Le Dieu de Spinoza
La façon dont Spinoza conçoit un dieu est beaucoup plus proche de certaines visions orientales que le Dieu des religions occidentales reposants sur le "livre".
Voici un petit extrait de : http://spinozaetnous.org/article13.html
Olivier sur \"Spinoza et nous" a écrit:1. D'abord, Spinoza s'oppose à la conception d'un Dieu personnel. Dieu, conçu comme personne, est distinct des êtres finis : c'est la figure du Christ qui se tient face à ceux qu'il enseigne et ceux qu'il combat. Dans la doctrine chrétienne, cette valorisation de la Personne va de pair avec une dévalorisation de la nature (la nature intérieure de l'homme pêcheur, et la nature extérieure, elle-même souillée par ce pêché, et désormais soumise aux altérations du temps). Par rapport à la problématique chrétienne, Spinoza opère un renversement complet : il réhabilite la nature, non plus comme totalité des "étants", mais comme processus de génération des "étants" à partir d'un principe unique. D'un point de vue anthropologique, cela a pour conséquence que l'homme est 'lavé' du pêché originel, réhabilité lui-même dans sa capacité à appréhender par lui-même ce principe divin dans et hors de lui.
2. Ensuite, Spinoza s'oppose à la conception judaïque d'un Dieu furieux, imprévisible, objet de crainte, et en même temps sujet à d'éventuelles tractations. Le Dieu judaïque est un entité à la fois redoutable et négociable (par la prière), un punisseur et un rétributeur, c'est-à-dire un Dieu essentiellement orienté vers les hommes. Dans cette perspective, l'univers devient un système de signes, chaque évènement étant l'expression d'une intention divine concernant l'homme (voir la fameuse critique du finalisme, dans l'appendice au livre I de l’Éthique).
A cette vision, Spinoza oppose d'une part le mécanisme cartésien (les "étants" ne renvoie pas à autres chose qu'à d'autres "étants", effets ou cause), et d'autre part une conception très profonde des contraintes psychologiques et de l'esclavage intérieur des passions. Que reste-t-il du concept de Dieu après cette double 'épuration'? Autrement dit, qu'apporte en positif la conception spinoziste de Dieu ?
Dire que Dieu est la Nature est une affirmation très trompeuse pour nous, car il ne s'agit surtout de ce que nous concevons être la nature (à travers l'héritage de la science moderne). Parler même de Dieu avec un grand 'D', comme si c'était un nom propre, peut nous inciter à nous adresser à lui comme à une personne. Je pense qu'il serait plus juste de parler de 'divin' ou de 'principe divin', ce principe étant l'origine de tout, qui est "co-présen"t à chacune des 'créatures'. Or, c'est précisément en "internalisant" le principe divin en l'homme que Spinoza fonde la possibilité de sa liberté : tandis que le 'Dieu de la religion' faisait des hommes des esclaves en cultivant méthodiquement en eux certaines passions, le 'principe divin' en nous est source d'une liberté suprême, pour autant qu'on parcoure le chemin ardu qui mène à l''amour intellectuel'.
Kaïkan a écrit:L'internalisation (en psychologie) correspond à un processus complexe par lequel l'individu fait siennes des données extérieures à lui et les intègre à son système de valeurs et à son comportement.
Cette façon de concevoir le divin, non pas comme une personne, un être suprême avec qui on aurait une sorte de dialogue, mais au contraire comme un principe non-séparé de tout ce qui est, et dont nous faisons partie comme tous les êtres, pourra avoir chez beaucoup de pratiquants bouddhistes, un écho bienveillant je suppose.
C'est un débat qui peut amener à approfondir tout ce qui est habituellement rejeté avec un certain mépris comme provenant du panthéisme...