Si je comprends bien tu es attaché à une certaine tradition...tu trouves plus fiable une lignée plutôt qu'une autre...mais comment les distinguer ?
Il n'y a pas à distinguer les écoles zen traditionnelles, quelles que soient les lignées (rinzaï, soto ou obaku). Le sangha est la garantie du sérieux.
mais la dissidence peut être la manifestation du rejet d' une soumission qui s'éterniserait...
Si on ne sait pas se soumettre à une lignée traditionnelle, il y a vrai un problème. Si on ne s'entend pas avec un maître, on change de maître mais on ne change pas de lignée. La soumission à une lignée, c'est reconnaître le sangha. Si on considère que le maître est le représentant du sangha, on n'a pas compris grand chose au sangha. Le Sangha, c'est la relation étroite du maître aux disciples. La certification se fait dans les deux sens. Le sangha a certifié le bouddha et le bouddha a enseigné aux disciples qui étaient susceptibles de comprendre une partie de son message et évoluer. Sans le sangha, pas de bouddha, pas de bouddhisme, pas de dharma. Le sangha est fondamental. C'est le Nirmanakya, en fait.
De même, comment le premier maître d'une école pourrait être authentifié ?
Une authentification se fait sur la base d'une reconnaissance. Le Bouddha a été reconnu par ses premiers disciples parce que 1) son message leur était clair et 2) ce message était clair parce qu'ils avaient déjà parcouru un bon bout de chemin. Il n'y a pas d'autoproclamation qui résiste au temps. Le message du Bouddha a 2500 ans. Le Zen compte aussi plus d'un millénaire. Ce message résiste parce qu'il est compris de maîtres à disciples de générations en générations.
Il me semble que le maître ne puisse pas s'authentifier tout seul, et que se soit son maître qui le fasse, ou des disciples qui lui demanderaient de jouer le rôle...On voit aussi beaucoup de maîtres s'isoler dès que des disciples prennent le flambeau...
Le Zen, ce n'est pas de la politique. On n'élit pas un maître pour qu'il tienne un rôle. De la même façon, il n'y a pas, dans le zen, des disciples qui prennent le flambeau. Dans les écoles traditionnelles, où le respect des règles est strict, il n'y a pas de danger que ce système dérape. S'il y a dérapage, ce n'est plus du zen. Ce n'est plus traditionnel. C'est à bannir.
Oui la réalisation de notre vraie nature, nous fait accepter l'idée d'être vide
Non. La réalisation nous immerge dans la vacuité. Il ne s'agit pas d'idée ou d'acceptation d'idée. On peut voir aussi les choses dans le sens de la foi où l'on accepte l'idée de vacuité parce qu'on en a une certaine intuition. Mais ce n'est pas la réalisation. Ce n'est pas le kensho. Il est très important de saisir cela.
mais n' y aurait-il pas quelque chose d'intangible qui subsisterait, à laquelle notre conscience pourrait s'identifier ?...
Si la conscience s'identifie à quelque chose, c'est l'ignorance au sens du bouddhisme. Dans la réalisation, il n'y a rien qui soit "intangible". Précisément, tout devient palpable, tangible. Ça aussi, il importe de bien le comprendre.
peut-être que l'accès à cette connaissance appartient qu'aux plus grands maîtres...Bouddha n'a-t-il pas eut accès à la connaissance de ses incarnations précédentes ?
Il y a certainement différentes profondeurs au kensho. Certains kenshos sont superficiels, d'autres plus profonds. Ceci est bien décrit dans les dix tableaux du dressage du buffle. Quant à la question de connaissances de vies antérieures (le terme "incarnation" est impropre), il faut bien comprendre que cela n'est pas factuel, pris dans un sens dualiste. Lors d'une expérience zen profonde (kensho), on touche réellement du bout des doigts le commencement et la fin de l'univers. Il existe des kôans comme celui-ci : où que tu te trouves sur la rive, arrête la barque qui dérive au coeur du torrent sans te mouiller. Si tu cherches une corde (un "bout" diraient les marins) pour arrêter la barque, tu as perdu. Tu crois que le Bouddha a vu ses vies antérieures de la même façon que toi tu te sens incapable de les voir. Si tu as compris comment arrêter la barque, tu as compris aussi l'ubiquité du Christ, par exemple. Si tu sais qui tu es, tu sais qui tu étais et qui tu seras.
Je veux bien que pendant la réalisation de notre vraie nature, le karma s'éteigne, mais qu' en est-il de notre vraie nature ?
Dans le bouddhisme, on appelle "non-né" ou "non-créé" notre vraie nature. Le non-né ne peut ni naître, ni mourir. Mais sans le non-né, il n'y aurait aucune porte de sortie du samsara (cycle des renaissances).
Tu reconnais là que nous sommes ignorants de la consistance de notre vraie nature.
Je reconnais qu'une majorité de personnes ou d'êtres sensibles sont ignorants de leur vraie nature. Mais il existe des êtres qui ne sont pas dans cette ignorance.
Je ne suis pas persuadé que notre vraie nature ne soit pas une âme intangible qui nous redeviendrait tangible avec la mort physique...Il me semble que l'expérience du satori ne soit pas suffisante pour l'affirmer...de plus certains bouddhistes parlent bien d'une vie après la mort de notre corps physique..
C'est ta croyance. Sans la réalisation de ta vraie nature, il ne sert à rien d'en parler. Il faut juste essayer de la réaliser sans a priori (croyance, supposition...). Quand tu dis "il semble que le satori ne soit pas suffisante de l'affirmer", tu fais une conjecture qui ne s'appuie sur rien de tangible. Ce qui te semble, je te le redis, n'a aucune importance et est sans intérêt. Ou tu as le satori, ou tu ne l'as pas. Si tu ne l'as pas, ce qui te semble est du cinéma intérieur. Si tu l'as, tu ne doutes plus. Quant à ce que disent certains bouddhistes... On n'est pas dans un institut de sondage.