Zen et nous

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    La noble vérité de dukkha...

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    La noble vérité de dukkha... Empty La noble vérité de dukkha...

    Message par gigi Mer 25 Fév 2015 - 21:34

    Les quatre nobles vérités

    Catta Ariyasaccani

    Ce texte contient la totalité de la doctrine bouddhique synthétisée en quatre principes fondamentaux. Il fut présenté par le bouddha lors de son tout premier sermon. Il sera présenté ultérieurement sous diverses formes, ainsi qu'abondamment développé et commenté dans les différentes sections des textes canoniques.

    1 - Dukkha ~ dukkha ariya sacca ~
    Cette première vérité repose sur une simple constatation froide et implacable : le monde est souffrance* (dukkha). Cette souffrance ressentie par le sujet est la conséquence nécessaire de l'existence individuelle. Dukkha, qui sera utilisé tout au long de ces pages, est bien entendu beaucoup plus qu'une simple souffrance physique ou morale. Dukkha signifie aussi inachevé, imparfait, interrompu, impermanent. Sous cet aspect d'impermanence, dukkha s'applique à toutes les manifestations du monde physique, psychologique et mental. L'impermanence c'est le caractère transitoire de toute chose : une idée advient puis conduit à une autre ou disparaît, un sentiment désagréable fait place à un sentiment agréable et réciproquement, un être naît, grandit, vieillit et meurt, la matière au contact d'autres éléments se combine sous d'autres formes d'organisation dans un vaste processus de transformation, ...

    Ce ne sont pas seulement les choses négatives qui sont dukkha, mais tout ce qui est impermanent, plaisir et déplaisir sont dukkha, jouissance et restriction sont dukkha, appropriation ou renoncement sont dukkha.

    Dukkha a donc trois acceptations : la première est la souffrance en tant que telle, la seconde est l'interruption de conditions ou d'états heureux, la troisième est le conditionnement d'une chose par une autre (conception développée dans la théorie des cinq agrégats). En effet, si la vision des événements au travers de l'analyse suivant les cinq agrégats permet déjà une meilleure compréhension de leur prégnance et des mécanismes à l'oeuvre sur le sujet, c'est parce qu'ils sont des agrégats d'attachement.

    2 - La cause de dukkha est l'attachement ~ dukkha samudaya ariya sacca ~
    Le moteur principal de dukkha c'est la soif de l'existence.
    Le bouddhisme insiste bien sur le fait que la souffrance n'est pas le fruit d'une quelconque fatalité, ni l'expression d'une volonté divine aveugle ou punitive. Il y a dukkha quant il y a manque, quand il y a volonté d'obtenir, quand il y a perte ou interruption de jouissance, quand il y a inobtention de ce qui est voulu.
    La notion d'attachement est importante, car elle montre bien le lien et la dépendance d'une chose sur une autre. Il suffit, pour une raison ou pour une autre, que ce lien ne s'établisse pas, ou qu'il s'interrompe ou que l'une ou l'autre des choses liées disparaisse, pour qu'il y ait dukkha.

    Cet attachement concerne aussi bien le désir des sens, les éléments matériels que les idées, les idéaux, les pensées, les théories ou les croyances.

    3 - Dukkha cesse quand l'attachement cesse ~ dukkha nirodha ariya sacca ~
    Il ne s'agit pas de rompre ou de briser brutalement l'attachement aux choses, il ne s'agit pas non plus de le nier ou de le rejeter, il ne s'agit pas de renoncer ou d'abandonner le monde pour s'enfermer dans une vie pure, mais abstraite. Il s'agit de se mettre à l'abri de la souffrance en identifiant les processus de causalité à l'oeuvre dans toutes nos actions et en particulier ceux qui conduisent à dukkha. La cessation de dukkha ne peut être durablement obtenue que par l'identification et la compréhension rigoureuse des processus de causalité.
    Il s'agit d'un travail de connaissance du monde, mais surtout de connaissance de soi.
    Il ne s'agit pas d'être coupé du monde, mais au contraire de dévoiler le mécanisme de causalité qui fait le monde.

    4 - Il existe une méthode pour la cessation de dukkha ~ dukkha nirodha gâmini patipadâ ariya sacca ~
    La voie du bouddhisme prône la connaissance. Si elle est appelée troisième voie, c'est parce qu'elle se situe entre-deux extrêmes, constitués d'un côté par l'unique jouissance des sens physiques et de l'autre côté par l'auto éradication de toute forme de sensualité par l'observation de pratiques ascétiques et de nombreux interdits.

    La visée du bouddhisme est plus haute que la simple cessation de dukkha, et entend arriver à une libération complète de la souffrance.

    Cette réalisation consiste à ne pas se placer dans une causalité subie. Ayant identifiée la provenance et le but de nos sentiments, actes ou attirances, le sujet agit de manière à contrôler, orienter les effets de son action et de ce fait parvient à éviter la souffrance.

    Cette voie est appelée l'octuple noble sentier.

    Note 1 : Nous traduisons ici dukkha par souffrance, de même qu'à chaque fois que l'objet de l'exposé n'est pas de développer dukkha, mais d'en donner une idée d'un simple mot. L'article sur dukkha montre que "souffrance" n'est pas une traduction complètement satisfaisante pour dukkha.

    La traduction en français du Dhamma Cakkappavattana Sutta est présentée sur ce site.

    http://www.oocities.org/teravada.geo/4noblv.html

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    Message par Yudo, maître zen Mer 25 Fév 2015 - 21:44

    Encore une fois, je m'oppose en force à cette formulation.

    Elle ne correspond pas à ce qui est écrit dans le sutta. Le texte d'origine dit: "Il y a la souffrance". (Dhukkha satya) Ce n'est pas la même chose que de dire "le monde est souffrance". Si, comme cela le dit, "le monde (était) souffrance", cela impliquerait qu'on ne puisse pas en sortir. Or la troisième vérité, nirodha, dit qu'il y a un moyen d'en sortir. DONC le monde N'EST PAS souffrance.

    A certains, cela paraîtra de la tétratrichotomie, mais je suis désolé, les mots peuvent être dangereux si on les utilise sans précautions.
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    Message par Fred Mer 25 Fév 2015 - 22:13

    Non, c'est super important je trouve.
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    Message par Kaïkan Mer 25 Fév 2015 - 22:19


    Dire que le monde est souffrance, selon moi, ce n'est pas bouddhiste.
    On peut dire, à la rigueur, que le monde est impermanent.
    Mais Yudo souligne justement qu'il existe la souffrance, l'insatisfaction etc.
    J'ajouterais que la cause de dukkha se trouve en nous-même, dans notre façon de percevoir le monde, les autres, la vie etc.
    C'est à cause de cette façon de traduire les paroles : "la souffrance existe" par "le monde est souffrance" que certains tombent dans une sorte de nihilisme. Le message bouddhique est un message d'espoir car on peut se libérer de la souffrance.

    Au sujet de la cause de la souffrance, je trouve que l'attachement a bon dos. Ça doit encore être la faute de l'égo, je connais ce genre d'argumentaire.
    Pourtant il est plus clair de parler de non-acceptation. On refuse ce qui nous déplaît et revient régulièrement et on veut conserver ce qui nous plait et qui est éphémère. Pourtant les mauvaises herbes  repoussent toujours même si on les coupe régulièrement et qu'on les déteste. Les plus belles fleurs fânent même si on les soigne et les aime.

    Ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas couper les mauvaises herbes et qu'on ne doit pas aimer les fleurs.
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    Message par gigi Mer 25 Fév 2015 - 23:07

    Je comprends Yudo, la définition de dukkha a souvent poser mauvaise interprétation, Smile


    Dukkhasacca; La vérité de la souffrance, Par Chanmyay Sayadaw

       Dukkhasacca c’est nama et rupa, les phénomènes mentaux et physiques. Nama (le mental) comme rupa (le physique) apparaissent dépendant de leurs conditions et alors sont appelés mentalité conditionnée et physique (corporel) conditionné. Par exemple, prenez la conscience de voir, lorsque l’on voit quelque chose de visible, la conscience de voir est présente. Elle apparaît dépendant de 4 conditions ; les yeux, une chose visible, la lumière et l’attention (manisikara en Pali). Ces 4 conditions sont la cause de l’apparition de la conscience de voir.

       Toutes ces conditions doivent être présentes pour que la vue apparaisse. Bien que vous ayez des yeux, et que l’œil entre en contact avec une chose visible –s’il n’y a pas de lumière, vous ne pouvez voir. La conscience de voir n’apparaitra pas. Si vous avez des yeux, un contact visuel, une chose visible et de la lumière, mais sans attention à l’objet ou la chose visible, vous ne pourrez simplement pas voir. La conscience de voir apparaitra seulement quand il y a attention.

       Parce que la conscience de voir a 4 conditions, on dit qu’elle est conditionnée. En Pali, une chose conditionnée est appelée sankhata. Toute conscience est conditionnée, comme le sont les phénomènes mentaux et physiques. Ils apparaissent dépendants de leurs conditions.

       Néanmoins, la cessation de la souffrance, nibbâna, n’est pas conditionnée parce qu’elle n’apparaît pas ni ne dépend d’aucune condition. Alors il n’y a pas de condition ou cause pour la cessation de la souffrance, nibbâna. Elle est inconditionnée. Ce qui n’est pas conditionné est appelé asankhata, alors que le conditionné est appelé sankhata.

       Dans notre exemple, la conscience de voir dépend de l’œil, d’une chose visible, de la lumière et de l’attention. Elle apparaît puis elle disparaît. Pourquoi disparaît-elle ? Parce qu’elle apparaît. Toutes les choses conditionnées, sankhata, ont la nature de l’apparition et de la disparition, alors elles ont aussi la nature de l’impermanence (anicca).

       Tandis que la cessation de la souffrance, nibbâna, n’est pas conditionnée, elle existe toujours. Parce qu’elle n’apparaît pas, elle ne disparaît pas. Alors la cessation de la souffrance, nibbâna, n’est pas impermanente. Parce qu’elle est inconditionnée, et n’apparaît pas dépendant de condition –il n’y a pas de causes conditionnées. Alors, cette cessation de la souffrance, nibbâna, est connue comme akarana en Pali. ‘Karana’ signifie condition ; ‘a-’ sans, donc akarana signifie sans condition.

       Quand vous pouvez éteindre tous les phénomènes mentaux et physiques qui sont les choses conditionnées, la cessation de la souffrance est expérimentée. La cessation de la souffrance existe par elle-même. Elle est déjà là. Elle n’apparaît pas, donc elle ne disparaît pas, elle est permanente. Elle est appelée à la fois akarana et asankhata, comme il n’y a pas de condition.

       Le seigneur Bouddha a dit dans le premier sermon, que dukkhasacca (c’est-à-dire les phénomènes mentaux et physiques) -la vérité de la souffrance est parinneya.

       C’est une vérité qui doit être complètement réalisée (parinneya). Tout phénomène mental, et tout phénomène physique, apparaît et disparaît. Ils sont impermanents. Ce qui est impermanents est souffrance, dukkha. C’est pourquoi Bouddha dit qu’à la fois nama et rupa, les phénomènes mentaux et physiques sont souffrance, la vérité de la souffrance. Cela doit être complètement compris et réalisé.

    suite du texte:

    http://bica-vipassana.blogspot.ca/2007/07/dukkha.html
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    Message par Zenoob Mer 25 Fév 2015 - 23:19

    Du coup, effectivement, ça attache Dukkha non pas au monde en tant que tel mais à nos perceptions du monde et aux constructions mentales qui s'y rattachent...

    Ceci étant dit, que peut-on connaître du monde en dehors de ces perceptions et constructions mentales ? De la à dire que le monde est dukkha, il n'y a qu'un pas, tout de même !
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    Message par gigi Mer 25 Fév 2015 - 23:40

    Zenoob dit:


    Du coup, effectivement, ça attache Dukkha non pas au monde en tant que tel mais à nos perceptions du monde et aux constructions mentales qui s'y rattachent... Ceci étant dit, que peut-on connaître du monde en dehors de ces perceptions et constructions mentales ? De la à dire que le monde est dukkha, il n'y a qu'un pas, tout de même ! a écrit:Du coup, effectivement, ça attache Dukkha non pas au monde en tant que tel mais à nos perceptions du monde et aux constructions mentales qui s'y rattachent...

    Ceci étant dit, que peut-on connaître du monde en dehors de ces perceptions et constructions mentales ? De la à dire que le monde est dukkha, il n'y a qu'un pas, tout de même !


    gigi dit:

    Cela dépend peut-être de la perception que nous avons de ce qu'est le Monde, on pourrait parler de Samsara, et dans ce Samsara ils coexsistes autant de perceptions différentes que de combinaisons d'atômes,
    mais la cessation de dukkha est possible car ce Monde existe, si il n'existait pas on ne pourait en sortir, c'est bien évident Smile
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    Message par zanshin Jeu 26 Fév 2015 - 7:50

    3 - Dukkha cesse quand l'attachement cesse ~ dukkha nirodha ariya sacca ~

    La troisième noble vérité m'est connue sous une autre forme : puisqu'il y a une cause à dukkha il y a un "way out".
    Ce "way out" c'est la quatrième noble vérité : la pratique de l'octuple sentier (qui dissout la cause).

    J'ai compris comme cela mais je n'ai pas pratiqué le théravada que j'ai toujours trouvé trop compliqué et tarabiscoté dans sa doctrine. (c'est un point de vue personnel Smile  )
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    Message par lausm Jeu 26 Fév 2015 - 8:14

    Zenoob a écrit:Du coup, effectivement, ça attache Dukkha non pas au monde en tant que tel mais à nos perceptions du monde et aux constructions mentales qui s'y rattachent...

    Ceci étant dit, que peut-on connaître du monde en dehors de ces perceptions et constructions mentales ? De la à dire que le monde est dukkha, il n'y a qu'un pas, tout de même !

    En fait, oui, ce n'est pas le monde qui est dukkha, mais c'est nos perceptions du monde qui sont dukkha.

    Le problème dans le theravada, je trouve, c'est l'attachement aux mots dû à la volonté de préserver l'intégrité de l'enseignement.
    A mon avis, ces mots doivent être épuisés dans l'expérience concrète de ce à quoi ils se rapportent pour être profondément compris, sous peine d'en faire un appareillage de pensée, un nouveau dogme, une nouvelle Vérité. Donc des mots compris dans l'expérience concrète, et aussi avec l'aide et la mise en perspective de quelqu'un qui les a expérimenté dans sa vraie vie, et pas seulement lu dans des bouquins (ou sur un forum!).
    Mais bon, c'est une remarque personnelle qui ne regarde que moi et que j'assume, ayant été récemment victime (et pas que moi!) de la fougue fanatique de certains pratiquants, qui, parce qu'ils savent traduire un minimum de pali et connaissent par coeur certains passages et sont baignés dans la terminologie bouddhique, s'en croient investi d'une compréhension que bien sûr personne d'autre ne peut connaître s'il n'a pas tout lu...or je pense que le message du Bouddha n'est pas réductible à un texte, sinon il aurait écrit!
    Et je pense surtout que les occidentaux sont tellement capables de refaire rentrer des concepts sémantiques étrangers à l'intérieur de leurs présupposés culturels, linguistiques et conceptuels, autrement dit de prendre ce qui vient d'ailleurs pour le faire rentrer dans ses cases mentales déjà existantes sans les remettre en cause!
    Oui, les mots sont importants dans leurs choix, et donc ils faut avoir la juste distance du non-attachement, qui permet aussi de voir de quelles projections on charge ces mots.
    Pour ma part, j'ai eu la chance qu'on étudie en groupe le sutra des quatre nobles vérités. C'était super intéressant, car en confrontant l'avis des participants, donc de leur lecture à partir du vécu de leur vie, là, l'étude devenait un réel enrichissement, car elle se passait dans un processus relationnel. C'est à dire pas tout seul avec son bouquin, mais ensemble avec tous les angles de vision de chacun, les questions qui font avancer, les tentatives de compréhension...bref, un processus dynamique inscrit dans la vie concrète. C'était très intéressant.
    J'y ai compris, en tout cas, que Dukkha avait plus un sens global de vide existentiel, de "manque à être", d'insatisfaction profonde et globale de la vie.
    Et que le problème était aussi Tanha, la soif, le désir insatiable pour remplir ce vide qui fait chercher des objets de satisfaction transitoire partout, qui deviennent des objets d'attachement.
    Faut-il se détacher de l'objet d'attachement? Ou identifier la source du manque, et trouver ce qu'on doit chercher vraiment, pour résoudre le problème?
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    Message par bulleOcéan Jeu 26 Fév 2015 - 14:27

    Kaïkan a écrit:Dire que le monde est souffrance, selon moi, ce n'est pas bouddhiste.
    On peut dire, à la rigueur, que le monde est impermanent.
    Mais Yudo souligne justement qu'il existe la souffrance, l'insatisfaction etc.


    Il est vrai qu'il est par contre courant qu'on écrive  ici et là   "Le monde est souffrance" pour parler de cette noble vérité

    Ce qui n'a  pas de sens non plus à mes yeux et avec toutes les interprétations possibles que cette expression comporte.

    lausm a écrit:
    En fait, oui, ce n'est pas le monde qui est dukkha, mais c'est nos perceptions du monde qui sont dukkha.

    Dans l'interdépendance avec tout, dans la non séparation entre l'intérieur et l'extérieur, la non séparation sujet  -objet, ku,
    mais où est le lieu de la  souffrance ?  qui souffre  ?

    Kaïkan a écrit:Pourtant il est plus clair de parler de non-acceptation. On refuse ce qui nous déplaît et revient régulièrement et on veut conserver ce qui nous plait et qui est éphémère.

    On est continuellement dans ce combat , cette tension continuelle: saisir ce qui nous plait,  rejeter ce qui nous déplait, au lieu de simplement de l'accueillir tel quel dans l'éternel présent.  Ne pas lutter, ne pas courir après. Devenir un avec ce qui se passe.  Cela fait partie de nos circonstances

    « Quand il fait chaud, ne fais qu’un avec la chaleur ; quand il fait froid, ne fais qu’un avec le froid. C’est l’endroit qui ne connaît ni le froid ni la chaleur. »
    N:B: je suis pas sur que j'ai la bonne formulation concernant cette phrase. Si quelqu'un l'a s.v.p. Smile Il me semble que c'est plus court d'habitude Smile

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    Message par Kaïkan Jeu 26 Fév 2015 - 22:27


    UN ENDROIT QUI N’EST NI CHAUD NI FROID



    Au IXe siècle vivait dans la Chine des Tang un maître zen nommé Dongshan Liangjie (Tozan Ryokai en japonais), séparé de Bodhidharma par onze générations. En raison de sa grande vertu, il reçut le titre de Wuben (Gohon en japonais) Daishi, et le To du nom de l’école Soto vient du premier caractère de son nom. En conséquence, il faut prononcer Soto et non pas Sodo comme le font beaucoup de Japonais.
    Un jour, un moine en formation demanda au Grand maître Dongshan : « Quand viennent la chaleur ou le froid, comment puis-je les éviter ? »

    C’était probablement un après-midi d’été chaud et étouffant ou un matin d’hiver d’un froid glacial, et la chaleur (ou le froid) était si extrême que le moine ne pouvait plus le supporter.

    Dongshan dit : « Pourquoi ne vas-tu pas à un endroit où il ne fait ni chaud ni froid ? »
    « Où est donc cet endroit qui ne connaît ni le froid ni la chaleur ? » Le novice pensait qu’un tel endroit devait exister dans quelque pays éloigné, et pour le détromper Dongshan lui répondit : « Quand il fait chaud, ne fais qu’un avec la chaleur ; quand il fait froid, ne fais qu’un avec le froid. C’est l’endroit qui ne connaît ni le froid ni la chaleur. »

    Tant que nous vivons dans des environnements naturels, nous ne pouvons pas éviter la chaleur ou le froid, mais nous pouvons nous débarrasser de notre esprit qui n’aime pas la chaleur ou le froid.

    - 3° Noble vérité : il y a une cause à cette souffrance (la non-acceptation de l'ordre cosmique), il y a donc un remède.
    - 4° Noble vérité : ce remède c'est l'octuple sentier :

    • vues justes (vision correcte / compréhension correcte)
    • pensée juste (correcte)
    • parole juste
    • action juste
    • mode de vie juste
    • effort juste
    • attention juste
    • méditation-concentration (samãdhi juste)


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    Message par Yudo, maître zen Ven 27 Fév 2015 - 9:57

    Un soir d'hiver, il y a longtemps à Québec, j'avais passé l'après-midi à me promener avec des amis (même par -25, s'il fait beau, on peut être très bien dehors). Puis, arrivé le soir, la nuit tombée, j'ai commencé à avoir froid. Alors, j'ai eu une idée: j'ai dézippé mon parka, et j'ai laissé l'air froid entrer, et me refroidir, jusqu'au point du non-supportable. Après quoi j'ai rezippé le blouson et je me suis trouvé tout à fait bien.
    On l'ignore généralement, mais les québécois sont bien plus frileux que les méridionaux. Au Québec, comme en Allemagne, Hollande ou dans le Nord de la France, on chauffe, et les magasins, les bars sont chauffés. Mais l'Italie, l'Espagne et le Sud de la France ont un climat bien plus doux. Du coup, rien n'est chauffé (ou chauffable) [cela tend à changer depuis quelques années, mais il y a 20-30 ans, c'était le cas], et on est généralement mieux dehors que dedans. C'est l'Andalousie qui est la pire, car il n'y a même pas d'appareils de chauffage dans les appartements.

    Toujours est-il que, pendant les années où j'étudiais, les hivers m'étaient particulièrement pénibles. Mettre le chauffage (des radiateurs électriques) ne me servait à rien, à part gaspiller de l'argent. Même avec 20° de température, j'avais quand même toujours froid aux pieds. Je me couchais le soir avec les pieds glacés, et parfois je n'arrivais même pas à m'endormir tant j'avais froid.
    Jusqu'au jour où j'ai décidé, l'automne venu, de m'entraîner à supporter le froid et à rester nu-pieds dans la maison, sur le carrelage. Cet hiver-là, non seulement je n'ai pas eu à chauffer, mais j'ai dû laisser les pieds hors de la couette pour dormir, car j'avais trop chaud.

    C'est pourquoi cette anecdote de Dongshan me parle tant. Une des versions étant : "Quand il fait chaud, on meurt de chaud, quand il fait froid, on meurt de froid".
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    Message par lausm Ven 27 Fév 2015 - 14:05

    Me rappelle ce zazen où j'avais eu tellement froid. Faisait sept degrés. j'ai toujours trouvé que le froid approfondissait la
    respiration.
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    Message par Zenoob Dim 1 Mar 2015 - 14:43

    Je réfléchis pas mal à cette conversation ces derniers temps et j'aimerais poser quelques questions à propos de dukkha et de la fin de dukkha.

    Dans ce qu'a posté Gigi, dukkha est liée directement à l'apparition et la disparition des phénomènes, qu'ils soient sensations, productions mentales, etc. Ca, ça va. Mais moi, perso, je n'éprouve pas ça en zazen. J'ai plutôt l'impression que tout est en flux et ne cesse de se transformer, je ne distingue pas vraiment des choses qui apparaissent et disparaissent.

    La seule chose dont je pourrais dire cela est peut être l'attention : par exemple, j'ai une douleur, elle apparaît au moment où je porte mon attention dessus, et elle disparaît quand mon attention s'en sépare ; mais en même temps, la douleur est toujours là. J'ai pu tester ça avec le bruit un peu acouphénique ces derniers temps : lorsque je n'y prête pas attention, il n'est tout simplement plus là pour moi. Cependant, il est toujours là, comme immergé dans une attention plus globale et qui, effectivement, ne disparaît ni n'apparaît puisqu'elle est toujours là. Est-ce de ça qu'il s'agit lorsqu'on parle de dukkha comme "apparition / disparition" ? Cela ne se jouerait que sur l'attention qu'on porte ? Du coup, la fin de dukkha, ce serait baigner dans une attention non différenciée, globale, qui en fait accueille tout mais ne discrimine pas ?

    Ca me frappe vraiment en ce moment, le rôle de l'attention dans la souffrance, et c'est un des éléments proposés dans le texte de gigi pour déterminer l'apparition/disparition des sensations...
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    Message par bulleOcéan Dim 1 Mar 2015 - 14:59

    Zenoob a écrit:

    La seule chose dont je pourrais dire cela est peut être l'attention : par exemple, j'ai une douleur, elle apparaît au moment où je porte mon attention dessus, et elle disparaît quand mon attention s'en sépare ; mais en même temps, la douleur est toujours là. J'ai pu tester ça avec le bruit un peu acouphénique ces derniers temps : lorsque je n'y prête pas attention, il n'est tout simplement plus là pour moi. Cependant, il est toujours là, comme immergé dans une attention plus globale et qui, effectivement, ne disparaît ni n'apparaît puisqu'elle est toujours là. Est-ce de ça qu'il s'agit lorsqu'on parle de dukkha comme "apparition / disparition" ? Cela ne se jouerait que sur l'attention qu'on porte ? Du coup, la fin de dukkha, ce serait baigner dans une attention non différenciée, globale, qui en fait accueille tout mais ne discrimine pas ?

    ..


    De mon coté lorsqu'en zazen une  douleur se présente, elle est vécu dans l'attention globale , elle fait partie de moi, je ne  lutte pas contre, je l'accueille.     Elle se noit d'elle même dans l'attention globale si je m'exprime bien  Smile : dans l'immobilité pacifié du corps et de l'esprit ,  ne demeurant nul part , attentif à tout.    En fait un peu comme tu dis...
    Ce que je ressens est qu'il n'y a pas d'un coté un sujet qui souffre et de l'autre la douleur.  C'est une séparation illusoire.
    "Donc quand il fait froid on fait un avec le froid"

    Je me dis parfois que  si je n'avais pas ce gong pour signaler la fin du zazen sur mon Android,    quand est ce que je ferais gassho  Smile  ?


    Dernière édition par bulleOcean le Dim 1 Mar 2015 - 16:20, édité 1 fois
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    Message par Kaïkan Dim 1 Mar 2015 - 16:05


    Vous soulevez le problème vers lequel entraîne le hīnayāna (les écoles anciennes du bouddhisme) et je vois qu'il est facile de tomber dans le piège.  Laughing
    J'ai essayé d'expliquer la cause de duḥkha mais je vois que je n'ai guère eu de succès. C'est plus facile de penser que c'est l'attachement porté par l'égo qui est la source de toutes nos misères.
    Pour moi ce n'est pas vraiment comme ça, même si ce que vous dites est très sensé. En fait vous regardez comment faire disparaître vos propres douleurs physiques et mentales et c'est la Voie du hīnayāna qui vise la libération individuelle en disant : "vous devez d'abord être libéré avant d'être capable d'aider les autres".

    Je rappelle quand même que le Bouddha n'a pas recherché la fin de la souffrance pour lui mais pour tous les êtres sensibles. Dans la pratique du zen, qui est du mahāyāna ( japonais : 大乗, daijō), on reproduit exactement l’expérience de Bouddha en s'asseyant sous l'arbre en vue d'obtenir le soulagement de tous les êtres qui souffrent. C'est par la "compréhension" de KU qu'il est possible d'atteindre cet idéal recherché par ceux qui mettent en route la pratique de l'octuple sentier.

    Bien sûr en zazen la conscience diffuse ou globale est tout à fait adéquate mais elle ne doit pas être utilisée dans un but d'obtention de bien-être même si c'est le cas.
    baigner dans une attention non différenciée, globale, qui en fait accueille tout mais ne discrimine pas.
    C'est la bonne attitude pour sûr mais on ne devrait pas trop en faire cas. Laisser passer et se laisser happer par le samãdhi est l'actualisation du corps-esprit rejeté (Le SHIN-JIN DATSU RAKU de Dõgen).

    • Shin-jin : corps en unité. Plus de dualisme entre l'esprit et le corps, l'esprit et la matière.
    • Datsu : se dégager, se libérer, s'émanciper.
    • Raku : laisser tomber, relâcher, abandonner.



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    Message par bulleOcéan Dim 1 Mar 2015 - 16:18

    Kaïkan a écrit:

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    Je l'aime bien ton petit chat Wink  lol!


    Kaïkan a écrit:
    En fait vous regardez comment faire disparaître vos propres douleurs physiques et mentales et c'est la Voie du hīnayāna qui vise la libération individuelle en disant : "vous devez d'abord être libéré avant d'être capable d'aider les autres".

    Je rappelle quand même que le Bouddha n'a pas recherché la fin de la souffrance pour lui mais pour tous les êtres sensibles. Dans la pratique du zen, qui est du mahāyāna ( japonais : 大乗, daijō), on reproduit exactement l’expérience de Bouddha en s'asseyant sous l'arbre en vue d'obtenir le soulagement de tous les êtres qui souffrent. C'est par la "compréhension" de KU qu'il est possible d'atteindre cet idéal recherché par ceux qui mettent en route la pratique de l'octuple sentier.


    C'est pour cela que je dis que   zazen est un acte d' Amour et Compassion, de don.
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    Message par Zenoob Dim 1 Mar 2015 - 19:03

    Il ne me semble pas avoir dit que je cherchais à éliminer mes douleurs etc., même si, quelque part, c'est évidemment le cas.

    J'essayais juste de confronter le modèle proposé de dukkha, fondé sur l'apparition/disparition des sensations et formations mentales, et mon expérience de zazen par rapport aux sensations (les sensations de douleur étant un bon exemple, c'est tout). Je n'ai pas l'impression, quand je suis assis, que des choses apparaissent et disparaissent, alors qu'apparemment, dans la majorité des textes que j'ai lus, c'est comme ça que sont décrites les sensations, comme apparaissant et disparaissant sans cesse... C'est ça qui me questionne !

    Merci en tout cas effectivement pour le repositionnement hinayana => mahayana !
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    Message par Kaïkan Dim 1 Mar 2015 - 19:22


    Oui ce sont les écoles hīnayāna qui nous incitent à regarder dans une direction particulière. Nous sommes dans la "Section Bouddhisme ancien" et gigi nous propose les enseignements du théravada et autres anciennes écoles. C'est justement l'occasion de comparer et de voir pourquoi nous avons fait le choix du mahāyāna.

    Au sujet de ta question tu as donné la réponse de façon très claire et je vais reformuler avec mes propres idées et ma propre compréhension : Il n'y a pas disparition et réapparition totale des phénomènes qui vont et viennent, c'est l'impact sur la conscience qui change suivant qu'on se fixe dessus ou qu'on les laisse passer. Donc tu as bien observé car tu dis que les phénomènes sont toujours là et n'ont pas disparu.  Et c'est ÇA  la bonne attitude : ne pas espérer que ça s'arrête ou qu'on puisse se sauver mais trouver l'attitude juste en plein milieu du bazar  Laughing .
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    Message par Fred Dim 1 Mar 2015 - 19:56

    Tout à fait d'accord. Je me permets de poster ma réponse à Zenoob que j'avais écrite pendant que Kaïkan postait la sienne.

    zenoob a écrit:Je n'ai pas l'impression, quand je suis assis, que des choses apparaissent et disparaissent, alors qu'apparemment, dans la majorité des textes que j'ai lus, c'est comme ça que sont décrites les sensations, comme apparaissant et disparaissant sans cesse... C'est ça qui me questionne !

    C'est circonstanciel comme indication je crois, en réponse à une difficulté précise que certains ont et que peut-être tu as la chance de ne pas rencontrer.
    Si rien n'apparaît ou disparaît pour toi, c'est peut-être bon signe, ces indications dont tu parles ne sont peut-être pas pour toi.
    Ce serait en somme en réponse à la rigidité mentale de certains pratiquants qu'on ferait mention de ces deux aspects.
    Je dis cela parce que toute forme d'indication ne peut me semble-t'il qu'être un moyen pour contrebalancer des difficultés, le but n'est pas de chercher à signifier l'existence d'un état conscient type qui serait celui à atteindre, en l'occurrence il ne s'agit pas de dire en parlant d'apparition/disparition que si quelqu'un n'a pas conscience de ces deux aspects, alors cela signifie qu'il ne conscientise pas les choses comme il faut.
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    Message par Yudo, maître zen Dim 1 Mar 2015 - 20:47

    Je voudrais aussi insister sur le fait que dhukkha, ce n'est pas tant la douleur physique (inévitable) que la souffrance mentale. C'est pourquoi j'insiste tant (et si souvent) sur l'ensemble du champ sémantique: souffrance/insatisfaction/mal-être/stress etc.

    Par rapport à la douleur physique, il y a d'ailleurs dans le Canon Pâli une anecdote significative. Le Bouddha, en marchant, se blesse un jour le pied sur un silex effilé. Il a le pied qui saigne. Quiconque à qui cela est arrivé sait l'emm... que c'est. On ne peut plus mettre le pied par terre, et même soulevé, cela fait mal. Cela met un temps fou à guérir.

    Le Bouddha se saisit donc de l'occasion pour faire une petite démonstration. Il explique que, tout bouddha qu'il est, ça fait mal (bordel!). Mais que s'il s'attardait sur sa douleur, s'il insistait dans sa tête pour se dire "Ouille ouille ouille que ça fait mal!", non seulement il aurait mal au pied, mais encore redoublerait-il sa douleur en l'amplifiant mentalement. Son enseignement c'est donc qu'on prend la douleur physique, telle qu'elle est, et on n'en rajoute pas avec le mental. Cela correspond à la plupart des expériences de douleur physique qui ont été évoquées ici, le froid compris.

    Mais je pense qu'il est important de se calmer. La "souffrance" dont traite le Bouddhisme, c'est d'abord et avant tout celle de l'esprit, du mental.
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    Message par lausm Dim 1 Mar 2015 - 21:14

    Zenoob a écrit:Je réfléchis pas mal à cette conversation ces derniers temps et j'aimerais poser quelques questions à propos de dukkha et de la fin de dukkha.

    Dans ce qu'a posté Gigi, dukkha est liée directement à l'apparition et la disparition des phénomènes, qu'ils soient sensations, productions mentales, etc. Ca, ça va. Mais moi, perso, je n'éprouve pas ça en zazen. J'ai plutôt l'impression que tout est en flux et ne cesse de se transformer, je ne distingue pas vraiment des choses qui apparaissent et disparaissent.

    La seule chose dont je pourrais dire cela est peut être l'attention : par exemple, j'ai une douleur, elle apparaît au moment où je porte mon attention dessus, et elle disparaît quand mon attention s'en sépare ; mais en même temps, la douleur est toujours là. J'ai pu tester ça avec le bruit un peu acouphénique ces derniers temps : lorsque je n'y prête pas attention, il n'est tout simplement plus là pour moi. Cependant, il est toujours là, comme immergé dans une attention plus globale et qui, effectivement, ne disparaît ni n'apparaît puisqu'elle est toujours là. Est-ce de ça qu'il s'agit lorsqu'on parle de dukkha comme "apparition / disparition" ? Cela ne se jouerait que sur l'attention qu'on porte ? Du coup, la fin de dukkha, ce serait baigner dans une attention non différenciée, globale, qui en fait accueille tout mais ne discrimine pas ?

    Ca me frappe vraiment en ce moment, le rôle de l'attention dans la souffrance, et c'est un des éléments proposés dans le texte de gigi pour déterminer l'apparition/disparition des sensations...

    Si tu connais l'anatomie neurologique, les voies de la douleur traversent le centre de la vigilance.
    La relation entre souffrance et vigilance, est une réalité corporelle incarnée et tangible, anatomiquement vérifiable.
    Si on regarde bien, en fait, dans ce flux, ce qui apparait et disparait existe.
    Mais c'est aussi difficile à distinguer que le mouvement de flux et reflux des vagues sur la plage : celle qui reflue, se mêle à celle qui arrive, et en fait, on ne peut voir de point précis où ça naisse et meure, car cela se passe en relation interdépendante en permanence.
    Observer cela est une conséquence d'une attention qui cherche à voir cela.
    Où alors on le perçoit plus volontiers après un long moment de concentration focalisée.
    Le fait est qu'en zazen, on a une méthode de concentration sur le corps, la respiration. L'observation se développe après avoir pris de la distance avec ces bases de concentration.
    D'autres écoles différencient concentration et observation. Voir ce qui apparaît et disparaît, relève de cette observation profonde.
    MAis dans le zen, on ne cherche pas à différencier ces étapes...pour moi, avec le temps, l'affinement des perceptions, ça devient de plus en plus évident.
    Comme quand on arrive à se concentrer sur de fins détails d'interprétation en musique, quand on n''a plus besoin de rester le nez collé sur une partition.
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    Message par Zenoob Dim 1 Mar 2015 - 21:57

    Merci pour vos réponses passionnantes !
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    Message par Lumpinee Mer 4 Mar 2015 - 14:53

    Zenoob a écrit:
    Ca me frappe vraiment en ce moment, le rôle de l'attention dans la souffrance

    C'est de ça que je parlais il y a quelques temps, à propos du fait que la spiritualité était en bonne partie un mur qu'il faut ériger: se concentrer sur les bonnes choses de la vie. Et quand on arrive à etre heureux avec de petites choses, alors là c'est jackpot! cheers
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    Message par Kaïkan Mer 4 Mar 2015 - 15:21


    Un petit texte très intéressant de David R. Leroy → ici

    Se contenter de ce que l'on a est la plus grande richesse.


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