A propos des ermites

Pour rebondir sur le début du sujet ( vous savez, il y a 70 posts...101 posts......)

la voie, qu'importe sa forme, ne peut être décidée par quiconque d'autre qu'un Maître, que l'on soit son propre-Maître est valable aussi.

Discuter de façon intellectuelle ou autres de la forme de la voie, de la manière de pratiquer, n'est possible que de la part d'un Maître accompli totalement (éveil vivant).

Mais un Maître ne devient pas ermite, un ermite devient Maître, car l'ermitage est une forme de pratique, un outil vers l'éveil. Tout comme l'est le monachisme, l'art......
Néanmoins, l'ermite étant censé être son propre-Maître, il est largement susceptible d'utiliser des croyances erronées ou pas afin de progresser vers le statut de Maître accompli, qu'il refusera certainement.
Bodhidharma était-il Maître avant de vivre en autodidacte/ermite, ou bien il l'est devenu en s'affranchissant de ses illusion/croyances/ignorances, à travers l'ermitage.

Peut-on alors pour autant autoriser ou conseiller à quiconque d'entrer en ermitage? Je ne crois pas.... Un débutant plein de vanités peut dans ces conditions croire qu'il est un demi-dieu, voire carrément un dieu sur terre, sujet à des hallucinations et à des vanités assez solides pour l'empêcher à vie de pratiquer correctement.

Il y a donc des paliers, et des personnes plus susceptibles d'atteindre certains paliers que d'autres. Et seul un Maître véritable peut déceler ces paliers et ceux qui les ont atteints.

Alors parlons-nous de tout ça, qui nous dépasse.

Voila une raison très difficile à résoudre: "Qui est maître, qui ne l'est pas? "

Mais alors sait-on de quelle pratique parlais Shen Houei quand il disait : une pratique utile pour les esprits peu doué.
C'etait
déja de la méditation associé à des sortes de koans plus anciens, ou
des entretients avec le maître ou autre chose de perdu ?

Il parlait de la pratique habituelle qui avait cours dans l'école du nord et qui consistait à rester assis en zazen en étant suffisamment concentré pour éviter l'apparition des pensées. Il n'y avait pas de kôans à cette époque. Ils sont apparus tardivement parce que le zen tendait à se détériorer, soit il devenait trop intellectuel, soit il consistait à s'abîmer en samadhi. Dans les deux cas, l'esprit zen était dévoyé. Les kôans ont été inventé pour retrouver l'esprit original des patriarche.

Concernant l'assise en méditation (zazen), voici ce qu'on peut lire dans le sutra de l'estrade (Hui neng) :
"Amis éclairés, que signifie "être assis en dhyana" ? Selon cette porte du Dharma, être libre de tout obstacle, rester étranger à tout état bon ou mauvais et sans que les pensées ne s'élèvent, c'est ce qu'on appelle "être assis", la vue de notre nature propre sans turbulence, c'est ce qu'on appelle dhyana."
Mais Hui neng poursuit :
"Prétendre qu'il faut juste rester assis continuellement sans bouger, c'est seulement imiter Sariputra qui était assis tranquillement au milieu de la forêt et fut moquer par Vimalakarti. Amis éclairés, d'autres enseignent qu'il faut rester assis en regardant l'esprit et en contemplant la pureté sans remuer et sans qu'aucune pensée ne se lève. D'après eux, c'est là le véritable accomplissement. Les ignorants n'y comprennent rien, ils s'en saisissent et deviennent fous. De tels cas sont nombreux. Un tel enseignement est erroné".

Concernant le point de vue de Shen Houei, voici ce qu'on peut lire dans ses entretiens :
Question : Comment, par des exercices qui durent l'instant d'un ksana, obtient-on de devenir un bouddha ?
Réponse (de Shen Houei) : Si l'on parle d'exercice, cela veut dire dharma (phénomène) fabriqués (samskrta), cela relève de l'impermanence (anitya) et l'impermanence ne se sépare pas de la production et destruction.
Q : C'est en accumulant les bons fruits par des exercices que tous les Bouddhas obtiennent d'accomplir le Chemin. Or, vous dites qu'il n'est pas nécessaire d'avoir recours aux exercices, est-ce croyable ?
R : Les exercices, même pratiqués avec foi, ne se séparent pas de la connaissance et de l'Eveil. Du moment qu'il y a connaissance et Eveil, même s'il y a activité de rayonnement et de sapience, de tels causes et fruits ne sont rien d'autre que production et destruction : ils n'existent pas foncièrement. Pourquoi donc avoir recours aux exercices ? Ceux qui partent du principe absolu, parviennent rapidement au chemin. Ceux qui cultivent les pratiques externes y parviennent lentement. Ces pratiques sont bonnes que pour les gens de petite faculté qui, ne peuvant s'élever en une fois à la délivrance, cherchent à y parvenir graduellement. Un tel effort est utile pour s'avancer en sainteté mais, du moment que l'on voit, les pratiques deviennent inutiles.

D'après ce qu'on peut lire, dans le sutra de l'estrade de Hui neng, la méditation assise zazen consiste à être libre d'attachement avec la vue dans notre nature propre. Ce n'est pas un exercice qui part de l'ignorance pour aboutir à cela. C'est cela. En faire un exercice, un moyen, c'est se tromper. L'idée est reprise dans les propos de Shen Houei. Dôgen ne dit fondamentalement pas autre chose. Le problème, c'est quand on en fait un moyen, un exercice, une pratique distincte de ce qu'elle exprime fondamentalement (dans le sens que souligne Hui neng).

Il est difficile, pour un esprit "peu doué", de s'asseoir en ayant la vue juste et en étant non troublé. Aussi va-t-il avoir recours à tout une série d'exercices pour amener son esprit à la tranquillité. Ce n'est pas la pratique de Hui neng et ce n'est pas le zen au sens de Hui neng. Le fait que le zen ait perdu son esprit originel (cette façon dont Hui neng décrivait l'assise en méditation) a nécessité l'introduction des kôans. Ce qui ne signifie pas que tout le monde a besoin des kôans pour voir dans sa vraie nature et ne pas être troublé. Mais de telles personnes sont extrêmement rares.

merci pour vos réponses !