beanell a écrit:Je me souviens d'un coup de kyosaku qui m'a valu par la suite quelques visites chez le kinési (auquel je n'ai pas voulu expliquer l'origine de ma contracture musculaire).
Juste avant le zazen , celui qui devait donner le Kyosaku n'étant toujours pas là , un autre à été désigné pour le remplacer dans l'urgence . Cet autre d'abord trés réticent affirmant n'avoir jamais fait ça , se retrouve dans le rôle , sous prétexte qu'il fallait bien apprendre un jour ..Bref ..en pleine méditation ..je tente ..voulant éviter la somnolence , et là dans son excés de zéle je reçois un coup tel que ma somnolence s'est tranformée instantanément en une colére accompagnée d'un beau mot grossier (et ce n'est pas dans mes habitudes loin de là).
A la fin du zazen j'ai entendu qu'on expliquait au gars comment il falait tenir le kyosaku ...
En tout cas pendant des mois je n'ai plus jamais redemandé le kyosaku , d'ailleurs ce n'était pas la peine parceque rien qu'a entendre le passage du kyosakuman , toute somnolence disparaissait immédiatement (trés éfficace)
Voilà pour l'anecdote !
Ah ah, ma compagne a vécu le meme genre de truc.
Sauf qu'elle, bien élevée, a fait gassho car elle voyait tout le monde faire, et le gars qui portait le kyosaku, un gars bien zèlé, qui tape bien franc, a tapé franc. Du coup elle ne l'a pas redemandé pendant longtemps.
Toutes ces questions expriment quelque chose qui me travaille depuis un bon moment : le conditionnement du cadre dans le zen soto, qu'on remet difficilement en cause, et dont on fait un dogme au final.
Le kyosaku bien donné, est celui qui est aussi bien reçu. et le kyosaku le mieux donné est fait par celui qui n'en a pas besoin a quelqu'un qui n'en a pas besoin non plus.
Ce devrait etre comme un traitement, une aiguille d'acupuncture.
En fait, on frappe un point qui se trouve la où se croisent trois méridiens yang sur le haut du corps, qui doivent etre vésicule biliaire, intestin grèle et je sais plus.
Une aiguille d'acupuncture ça pique, le kyosaku ça frappe, les techniques de soin sino japono asiatiques sont parfois hard a recevoir, mais diablement efficaces aussi. Mais comme tout, faut le bon dosage, et le systématisme et l'habitude, ça va contre l'éveil.
Deshimaru a dit des trucs très intéressants sur le kyosaku : autrefois, avant la grande normalisation post sotoshuisation, le shusso donnait deux coups sur chaque épaule : le premier coup avait valeur de sondage du tonus, le second de rééquilibrage.
Quand l'énergie sombre, on tape plus sec, en mettant la conscience plutot sur la remontée du coup. Si elle est trop yang, on a l'intention d'enfoncer.
Mais comme toute conscience énergétique, ce n'est pas qu'un mouvement physique, c'est un mouvement où le corps et le baton en unités, reliés avec qui le reçoit, expriment la conscience.
Mais comme on me l'a appris, ça ne se donne pas avec la tète, mais le hara.
et il me semble qu'on y expérimente la l'essence des arts martiaux.
J'ai eu la chance de l'apprendre au bon moment avec de bonnes personnes.
Un jour un enseignant réputé pour son kyosaku, me l'a donné...il m'a enfoncé dans le zafu, et j'en suis ressorti comme une fleur qui éclot...mais un autre réputé pour etre un bourrin, faisait pleurer les femmes a la Gendro quand il passait dans les rangs.
Faut l'équilibre, et pour ça l'enseigner bien.
Mais nous on n'en a meme pas sur l'autel.
Notre kyosaku c'est une bonne discussion après zazen, avec reprise des points problématiques de la posture, possibilité d'en parler et de voir comment on peut gèrer tout ça sans rien d'autre que soi meme.
Et je pense que le kyosaku sert souvent de substitut a la parole, je ne crois pas que le vrai zen s'enseigne de cette façon paramilitaire...mais certains aiments ça, libre a eux, moi ça ne m'a jamais fait peur, mais aujourd'hui j'apprends le zazen sans jouets, comme disait Uchiyama, sans parler ni faire de bruit pendant : on est assez bruyant dans la tète, pour en rajouter.