par Yudo, maître zen Dim 12 Jan 2020 - 9:03
Kaïkan a écrit:
Dans Kansei sanshiki (qu'on trouve aussi sous la forme erronée de Kansei sanshoku chez Yoko Orimo), j'ai été surpris quand Dõgen se met à citer des chiens qui en fait sont des êtres humains. Je suis allé dans ma version anglaise et je l'ai vu écrit ainsi : Il y avait deux "chiens". Et là il était clair que ce n'était pas des animaux dont il était question. Cela reste dur mais admissible lorsque c'est en italique et avec des guillemets anglais car on comprend tout de suite que c'est de personnes et pas d'animaux dont il est question. Il n'en reste pas moins que je suis interloqué par ce genre de propos, surtout proférés par Dõgen, c'est quand même vraiment insultant, peut-être que c'était normal à, l'époque au Japon...
En règle générale, Dôgen mâche encore moins ses mots que moi lorsqu'il se trouve face à des bouffons et des escrocs spirituels. (Ou qu'il perçoit comme tels).
Cela nous choque, parce que toute notre perception du zen est basée sur une image doucereuse et utopique. Mais, comme le fait remarquer Brad Warner, l'époque de Dôgen est une époque épouvantable, bien loin d'être pacifique et idyllique, comme certains pourraient vouloir l'imaginer. Le père de Dôgen avait assassiné dans un coup d'état. Lui même déménagea son temple hors de Kyôto, parce que, disait-il, le principal fleuve qui traversait la ville était plein de sang humain et d'autres débris à cause des constantes battailles qui faisaient rage dans toute la région. Les récits historiques correspondant aux époques des autres anciens maîtres sont tout aussi horribles.
Il fait remarquer que nous, en Occident, sommes souvent béatement ignorants de ces éléments historiques, imaginant que ces anciens bouddhistes pratiquaient dans un monde où les seules préoccupations étaient de cultiver la paix intérieure et la tranquillité. Du coup, comment s'étonner de ce qu'il ne cache pas son irritation devant le comportement de certains?