Shôbôgenzô, chapitre premier Bendowa
Comment se mettre en quête de la vérité : une interprétation moderne
[11] Lorsque les bouddhas, – c.-à-d. ceux qui vivent pleinement dans le présent – ayant pour chacun d'eux appris la vérité du Bouddha d'une personne réelle, réalisent ce qu'est la vérité, ils la réalisent par la meilleure méthode qui soit. Cette méthode, dans laquelle il n'y a aucune intention d'atteindre un but, est subtile, et ne peut être enseignée que par un bouddha à un autre bouddha. Elle n'en dévie jamais. Il s'agit d'une pratique qui équilibre l'actif et le passif, et qui remet en ordre le corps-et-esprit. La forme authentique de cette pratique, qu'on appelle Zazen, est de s'asseoir dans une posture redressée. Quoique nous soyons tous dotés de l'état naturel, si nous n'y revenons pas au moyen de cette pratique, on ne peut le voir, et si nous n'en faisons pas l'expérience, on ne peut pas se rendre compte de ce qu'il est. Il vient à nous et nous remplit aussitôt que nous abandonnons nos intentions, et ce n'est pas un état discriminant. Lorsque nous parlons, cet état s'exprime par notre bouche en toute liberté. Les bouddhas vivent dans cet état naturel et s'y maintiennent en n'y séparant pas la réalité en deux parties : une physique et l'autre mentale. Les gens qui ne séparent pas la réalité en deux sont des bouddhas. La façon que j'ai maintenant d'enseigner la vérité du Bouddha en est une qui permet de faire l'expérience réelle de toute chose telle qu'elle est, clairement, et nous accorde un état de plénitude qui nous apporte la vraie liberté. Quand vous vous serez débarrassés de tout ce qui vous entrave et trouverez cette vérité, alors ces paroles que vous lisez maintenant n'auront plus aucune pertinence.
[14] M'étant fermement déterminé à chercher la vérité du Bouddha, j'ai voyagé dans plusieurs régions du Japon pour rencontrer des maîtres dont j'espérais qu'ils m'aideraient dans ma quête. L'un d'eux était maître Myôzen, qui vivait au Kenninji. Je suis resté son élève pendant neuf ans, apprenant les enseignements de la lignée de Rinzaï. Maître Myôzen était le plus excellent des étudiants de maître Eisai, et il en avait directement reçu les enseignements de la vérité du Bouddha. Aucun des autres étudiants ne pouvait lui être comparé. Puis, j'ai été en Chine, cherchant d'Est en Ouest un bon enseignant, et j'y ai appris les traditions des cinq lignées qui pratiquent Zazen. Enfin, j'ai visité le temple du Mont Dai-byaku-hô et j'ai rencontré maître Nyôjô avec qui j'ai finalement complété la grande tâche d'une vie entière de pratique. Après quoi, en 1228, je suis rentré au Japon, déterminé à répandre la vérité que j'avais découverte pour sauver tous les êtres. C'était comme si un lourd fardeau avait été placé sur mes épaules. Mais alors que j'attendais que des circonstances favorables m'entraînent en avant, je me suis dit que je pourrais passer quelque temps à aller de place en place, suivant le cours des événements, comme les sages anciens maîtres l'avaient fait. Mais il me semblait aussi qu'il pourrait y avoir des gens qui pratiquaient déjà Zazen avec sincérité et qui cherchaient ce qui est vrai, des gens qui ne couraient pas après la gloire ni ne voulaient obtenir quelque chose, et que ces personnes pourraient être égarées par des enseignants qui n'étaient pas authentiques, dont les enseignements les écarteraient d'une compréhension correcte de ce qui est vrai. Ils pourraient alors se tromper avec ces idées erronées et se prendre au piège de leurs propres illusions. Comment pourraient-ils alors renforcer leur capacité intuitive à savoir ce qui est vrai, et avoir la chance de pratiquer ce qui est vrai ? Si je ne faisais que vagabonder en attendant le moment approprié, où pourraient-ils trouver un véritable endroit de pratique ? Ceci me paraissait être une triste situation et c'est pourquoi je me suis décidé à jeter par écrit toutes les coutumes et critères que j'avais vécus au cours de mes visites aux monastères zen de Chine, avec les enseignements de mon maître, Tendô Nyôjô, que j'avais reçus et mis en pratique. Je laisserai donc ces écrits à ceux qui apprennent en faisant réellement les choses et qui trouvent facile de vivre dans la réalité, de sorte qu'ils connaîtront les véritables enseignements du Bouddha qui ont été passés d'une personne à l'autre. Il me paraît que cette tâche pourrait bien être d'une grande importance.
Comment se mettre en quête de la vérité : une interprétation moderne
[11] Lorsque les bouddhas, – c.-à-d. ceux qui vivent pleinement dans le présent – ayant pour chacun d'eux appris la vérité du Bouddha d'une personne réelle, réalisent ce qu'est la vérité, ils la réalisent par la meilleure méthode qui soit. Cette méthode, dans laquelle il n'y a aucune intention d'atteindre un but, est subtile, et ne peut être enseignée que par un bouddha à un autre bouddha. Elle n'en dévie jamais. Il s'agit d'une pratique qui équilibre l'actif et le passif, et qui remet en ordre le corps-et-esprit. La forme authentique de cette pratique, qu'on appelle Zazen, est de s'asseoir dans une posture redressée. Quoique nous soyons tous dotés de l'état naturel, si nous n'y revenons pas au moyen de cette pratique, on ne peut le voir, et si nous n'en faisons pas l'expérience, on ne peut pas se rendre compte de ce qu'il est. Il vient à nous et nous remplit aussitôt que nous abandonnons nos intentions, et ce n'est pas un état discriminant. Lorsque nous parlons, cet état s'exprime par notre bouche en toute liberté. Les bouddhas vivent dans cet état naturel et s'y maintiennent en n'y séparant pas la réalité en deux parties : une physique et l'autre mentale. Les gens qui ne séparent pas la réalité en deux sont des bouddhas. La façon que j'ai maintenant d'enseigner la vérité du Bouddha en est une qui permet de faire l'expérience réelle de toute chose telle qu'elle est, clairement, et nous accorde un état de plénitude qui nous apporte la vraie liberté. Quand vous vous serez débarrassés de tout ce qui vous entrave et trouverez cette vérité, alors ces paroles que vous lisez maintenant n'auront plus aucune pertinence.
[14] M'étant fermement déterminé à chercher la vérité du Bouddha, j'ai voyagé dans plusieurs régions du Japon pour rencontrer des maîtres dont j'espérais qu'ils m'aideraient dans ma quête. L'un d'eux était maître Myôzen, qui vivait au Kenninji. Je suis resté son élève pendant neuf ans, apprenant les enseignements de la lignée de Rinzaï. Maître Myôzen était le plus excellent des étudiants de maître Eisai, et il en avait directement reçu les enseignements de la vérité du Bouddha. Aucun des autres étudiants ne pouvait lui être comparé. Puis, j'ai été en Chine, cherchant d'Est en Ouest un bon enseignant, et j'y ai appris les traditions des cinq lignées qui pratiquent Zazen. Enfin, j'ai visité le temple du Mont Dai-byaku-hô et j'ai rencontré maître Nyôjô avec qui j'ai finalement complété la grande tâche d'une vie entière de pratique. Après quoi, en 1228, je suis rentré au Japon, déterminé à répandre la vérité que j'avais découverte pour sauver tous les êtres. C'était comme si un lourd fardeau avait été placé sur mes épaules. Mais alors que j'attendais que des circonstances favorables m'entraînent en avant, je me suis dit que je pourrais passer quelque temps à aller de place en place, suivant le cours des événements, comme les sages anciens maîtres l'avaient fait. Mais il me semblait aussi qu'il pourrait y avoir des gens qui pratiquaient déjà Zazen avec sincérité et qui cherchaient ce qui est vrai, des gens qui ne couraient pas après la gloire ni ne voulaient obtenir quelque chose, et que ces personnes pourraient être égarées par des enseignants qui n'étaient pas authentiques, dont les enseignements les écarteraient d'une compréhension correcte de ce qui est vrai. Ils pourraient alors se tromper avec ces idées erronées et se prendre au piège de leurs propres illusions. Comment pourraient-ils alors renforcer leur capacité intuitive à savoir ce qui est vrai, et avoir la chance de pratiquer ce qui est vrai ? Si je ne faisais que vagabonder en attendant le moment approprié, où pourraient-ils trouver un véritable endroit de pratique ? Ceci me paraissait être une triste situation et c'est pourquoi je me suis décidé à jeter par écrit toutes les coutumes et critères que j'avais vécus au cours de mes visites aux monastères zen de Chine, avec les enseignements de mon maître, Tendô Nyôjô, que j'avais reçus et mis en pratique. Je laisserai donc ces écrits à ceux qui apprennent en faisant réellement les choses et qui trouvent facile de vivre dans la réalité, de sorte qu'ils connaîtront les véritables enseignements du Bouddha qui ont été passés d'une personne à l'autre. Il me paraît que cette tâche pourrait bien être d'une grande importance.