(suite)
Ne voyez-vous pas que si le vieux Vimalakîrti avait laissé la vie de famille, il pourrait rencontrer quelqu'un de bien mieux que Vimalakîrti: c'est-à-dire le bhiksu Vimalakîrti. Aujourd'hui, nous pouvons à peine croiser [des bhiksus] comme Subhûti,* Shâriputra,* Manjushrî et Maitreya,* mais nous ne croisons jamais la moitié d'un Vimalakîrti. Combien moins encore en pourrions nous croiser trois, quatre ou cinq? Sans croiser ou connaître trois, quatre, ou cinq Vimalakîrtis, il nous est impossible de rencontrer, connaître un Vimalakîrti, ou maintenir son état et nous appuyer dessus.*
N'ayant jamais maintenu l'état d'un Vimalakîrti et ne nous étant jamais appuyé dessus, nous ne rencontrons pas Vimalakîrti comme Bouddha. Si nous ne rencontrons pas Vimalakîrti comme Bouddha, alors Vimalakîrti comme Manjushrî, Vimalakîrti comme Maitreya, Vimalakîrti comme Subhûti,* Vimalakîrti comme Shâriputra, et ainsi de suite, ne sont pas possibles. Combien moins encore pourrait-il en être de Vimalakîrti comme montagnes, rivières, et la Terre, ou Vimalakîrti comme herbe, arbres, tuiles et cailloux; vent, pluie, eau et feu; passé, présent et futur; et ainsi de suite.
La raison pour laquelle une telle clarté et de telles vertus ne sont pas visibles en Vimalakîrti est qu'il n'a pas quitté la vie de famille. Si Vimalakîrti avait quitté la vie de famille, de telles vertus seraient présentes en lui. Les "Maîtres Zen" et leurs semblables, à l'époque des dynasties Tang et Song, comme ils ne sont jamais arrivés à ce principe, ont négligemment cité Vimalakîrti, considérant que ce qu'il faisait était juste et disant que ce qu'il disait était juste. Ces minables, de façon pitoyable, ne connaissent pas l'enseignement oral, et sont aveugles au Bouddha-Dharma. De plus, nombre d'entre eux sont allés aussi loin qu'à considérer et dire que les paroles de Vimalakîrti et de Shâkyamuni se valent.
Encore une fois, ceux-là n'ont jamais connu, ni considéré, le Bouddha-Dharma, la vérité des patriarches, ni même Vimalakîrti lui-même. Ils disent que le silence de Vimalakîrti en s'adressant aux bodhisattvas* était le même que celui du Tathâgata pour enseigner aux gens. C'est là être grossièrement ignorant du Bouddha-Dharma. On peut dire d'eux qu'ils n'ont aucune capacité pour apprendre la vérité.
Le discours du Tathâgata est, bien évidemment, différent de celui des autres, et son silence ne peut en aucun cas être le même que celui des autres. Cela étant, le silence total du Tathâgata et le silence total de Vimalakîrti ne méritent même pas d'être comparés. Quand on examine la capacité des minables qui ont conçu cela, même si les enseignements oraux étaient différents, même si les silences pouvaient se ressembler, ceux-là ne méritent même pas d'être considérés comme étant proches du Bouddha. Il est triste qu'ils n'aient jamais fait l'expérience des sons et des formes. Combien moins pourraient-ils avoir fait l'expérience de la clarté qui surgit du plus profond des sons et de la forme? Ils ne savent même pas qu'ils devraient apprendre le silence en silence, et ils n'entendent même pas qu'il existe. En général, même parmi les divers types, il y a des différences dans le mouvement et l'immobilité; comment peut-on dire que Shâkyamuni et divers types sont les mêmes, ou comment pourrions-nous en discuter comme étant dissemblables? Les gens qui n'apprennent pas le Bouddhisme dans le Saint des saints d'un patriarche bouddhiste s'engagent dans de telles discussions.
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空生 (KÛSHÔ), litt., "né de la vacuité," est une épithète chinoise de Subhûti qui, parmi les dix grands disciples du Bouddha, fut dit être le mieux avancé dans la compréhension de la shûnyatâ (l'état qui est comme la vacuité).
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Lui aussi l'un des dix grands disciples. la liste complète en est: Shâriputra, Maudgalyâyana, Mahâkâshyapa, Aniruddha, Subhûti, Pûrna, Kâtyâyana, Upâli, Râhula et Ânanda. Subhûti et Shâriputra sont cités en exemple de moines qui vivaient à l'époque du Bouddha historique.
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Manjushrî et Maitreya sont des moines-bodhisattvas légendaires qui apparaissent dans la suite du Bouddha dans les sûtras Mahâyana tels que le Sûtra du Lotus.
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Voir aussi la discussion sur les trois ou quatre lunes concrètes et l'unique lune conceptuelle du chapitre 42, Tsuki, parag. [10]
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善現 (ZENGEN), litt., "bien manifeste," ou "sain d'apparence," sont des approximations du sens sanscrit de Subhûti, qui signifie bien-être.
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Le Vimalakîrti Nirdesa Sûtra raconte comment Vimalakîrti a tenté de réfuter des moines de l'ordre du Bouddha à partir du point de vue de la Shûnyatâ.