ce que j'ai rencontré comme comportement d'exclusion. Et d'autres choses du genre.
-que ce genre de comportement se reproduit très vite à de multiples niveaux, dans n'importe quel espace de confrontation humaine.
Donc si je dis qu'il vaut mieux ne pas s'occuper de l'institution, parfois pour certains c'est difficilement possible quand ils ont appris une pratique conditionnée par le fait d'appartenir à un groupe, une lignée....tout le monde n'a donc pas accès de façon simple à ce que j'invite à faire, car tout le monde n'a pas développé une aptitude à gèrer une pratique solitaire.
Et le problème est que la structure principale qui gère le zen en France, meme si elle n'est pas la seule, se comporte en instance normative pour tout le monde du zen.
J'ai meme appris par un membre de ce forum, qu'un godo de l'AZI a dit qu'il faudrait qu'elle se dote d'un organe de controle pour voir ce qu'il se passe dans les autres groupes zen, car il s'y passait n'importe quoi. Une police du zen, pourquoi pas. Je pense personnellement qu'il vaudrait mieux qu'elle controle ce qu'il se passe déjà dans ses propres dojos, il y a déjà de quoi faire, j'ai pu le constater.
Concernant les histoires relatives à Deshimaru, je pense qu'il a été un disciple comme d'autres de Sawaki. Sawaki a marqué le monde du zen japonais très très fort. Après, comme pour toute histoire, on mythifie. Tokuda racontait qu'à l'université de Komazawa, ils voulaient qu'il intervienne, mais qu'en fait il n'avait pas la qualification requise selon les critères orthodoxes-on pourra dire que c'était le meme problème pour Deshimaru pour enseigner-et alors ils allèrent voir le ministre responsable. Ils lui formulèrent leur requète, et dans un grand sourire, il leur dit "oui, pas de problème...Kodo Sawaki est mon maitre aussi..."donc plein de possibles existent...
Perso je me fous de savoir si les histoires de Deshimaru sont vraies ou pas, ce qui compte pour moi est l'oeuvre accomplie, et je pense que Deshimaru a fait un grand boulot. Je pense qu'il y a eu dans sa génération, des gens énormément plus déconnants que lui qui ont commis des abus que lui n'a pas commis.
Par contre, il a aussi eu de sacrés défauts, par exemple un coté très fanfaron critiquant d'autres pratiques-les tibétains, Desjardins-parce qu'il se sentait de vouloir convaincre ses disciples malgré leurs doutes. Et je pense qu'il n'a pas toujours laissé l'espace pour sentir leur désir à ceux qui étaient autour de lui, et que beaucoup se sont trouvés, jeunes, avec des responsabilités qui leur donnaient de l'importance, mais qui du coup ne leur ont pas forcément laissé de l'espace pour travailler sur leur karma personnel.
Je pense que ça a créé toute une génération de néo maitres, qui en fait sont trop identifiés à leur role de maitre. Là où Deshimaru avait du vécu, lui.
Peut être n'avait-il pas eu un cursus orthodoxe du point de vue du zen soto...mais je pense que c'était là tout l'intérèt du bonhomme. Je pense qu'il a été bien plus créatif que bien d'autres l'auraient été s'ils avaient été plus conventionnels.
Après, peut-etre a-t-il eu moults défaillances et imperfections, mais bon, il a oeuvré en 15 ans, c'est court sur l'échelle d'une vie, s'il avait pu continuer, peut-etre aurait corrigé bien des choses. Mais je pense que le problème, c'est ce que ses propres disciples ont fait de son image.
Comme me disait un ancien pilier du zen français qui a siégé au comité, les anciens se cachent sans cesse derrière le mantra "Sensei aurait fait comme ça"...et font parler un mort pour en fait imposer leurs propres vues, sur lesquelles ils ne sont pas d'accord entre eux. En cela, ce que Yudo a pu dire sur ce point est exact.
Une autre ancienne qui fut responsable avec son mari d'un temple du nord, où venaient résider des moines japonais, me disait qu'ils avaient eu la chance d'avoir le meilleur de Deshimaru...et qu'il exploitait ses disciples parisiens. Je veux bien le croire : il les a fait trimer dans l'urgence, parce qu'il a voulu que ça marche. Ca a marché. Le problème pour moi est que ses successeurs font tourner le truc au meme rythme, là où ils auraient pu ralentir la cadence pour enraciner les choses, approfondir. Arrèter de faire pour entrer dans l'etre. Car ce zen risque de devenir activiste.
En tous cas, le fait est que ce lieu qu'ils tenaient, marchait très bien....et qu'étonnamment, quand on raconte la légende dorée du zen français, personne n'en parle jamais : comme elle me le disait, c'est le zen parisien qui a tiré la couverture à soi en faisant comme si il n'y avait qu'eux...c'est un peu la marque qui reste sur toute la gestion du zen en France. Karma national, quand tu n'est pas pensé, tu nous conditionnes...
Après, qu'on fasse dire à l'histoire tout ce qu'on veut, c'est naturel, on trouvera ça éternellement dans toute tradition se fondant sur des lignées...ce seront toujours des mythes familiaux. Pour ma part, je pense qu'il faut laisser tomber tout ça et fonder sa pratique sur la réalité, et travailler sur sa propre névrose si on veut clarifier la névrose d'une structure.
Que fait résonner en nous l"histoire d'une pratique qui nous interpelle, ou l'histoire de problématiques qui nous interpelle? Quel pan de notre histoire se sent concerné par cela? C'est ça la question à ne pas oublier de se poser.
et éviter de se traquer la maladie chez autrui, on trouvera toujours une paille dans l'oeil du voisin malgré la poutre dans le sien qu'on ne voit pas.
Se regarder soi ne signifie pas poser le déni sur ce qu'on a face à soi. Mais comme me disait ce quelqu'un qui a quitté le zen-mais pas la pratique spirituelle-on ne devient pas ce que l'on observe.
Donc si on contemple les choses en tachant de rester en contact avec notre propre essence, on ne s'identifiera pas autant à ces choses extérieures à nous, et l'on pourra alors les vivre et laisser vivre et mourir sans en souffrir.
On peut entendre, commenter, interpréter, et se tromper ou pas sur toutes les histoires possibles.
Mais la première qu'on peut tenter de comprendre, c'est avant tout l'histoire de notre propre vie.