Ah, le sujet!
On voit bien que le zen est sacrément malade de lui-même dans tout ça!
Au fait, on parle encore de trucs genre pratique spirituelle, trouver la liberté, le bonheur, arrèter d'en chier de la souffrance humain existentielle qu'elle fait mal et qu'on veut trouver comment que ça fait quand ça arrète de faire mal tout ça tout ça, hein?
Non.
A la place, on se prend le bourrichon à évaluer qui a la plus grosse qu.....réalisation spirituelle quantifiable en sortant son cv avec ses heures de dojos sesshins samu cotisation annuelles mensuelles et autres fuse d'ordination et d'achats commerciaux internes (fringues chics pour se faire ordonner, car c'est connu qu'un kimono kolomo c'est indispensable à manifester l'esprit d'éveil dans la souffrance du monde moderne, etc etc...)
Voilà ce qu'on a fait du zen en France, et c'est super cool, les gens qui arrivent comme Hector, ça leur donne une telle douche froide d'enthousiasme à l'envers!...
C'est pour ça que le zen en France ne me donne pas envie : on en a fait une église, avec des querelles de chapelle, tellement on ne peut plus accepter les différences et la diversité des êtres : l'uniformité c'est tellement plus rassurant quand la seule ambition des responsables c'est de rester responsables, avec leurs petits privilèges!
Comment, en ce cas, prétendre transmettre quoi que ce soit en faisant des ordination à tour de bras, alors qu'en même temps la grande peur c'est d'avoir face à soi des petits jeunes compétents et capables, qui pourraient faire la même chose?
Un jour, Roland a dit cela texto dans la cuisine à Nice (je le dis toujours, la cuisine est le haut lieu de la transmission, c'est là que j'ai entendu souvent les trucs les plus marquants!) : que ce qu'il craignait le plus c'est que quelqu'un fasse aussi bien que lui ce qu'il sait faire.
Au moins il l'a honnètement dit. Après, faut prendre acte : soit on forme les gens, jusqu'au bout, soit un crée un troupeau de moutons bèlants qui bavent devant le Maîiiiitre, et là c'est mal barré en terme d'éveil!
Et tout ce que je lis là me fait mal aux tripes.
Je me rappelle, ma première journée de zazen, avec Ph. Coupey. En 1995.
A une question de mondo sur les rapports avec le Japon, il avait dit qu'il faudrait s'y remettre pour des raisons politiques. Au moins c'était clair.
Ensuite, quand au début des années 2000, c'était la course au shiho chez tous les godos car il fallait se normaliser aux nouvelles normes du contrôle qualité zen2000AZI, P.Coupey a été le seul à chercher et trouver un vrai disciple de Kodo Sawaki pour garder justement une cohérence avec l'enseignement de Deshimaru, et je pense rester fidèle à sa démarche d'indépendance avec la soto shu.
D'ailleurs, Kishigami semble avoir ce vrai côté moine trad japonais : il a dit lui-même, suite à la mort de Kodo, qu'il ne pouvait plus reconnaître de maître, à part la nature et zazen. Position claire, radicale, à la fin ça ressemble à du Kodo Sawaki. D'ailleurs, je pense que reconnaître la nature comme maître ferait un bien fou à tous les godos azistes, je crois que ça leur manque gravement. Personnellement ça m'aide à justement relativiser tous ces délires de construction sur ce que devrait être le vrai ou pas vrai zen, et arrèter de penser qui est légitime et quand, comme si l'on pouvait se targuer de cette prétention à j(a)uger les gens selon des critères superficiels, alors qu'en fait on ne les connaît pas vraiment, ni ne les écoute.
J'ai été lourdé du système, mais que ça m'a ouvert les yeux sur cet esprit normatif, qui en plus se croit libre des normes et conventions!..quelle schizophrénie!
J'aimais bien Philippe, car je le trouvais justement un peu dérangeant avec les autres, il acceptait d'aller là où personne ne le voulait, et ne faisait pas de concessions.
Mais ce que je lis ici me confirme ce que je ressentais : il aurait mieux fait, comme d'autres genre Roland, de quitter l'AZI pour arrèter de ce laisser réduire par ce groupe normatif qui se comporte maintenant comme une église qui croit être une référence...alors qu'en fait ils sont une référence uniquement pour ceux qui en font partie (leur crédibilité auprès des autres communautés est fort faible, faut dire quand on reste entre soi et qu'on ne crée aucun dialogue, et qu'on croit détenir une vérité, et qu'on ne se contente que de noyauter les institutions officielles sans vouloir aller plus loin que sièger dans le trône, et bien au final, on n'est plus qu'entre soi dans son clan fermé...alors qu'une démarche dynamique, veut dire créer des liens et les faire vivre dans le temps).
Bref, tout ça pour dire qu'il faut arrèter avec ces discours sur qui est prèt ou pas.
Si l'on prétend mener une vraie relation d'enseignant à enseigné, alors on l'assume en tant que tel des deux côtés...sinon les gens qui prétendent savoir mieux qu'un autre qui il est, c'est peut-être mieux qu'ils apprennent à se taire et d'abord se mener eux-mêmes....mais quand on s'ennuie dans un circuit fermé, on n'a plus qu'à essayer d'étendre son pouvoir sur ce qui se présente-là!
Au lieu d'être reconnaissant de la présence de qui est là, même une fois par mois ou par semaine, on le regarde comme un être insuffisant, insuffisamment là...mais là, c'est le besoin de qui dont il s'agit?
Si quelqu'un paye, et bien il peut être là, le temps qu'il veut. Point. Liberté républicaine, paiement contre service, tout le reste c'est une fabrication mentale. Les règles du dojo sont soumises au droit français, faudrait ne pas oublier cela aussi.
Ensuite, conditionner une ordination à un paiment non assumé, ça s'appelle une relation de pouvoir ou du chantage....bien sûr, c'est mieux de payer ces dettes.
Mais l'on peut différencier les problèmes : la motivation pour une ordination est une chose, avoir ds paiements en retard une autre....l'on peut traiter les problèmes sur leurs plans respectifs, et ne pas bloquer un processus parce que l'autre est en panne. Cela s'appelle savoir discuter. J'ai connu le temps où les gens qui avaient une galère financière pouvaient trouver un arrangement avec le responsable, certains pouvaient donner du temps de samu s'ils n'avaient pas d'argent. Mais aujourd'hui, faire rentrer du cash semble devenu un certain mot d'ordre dans certains dojos.
Pour cela, dans certaines autres structures, on préconise que les gens pratiquent chez les uns les autres.
Là, pas de loyer, pas de taxe habitation, pas tous ces frais qui vont mettre la pression sur les finances du groupe qui finit par chercher des payeurs plus que des pratiquants.
Après, le coup du zendo de Metz, j'avais vu, et je trouve ça très intéressant : l'affranchissement du pouvoir central. Il serait largement temps.
Qui savait qu'à Avallon, il y avait le groupe mené par Francis et Josiane Baudart, Francis ayant aidé Deshimaru à trouver son premier temple au Moulins de Soeuvres près d'Avallon?
Ils sont restés des années sans être listés sur les dojos AZI, mais assumant la continuation du zen de Deshimaru.
D'ailleurs, quand j'ai vu la grange dans laquelle il se faisait zazen, je me suis dit que ça dénotait sérieusement des fastueuses maisons du Dana que JPF et OWG construisent pour des sommes se montant à plusieurs centaines de milliers d'euros, pour simplement montrer le vrai zen. On pratiquait sans luxe, sans chichis, sans montrer des brillants.
Toujours est-il que Francis et Josiane n'ont jamais eu de remontrances face à leur indépendance....peut-être le fait qu'ils aient financé l'enduit du nouveau batîment de la Gendro leur a donné droit à une certaine respectabilité qu'autrement ils n'auraient eue???? Bon, je dois être mauvaise langue...mais je pense que malheureusement, ça marche comme ça, et j'ai mis trop de temps à l'admettre alors que j'étais à l'intérieur de tout cela : quand on est bien né, qu'on a du pognon et un statut social, et bien on est bien plus respecté, on monte plus vite l'échelle hiérarchique interne, et ce en dépit bien souvent de la réalisation spirituelle réelle.
Bref, féodalisme disait Yudo?
On y est en plein, à mon sens, et il serait temps pour certains à ouvrir les yeux sur la prégnance de ce modèle dans nos psychologies, et de voir que dans le zen soto occidental, cet héritage historique de notre monde résonne en plein avec celui du monde japonais, et que la spiritualité n'est plus qu'un prétexte à mettre en place une structure qui rassure tout le monde, mais en fait n'éveille personne.
C'est juste troquer une cage contre une cage dorée, et se payer de mots d'un discours qui parle d'un éveil qui n'est pas pratiqué.
Et comme disait une copine italienne, après s'être faite tabasser en vrai à coups de poing dans la figure par une shihotée de Fausto en Italie car elle en a eu marre d'être traité comme un boy de son maîmaître, et qu'elle a fini par lui dire qu'elle ne se maîtrisait pas, "nello zen, si predica bene, ma si pratica male"..."Dans le zen, on prèche bien, mais on pratique mal".
Donc, Ancestral, si pour toi le maître c'est Kishigami, personne ne peut choisir pour toi.
Mais je vois que le discours politique de l'AZI a bien fonctionné, ça me rappelle une femme qui fréquentait Avallon, qui voulait se faire ordonner, donc devait trouver un godo azédique, et me disait : "le problème c'est que pour me faire ordonner nonne, il faut que je choisisse un maître!".....
Voilà : on en a fait une transaction, en échange d'une relation d'allégeance exclusive, on a son susucre ordinatoire. C'est juste malhonnète.
Il y a vingt ans, on demandait et on avait.....faut dire, comme la concurrence était là, c'était donné, sinon on prenait ailleurs...à l'époque, les divergences entre godos étaient moins marquées, donc c'était plus facile d'aller ailleurs....Et perso, m'être fait ordonné par Roland ne m'a jamais empèché de faire des sesshins avec d'autres, je n'ai jamais pensé cela en terme exclusifs. Mais aujourd'hui cela semble le cas.
Donc, et bien je dis aux gens qui se prennent la t^te avec ça, qu'il fassent semblant, autant qu'on joue des jeux face à eux : les godos, quand ils ordonnent, sont des administratifs du dharma. Après, la relation maître disciple devrait être relativisée et on ne devrait même plus en parler comme on en parlait avant : le monde a changé, les enjeux ont changé....cela devrait être pensé, réfléchi et discuté. Quand j'entends parler de relation maître-disciple, en fait l'on parle de représentations et de mythes, cela n'est pas bien réel, au-delà du fantasme...mais fantasme qui sert certains!
D'ailleurs, combien, parmi les disciples qui ont duré, reconnaissent encore de vrais maîtres parmis ceux qui endossent ce titre? Je crois pas tant que ça.
Et je ne parle même pas de ceux qui ont connu Deshimaru, qui, pour la plupart, on du mal à reconnaître comme maître ceux qu'on voit se parer de ces atours aujourd'hui.
Mais bon, je vais m'en arrèter là cette longue diatribe.
Je vois simplement que le problème est loin d'être épuisé et règlé, et que le zen soto en France est malade de ses propres ambitions à représenter quelque chose, et à fabriquer trop d'illusions pour ce faire, au lieu de se centrer sur l'objet premier de son existence : enseigner une pratique pour aider tout le monde à se sortir de l'ornière de la souffrance sous tous ses aspects, dans un esprit d'ouverture, de partage, et de tolérance.