La discussion sur le Zen de Deshimaru m'a fait penser à une autre expérience personnelle.
Nous connaissons la parole des maîtres la plupart du temps par écrit. Qu'il s'agisse du Bouddha lui-même, de Vasubandhu, Nagârjuna, Asvaghosa, de Bodhidharma, de Huineng, Dongshan Liangjie, Shitou Xijian, Yaoshan/Yakusan, Furong Daokai ou de Tiantong Rujing, ou encore de Dôgen, de Nishijima ou de Deshimaru, la tentation est grande d'extrapoler à partir de ce qu'on lit sur des bases erronées. Il suffit parfois d'une virgule mal placée (ou non lue), d'un mot au sens difficile ou multiple mal interprété, en plus du placage de nos propres affects sur ce qu'on lit pour partir en vrille de façon irrémédiable.
Même lorsqu'on entend ces mots de vive voix, la possibilité existe pour la mésinterprétation. A plus forte raison lorsqu'il s'agit de mots lus.
J'en avais fait l'expérience avec Nishijima à propos de son interprétation des Quatre Nobles Vérités. Alors que l'ensemble de ce que je lisais de lui me parlait profondément, je butais sur cette interprétation iconoclaste. Lorsque je l'ai rencontré en personne, quelques années plus tard, j'en ai discuté avec lui, pour me rendre compte qu'en fait, il en avait exactement la même vision que moi. Et ce nest qu'ainsi que j'ai pu voir que ce que je lisais ne s'opposait pas à ce que j'avais compris, bien au contraire.
Il en va de même pour beaucoup de nos communications où, même de vive voix, nous pouvons nous enferrer sur le sens que l'un donne à un mot, l'autre en ayant acquis un sens erroné. Prenons, par exemple, l'expression anglaise "cool".
Peu de gens se rendent compte, même parmi les anglophones, qu'elle veut dire, d'abord et avant tout "frais", au propre et au figuré (comme dans l'expression "recevoir quelqu'un fraîchement"). Je connais des chansons anglaises des années '60 où l'on parle d'une fille qui est "cool" et où le sens est clairement qu'elle est froide, qu'elle ne montre aucune chaleur humaine.
L'expression s'est développée dans les années '70 à propos surtout des cheveux longs et de la mode hippie. Les jeunes dont les parents gardaient leur sang-froid (cool) en voyant leur progéniture adhérer à la mode contestataire disaient d'eux qu'ils étaient "cool". Parce que pour ceux qui s'emportaient, devenaient tout rouges, criaient, menaçaient en voyant leur fils porter les cheveux longs, c'était "chaud". C'est ainsi que, petit à petit, le mot "cool" a fini par prendre le sens que nous lui donnons.
Mais attention, en anglais, il a désormais un double sens. Sens figuré de fraîcheur pour l'opposer aux moment où c'est "chaud", et sens normal de fraîcheur au plan température.
Cela ne simplifie rien...
Nous connaissons la parole des maîtres la plupart du temps par écrit. Qu'il s'agisse du Bouddha lui-même, de Vasubandhu, Nagârjuna, Asvaghosa, de Bodhidharma, de Huineng, Dongshan Liangjie, Shitou Xijian, Yaoshan/Yakusan, Furong Daokai ou de Tiantong Rujing, ou encore de Dôgen, de Nishijima ou de Deshimaru, la tentation est grande d'extrapoler à partir de ce qu'on lit sur des bases erronées. Il suffit parfois d'une virgule mal placée (ou non lue), d'un mot au sens difficile ou multiple mal interprété, en plus du placage de nos propres affects sur ce qu'on lit pour partir en vrille de façon irrémédiable.
Même lorsqu'on entend ces mots de vive voix, la possibilité existe pour la mésinterprétation. A plus forte raison lorsqu'il s'agit de mots lus.
J'en avais fait l'expérience avec Nishijima à propos de son interprétation des Quatre Nobles Vérités. Alors que l'ensemble de ce que je lisais de lui me parlait profondément, je butais sur cette interprétation iconoclaste. Lorsque je l'ai rencontré en personne, quelques années plus tard, j'en ai discuté avec lui, pour me rendre compte qu'en fait, il en avait exactement la même vision que moi. Et ce nest qu'ainsi que j'ai pu voir que ce que je lisais ne s'opposait pas à ce que j'avais compris, bien au contraire.
Il en va de même pour beaucoup de nos communications où, même de vive voix, nous pouvons nous enferrer sur le sens que l'un donne à un mot, l'autre en ayant acquis un sens erroné. Prenons, par exemple, l'expression anglaise "cool".
Peu de gens se rendent compte, même parmi les anglophones, qu'elle veut dire, d'abord et avant tout "frais", au propre et au figuré (comme dans l'expression "recevoir quelqu'un fraîchement"). Je connais des chansons anglaises des années '60 où l'on parle d'une fille qui est "cool" et où le sens est clairement qu'elle est froide, qu'elle ne montre aucune chaleur humaine.
L'expression s'est développée dans les années '70 à propos surtout des cheveux longs et de la mode hippie. Les jeunes dont les parents gardaient leur sang-froid (cool) en voyant leur progéniture adhérer à la mode contestataire disaient d'eux qu'ils étaient "cool". Parce que pour ceux qui s'emportaient, devenaient tout rouges, criaient, menaçaient en voyant leur fils porter les cheveux longs, c'était "chaud". C'est ainsi que, petit à petit, le mot "cool" a fini par prendre le sens que nous lui donnons.
Mais attention, en anglais, il a désormais un double sens. Sens figuré de fraîcheur pour l'opposer aux moment où c'est "chaud", et sens normal de fraîcheur au plan température.
Cela ne simplifie rien...