- Zenki -
Par Maître Dõgen
Shôbôgenzô ch. 22 : Zenki (全機), "La totale activité", 1242.
Zenki est l’attitude face à la diversité de la vie d’un moine zen - loin des apparences - qui pratiquerait la Voie du Bouddha. Même si nous contrôlons la voile, le gouvernail, les rames, le bateau, ses qualités restent inchangées : nous en avons absolument besoin pour survivre. Inversement, le bateau ne peut fonctionner correctement sans nous. A chacun sa propre vie, à chacun sa propre mort. Par cela, nous pouvons découvrir la véritable nature de notre existence.
La grande Voie de tous les Bouddhas et le but ultime dans le bouddhisme sont le détachement de la vie et de la mort et la réalisation de l’éveil. Nous devons nous détacher de la vie en étant dans la vie, et de la mort en étant dans la mort. Quand nous sommes vivants, la vie est l’activité essentielle et dans la mort, la mort devient l’activité principale. La vie, c’est faire l’expérience de la vie. La mort, c’est faire l’expérience de la mort. La vie et la mort sont l’expression de la vérité effective. S’en détacher complètement, c’est s’immerger entièrement dans la vie et dans la mort.
Comprendre la vie et la mort est un des moyens avec lequel les Bodhisattvas obtiennent leur salut et celui des autres.
La réalisation de l’éveil est la vie véritable - sans entraves. Quand nous réalisons l’éveil, le sens de la vie et de la mort devient totalement clair. Cependant, cette expérience ne peut être définie ni par la conscience, ni par la connaissance, ni par les notions telles que gros ou petit, infini ou fini, long ou court, près ou loin.
Notre vie concrète est constituée de cette expérience et de la même manière, cette expérience est constituée de la vie. La vie s’en va et s’en vient, apparaît et disparaît. La vie est l’expérience globale de la vie, inversement la mort est l’expérience intégrale de la mort. C’est le sens qui est donné à la nature incommensurable de la pratique bouddhiste. Si nous réfléchissons sur notre vie présente et si, graduellement, nous nous éveillons, le monde commence à se manifester à nous dans sa véritable apparence. L’activité de la vie contient l’univers tout entier. Chaque instant détient complètement l’existence.
La vie est comme être sur un bateau. Même si nous contrôlons la voile, le gouvernail, les rames, le bateau, ses qualités restent inchangées : nous en avons absolument besoin pour survivre. Inversement, le bateau ne peut fonctionner correctement sans nous. L’homme et le bateau se complètent harmonieusement, exprimant totalement l’interdépendance. Quand l’homme et le bateau fonctionnent ensemble et forment une entité, toutes les activités du ciel, toute l’eau et tout le rivage aussi proviennent du même temps et du même espace. En quelque sorte, toutes les circonstances travaillent ensemble harmonieusement. C’est de cette manière que la vie et notre existence fonctionnent conjointement.
Selon Maître Engo Kokugon : " La vie est l’expérience globale de la vie. La mort est l’expérience intégrale de la mort. " Ces deux dimensions ne s’opposant pas, elles existent ensemble dans l’expérience de l’univers tout entier. Elles n’ont aucun rapport avec l’espace et le temps. L’expérience universelle se réalise dans la vie et la mort, et rien ne peut faire obstruction. Mais individuellement, chaque expérience de vie et de mort, bien qu’elle ne soit pas totalement différente, n’est pas comparable à une expérience universelle. A chacun sa propre vie, à chacun sa propre mort. Par cela, nous pouvons découvrir la véritable nature de notre existence. C’est comme un homme qui étire ses membres ou bien qui dort agrippé à son oreiller. C’est l’actualisation de la divine lumière et de l’activité tout entière.
Vie et mort apparaissent à chaque instant. Elles apparaissent instantanément, naturellement, sans y penser. Si nous nous efforçons sérieusement, nous pouvons percevoir leur apparence. Au moment de la réalisation, la vie et la mort deviennent complètement claires. Surtout, n’allez pas penser que cela n’est pas une réalisation du passé. Chaque instant contient la réalité toute entière. Reconnaître cela, c’est la réalisation sans fin qui se renouvelle sans cesse.
Dôgen Zenji.
Prononcé au château du Daimyo Hatanô Izumono Kami Yoshishige le 17 décembre 1242 recopié par Ejô.
Dõgen Zenji
source: http://www.buddhaline.net/Zenki-Zen-Attitude