Je "rouvre le sujet".
Par besoin.
Ma vie n'est pas parfaite. En réalité, mon existence n'a guère vraiment changée.
Ce qui a changé, c'est le fond de ce que je suis.
Je connais encore des difficultés dans ma vie, je commets encore des erreurs, je suis parfois triste, parfois colérique, parfois désespéré.
Mais la plupart du temps, je baigne dans un bonheur indescriptible - est-ce une extase ?
Il fluctue, mais les "plages" de mon existence qu'il occupe sont de plus en plus longues.
Le bonheur, est-ce cela, ce que j'ai trouvé en moi ?
Malgré l'imperfection, l'insatisfaction de ma vie, malgré mes erreurs et tout ce qui fait mon humanité, la vie est belle désormais.
Je dois vous dire d'où il est venu, ce bonheur ?
On m'a volé mon enfance et toute ma vie ou presque ne fut que calamité, noirceur, douleurs, faute à des parents pas assez sérieux...
Je me suis toujours battu pour ne pas être comme eux.
Mais les souffrances ont redoublé, car j'avais la haine contre la terre entière.
Et je suis tombé sur le bouddhisme (enfin, re-tombé !).
Et j'ai médité, autant que j'ai pu et tout le temps en groupe.
J'ai aussi beaucoup étudié le dharma, seul, chez moi, n'ayant jamais trouvé quiconque pour parlr de la "doctrine".
Sans connaitre la phrase de Dogen "si vous ne résolvez pas en cette vie-même la question de la vie et de la mort, quand le ferez-vous ?", j'y réfléchissais au travers du Vide.
Je le cherchais, vraiment.
Face au mur aveugle, je le cherchais jusqu'à le comprendre. De là, mon esprit, cet égo ordinaire, s'emietta ou se brisa tel un miroir.
Cela me prit encore quelques années.
Je cherchais dans tout ce que je pouvais lire, mais surtout dans le zen.
D'autres souffrances s'ajoutèrent.
Puis Samsara et Nirvana ne furent plus les deux faces d'une même pièce, mais la même pièce.
Puis, toujours humblement, je compris l'Esprit-Un (Yogacara) et par le même enchainement que précédemment, la Nature-de-Bouddha.
Tout cela me fut offert, tandis que j'abandonnais tout idée à mon sujet, au sujet du monde, au sujet de mes souffrances, finalement.
Et un jour, bêtement, lisant un Upanishad, tout éclata.
Les petits moments de vérité vécus précédemment m'ont conduit, depuis lors, Ici-et-Maintenant, avec cette joie de vivre à vivre intérieurement.
Je n'ai qu'à vous que je peux confier cela. Ne me jugez pas svp. C'est juste mon témoignage. Je vous le "transmets".
Vous et moi aurions bien pu vivre sans, mais peut-être cela servira-t-il à l'un d'entre nous.
Je n'ai aucune prétention.
Voilà une vie de souffrance, qui m'a conduit à ce bonheur fou.
Abandonner corps-et-esprit.
Toutes ces choses que les sages du Dharma enseignent depuis des siècles et des siècles partout en Asie, pourquoi les jetterions-nous à la poubelle ?
Nous sommes humains, ils l'étaient aussi.
Je n'ai peut-être pas été un bon pratiquant du zen.
Voilà simplement comment j'ai cheminé et où j'en suis arrivé.
De ma propre expérience, j'ai passé les trois étapes : la montagne est d'abord une montagne, puis elle n'en n'est plus une, puis elle redevient une montagne.
Désormais, je suis l'observateur de ces pensées impersonnelles.
Sitôt que je les observe, elles cessent ou du moins, je ne suis plus abusé, et je ne les suis plus. C'est un contrôle mental - la méditation, ou "culture mentale" (Bhavana ?).
Donc, cela me laisse plus de lattitude pour être réellement présent, assis, observant cela et le dojo et les pensées. Ma concentration s'est nettement accrue.
En moi, depuis janvier 2016, c'est le calme intérieur, une vraie paix, une lumière intense, une grande clarté (claire, vaste, pure, lumineuse comme un ciel d'été).
Comme je l'ai déjà dis, j'ai cette capacité désormais de pouvoir y trouver refuge quand je le désire.
Quand il m'arrivait autrefois de vivre de nouveaux moments difficiles, je plongeais aussitôt dans d'affreux tourments.
Désormais quand cela arrive et bien, plus jamais je ne replonge. Il y a comme un sol extrêmement solide désormais, alors qu'avant c'était une abysse devant moi.
Je vous laisse avec cette explication de Mathieu Ricard.
Bien à vous, et merci de m'avoir laissé écrire ce second témoignage.
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PJ : http://eveilphilosophie.canalblog.com/archives/2014/01/28/29062170.html
28 janvier 2014
La nature de l'esprit
Voici un texte de Matthieu Ricard sur la nature de l'esprit qui est dit ici être "conscience pure "...comme quoi le bouddhisme et l'advaita vedanta ne sont pas très éloignés...
jlr
"La nature de l'esprit
Lorsque l'esprit s'examine lui-même, que peut-il apprendre sur sa propre nature? La première chose qui se remarque, ce sont les courants de pensées qui ne cessent de surgir presque à notre insu. Que nous le voulions ou non, d'innombrables pensées traversent notre esprit, entretenues par nos sensations, nos souvenirs et notre imagination. Mais n'y a-t-il pas aussi une qualité de l'esprit toujours présente, quel que soit le contenu des pensées ? Cette qualité, c’est la conscience première qui sous-tend toute pensée et demeure tandis que, pendant quelques instants, l'esprit reste tranquille, comme immobile, tout en conservant sa faculté de connaître. Cette faculté, cette simple « présence éveillée », on pourrait l'appeler « conscience pure » car elle peut exister en l'absence de constructions mentales.
Continuons à laisser l'esprit s'observer lui-même. Cette « conscience pure », ainsi que les pensées qui surgissent en elle, on en fait indiscutablement l'expérience. Elle existe donc. Mais, hormis cela, que peut-on en dire? Si l'on examine les pensées, est-il possible de leur attribuer une caractéristique quelconque? Ont-elles une localisation? Non. Une couleur? Une forme? Non plus. On n'y trouve que cette qualité, « connaître », mais aucune autre caractéristique intrinsèque et réelle. C'est dans ce sens que le bouddhisme dit que l'esprit est «vide d'existence propre». Cette notion de vacuité des pensées est certes très étrangère à la psychologie occidentale. À quoi sert-elle? Tout d'abord, lorsqu'une puissante émotion ou pensée surgit, la colère par exemple, que se passe-t-il d'ordinaire? Nous sommes très facilement submergé par cette pensée qui s'amplifie et se multiplie en de nombreuses autres pensées qui nous perturbent, nous aveuglent et nous incitent à prononcer des paroles et à commettre des actes, parfois violents, qui font souffrir les autres et seront bientôt pour nous une source de regret. Au lieu de laisser se déclencher ce cataclysme, on peut examiner cette pensée de colère pour s'apercevoir que dès le départ ce n'est « que du vent ».
Il y a un autre avantage à mieux appréhender la nature fondamentale de l'esprit. Si l'on comprend que les pensées surgissent de la conscience pure, puis s'y résorbent, comme les vagues émergent de l'océan et s'y dissolvent à nouveau, on a fait un grand pas vers la paix intérieure. Dorénavant, les pensées auront perdu une bonne part de leur pouvoir de nous troubler. Pour se familiariser avec cette méthode, lorsqu'une pensée surgit, essayons d'observer sa source ; quand elle disparaît, demandons-nous où elle s'est évanouie. Durant le bref laps de temps où notre esprit n'est pas encombré de pensées discursives, contemplons sa nature. Dans cet intervalle, où les pensées passées ont cessé et les pensées futures ne se sont pas encore manifestées, ne perçoit-on pas une conscience pure et lumineuse qui n'est pas modifiée par nos fabrications conceptuelles ? Procédant ainsi, par l'expérience directe, nous apprendrons peu à peu à mieux comprendre ce que le bouddhisme entend par « nature de l'esprit »."
Matthieu Ricard, Plaidoyer pour le bonheur