Pour expliquer ceci, maître Ekaku du Mont Roya écrivit ce qui suit:
______Quelle merveille, les bouddhas dans les dix directions!
______En essence, ce sont des fleurs dans nos yeux.
______Et si on veut savoir quelles fleurs on a dans les yeux,
______En essence, ce sont les bouddhas dans les dix directions.
______Mais si on tente d'analyser ce que sont les bouddhas dans les dix directions,
______Ils sont différents des fleurs dans nos yeux.
______Et si on tente d'analyser ce que sont les fleurs dans nos yeux,
______Elles sont différentes des bouddhas dans les dix directions.
______Lorsqu'on comprend cela clairement,
______On réalise que le concept “bouddhas dans les dix directions” nous induit en erreur.
______Si on ne comprend pas cela clairement,
______Les bouddhistes intellectuels en danseront de joie
______Et les bouddhistes matérialistes se mettront à se maquiller!
Rappelez-vous, ceci ne signifie pas que les
bouddhas dans les dix directions ne sont pas réels. Cela signifie qu'ils sont, en essence, juste des fleurs dans nos yeux. L'endroit où les bouddhas dans les dix directions existent est dans nos yeux.
12 Et les bouddhas dans les dix directions n'existent pas ailleurs que dans nos yeux. Le fait qu'ils ne soient que des fleurs dans nos yeux ne signifie pas qu'ils n'existent pas, ou qu'ils existent effectivement; il ne signifie pas qu'ils ne sont pas substantiels ou non-réels. Ils sont de par leur nature juste les bouddhas dans les dix directions.
Or, si on tente d'analyser les bouddhas dans les dix directions, ils sont complètement différents des fleurs dans nos yeux. Lorsqu'on analyse, les fleurs dans nos yeux sont complètement différentes des bouddhas dans les dix directions. Les fleurs dans nos yeux et les bouddhas dans les dix directions à la fois
comprennent ceci clairement et
ne comprennent pas ceci clairement.
Vouloir savoir et
être différent de sont tous deux des merveilles de la réalité; c'est réellement merveilleux! Le sens fondamental des fleurs dans l'espace et des fleurs par terre dont parlent les bouddhas et les patriarches est "
donner libre cours aux façons élégantes."
13Même si des enseignants de textes et de commentaires bouddhiques peuvent comprendre le concept de
fleurs dans l'espace, il leur est impossible d'avoir les moyens ou l'expérience pour réaliser à quel point les fleurs par terre sont cruciales, à moins de pratiquer Zazen. Seul qui réalise à quel point les fleurs par terre sont cruciales peut transcrire l'état des patriarches bouddhistes en paroles.
Le maître zen Sekimon Etetsu vivait dans la Grande Chine de la dynastie Song dans un temple sur le Mont Ryozan. Un jour, un moine lui demanda: "
Qu'est-ce que le 'joyau dans la montagne'? Ce qu'il demande en fait, c'est, "Qu'est-ce que le Bouddha?" ou "Qu'est-ce que la vérité?"
Le maître répond: "
Des fleurs dans l'espace s'épanouissent par terre. Dans tout l'ensemble de ce pays, il n'y a pas de portail pour notre quête de la vérité."
D'autres descriptions des fleurs dans l'espace ne pourront jamais rivaliser avec ceci. Les enseignants ordinaires, qu'on peut trouver partout, en discutant du sens de l'expression
fleurs dans l'espace, disent seulement que les fleurs apparaissent dans l'espace et disparaissent dans l'espace. Aucun d'eux ne comprend le sens de
dans l'espace, de sorte qu'ils ne peuvent comprendre le sens de
par terre. Seul maître Sekimon comprend la situation réelle.
Tous les événements ont lieu
par terre; c'est là qu'ils se déploient. Juste à cet instant même, il y a un vaste terrain sur lequel tout se déploie; tout s'ouvre sur ce vaste terrain. Les mots "
A travers tout ce pays, il n'y a pas de portail pour notre recherche de la Vérité ne signifient pas que, puisqu'il n'y a pas de portail, nous soyons incapables de chercher la vérité; ils signifient que, lorsque nous cherchons la vérité, il n'y a pas de barrière. Les fleurs dans l'espace s'épanouissent par terre, et ce vaste sol dépend lui-même de l'épanouissement des fleurs.
Le principe qu'il nous faut reconnaître est que le sol et l'espace tout à la fois sont des fleurs dans l'espace qui se déploient.
Shôbôgenzô Kuge
Prêché en public au temple Kannon Dori Kosho Horin-ji
le 10 mars 1243.
Cette interprétation complétée par Eido
le 18 novembre 2007.
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12 C'est-à-dire, notre représentation intérieure du monde extérieur.
13 “Rêves disparus à jamais, rêves réalisés. Se retenir et lâcher prise, nous donnons libre cours aux façons élégantes” – poème de maître Tendô Nyôjo.
© 2007 by Michael Eido Luetchford