Gigi a raison de croire que là où on s’assoit pour faire zazen c'est le dojo de ici et maintenant.
Le Dhamma est partout, mais encore faut-il l'actualiser...
Donc pratiquer.
Anshu a écrit:Pax a écrit:Bonjour,
Y en a t il qui pratiquent le zazen seuls chez eux car ils ne peuvent pas aller dans un dojo ? Comme c est mon cas.
Y arrivez vous ? Quelles sont vos difficultés ?
Arrivez vous a vous motiver ? A garder la régularité ?
Ca m intéresserait d échanger avec ceux dont c est le cas.
Merci
Pax
Bonjour,
J'ai passé plusieurs années complètement isolé à pratiquer zazen (moins régulièrement que maintenant), mais je me suis aperçu que je pouvais me perdre, m'égarer... et je n'arrivais pas à avoir une régularité dans mes méditations. Il m'est arrivé de dire " Bon pas pour aujourd'hui..."
Depuis je fais zazen chaque jour chez moi seul, je rejoins le groupe http://www.zen-occidental.net/pour des retraites et j'accueille quelques personnes pour une pratique hebdomadaire à mon domicile.
Nous avons besoin de soutien dans la pratique, nous avons besoin de "règles" pour méditer, et lorsque nous sommes seuls, le risque est de passer outre ces "règles" et d'accommoder notre méditation. Cela a été le cas en ce qui me concerne lorsque je suis resté isolé.
La pratique en commun permet de prendre soin de la méditation, des autres pratiquants. C'est un équilibre subtil dans lequel il ne doit pas y avoir d'allégeance au Maître, ni de lutte de pouvoir, ni de manipulation... Mais d'accord avec Yudo : "Si on dévie de l'épaisseur d'un cheveu, on se retrouve éloigné comme du ciel à la terre".Pax a écrit:Je crois que j ai oublié de vous demander si en plus de l assise vous lisez étudiez es ouvrages sur le zen ?
Merci de bien vouloir m aider
Pax
Il y a quelques années maintenant je me posais la même question cf : http://www.zen-occidental.net/faq3.html#Z3 depuis je lis les sutras, des livres sur le zen.
Mais à mon sens toutes ces lectures doivent être digérer, insérer, méditer par le corps, par la pratique. Cela ne doit pas rester une lecture intellectuelle.
En recommandation je peux citer :
- d'Eric Rommeluère :
"S'asseoir tout simplement - L'art de la méditation zen" un très bon livre d'Eric Rommeluère. Il est accessible facilement.
"Les Bouddhas naissent dans le feu" - Un livre qui incite à se jeter dans la voie de la Grandeur
"Le Bouddhisme n'existe pas" - A lire après les 2 autres à mon sens.
De Shunryu Suzuki :
"Esprit Zen, Esprit neuf" et "Libre de soi, libre de tout" 2 classiques qu'il ne faut pas louper.
De Bernie Glassmann :
"L'art de la paix" et "Comment accommoder sa vie à la manière zen" sont des livres enracinés dans notre société actuelle.
Les soutras :
Soutras de Vimalakirti - Soutras du filet de Brahmä - Soutras du Lotus - Soutra des 10 terres - Soutra de l'entrée à lanka. Tous les soutras sont à lire comme des épopées, il n'est pas nécessaire de tout comprendre, mais il faut se laisser porter et demander quelques clés à un enseignant.
Les mains jointes - Anshu
chifoumi a écrit:Bonjour,
Merci pour les références littéraires... j'avais commencé à lire "esprit neuf, esprit zen", cela m'incite à le finir, parmi la pile de livres qui m'attend .
Je suis bien d'accord qu'une pratique en groupe est profitable, mais que faire lorsque le dojo le plus proche est à 30 minutes de son domicile, et qu'on ne connait personne qui pratique zazen autour de chez soi...
Est-ce un prétexte ?!
Kaïkan a écrit:chifoumi a écrit:Bonjour,
Merci pour les références littéraires... j'avais commencé à lire "esprit neuf, esprit zen", cela m'incite à le finir, parmi la pile de livres qui m'attend .
Je suis bien d'accord qu'une pratique en groupe est profitable, mais que faire lorsque le dojo le plus proche est à 30 minutes de son domicile, et qu'on ne connait personne qui pratique zazen autour de chez soi...
Est-ce un prétexte ?!
Si le dojo est difficilement accessible on y va moins fréquemment c'est sûr.
Mais de toute façon il faut installer une pratique de zazen chez soi. Pourquoi le faut-il ? Parce que chez soi on ne dépend de personne et on doit tirer sur l'anneau de son nez pour se mettre courageusement sur le zafu.
Yudo a écrit:Et dans le style, je vous donne ma version française d'un texte de Brad sur le Zen et ce qu'il croit qu'il est en train de devenir aux USA. La comparaison est intéressante.
Brad Warner a écrit:Viande séchée de bête sauvage (Wild Beast Jerky) http://hardcorezen.info/wild-beast-jerky-2/6033
Publié par Brad le 10 octobre 2018
Voici une vieillerie qui est bonne et dont la re-publication semble appropriée aujourd'hui. Merci à Chris Burnham pour me l'avoir rappelée.
Bodhidharma dans un bon jour
J'ai aucune idée de ce qu'est le Zen ou de comment ça doit être.
Je ne sais pas ce qu'est un moine zen ou comment il faudrait les ordonner.
Je ne sais pas ce que veut dire être un "maître zen" ou même un enseignant de Zen.
Je ne saurais évaluer la valeur relative d'une manière de pratiquer par rapport à une autre, ou les résultats d'une forme de pratique sur ceux d'une autre. Je ne vois même pas l'intérêt d'essayer.
Je ne sais même pas ce que veut dire être un étudiant du Zen. C'est pourquoi je suis si confus lorsqu'on me demande à compter parmi mes étudiants.
Je n'essaie pas de me montrer difficile et "Zen" en disant tout ça. Je suis complètement à 100% sérieux et dépourvu d'ironie. Je suis sincère. Absolument.
Je peux parler un peu de ce que le Zen veut dire pour moi, peut-être. Pour moi, le Zen est comme une sorte de bête sauvage affolée avec de grands crocs et des griffes tranchantes. La tâche que je me suis assignée est de tenter d'apprivoiser cette bête pour faire en sorte de pouvoir dormir à côté dans la chaleur de sa fourrure avec un certain degré de confiance qu'elle ne va probablement pas décider de me mettre en pièces, de m'étriper, et de me manger.
Cette bête n'est pas un gentil minet ou un gentil chien-chien. Non seulement est-elle sauvage, mais elle est folle. Même si elle ne me tue pas cette nuit, elle pourrait le faire demain. Elle est totalement imprévisible.
Le consensus qui est en train d'émerger dans le Zen américain, d'autre part, me paraît une tentative de capturer cette bête, de l'anesthésier, de lui arracher griffes et crocs, et de lui faire engendrer une descendance apprivoisée sans crocs et sans griffes. Cette progéniture pourra alors être abattue, et leurs corps pourront être séchés et salés, puis emballés dans des feuilles de plastique avec dessus une photo de la bête oroginelle et les mots "Viande séchée de bête sauvage" en rouge feu et un slogan dessous qui dirait, "Pourrez-vous dompter la bête sauvage?"
Veuillez comprendre que je ne suis pas en train de tenter de décrire tous les maîtres, tous les centres et toutes les expériences zen qui se déroulent dans les cinquante états américains et leurs territoires et possessions. je décris ce que je vois émerger de l'agrégat de consensus qui est en train de prendre rapidement forme lors des rencontres ou des représentants auto-sélectionnés du Zen américain se rencontrent pour discuter de ce qu'ils croient que devraient être leur création. Et le fort consensus que j'observe en est un de "la standardisation est la bonne direction". Parce que la standardisation est plus sûre et plus cohérente. C'est ce qui a fait le succès de McDonald's. Ils offrent peut-être pas le meilleur hamburger du pays, mais partout où vous allez, ç'a exactement le même goût et c'est moins susceptible statistiquement de vous filer la courante.
La façon dont je comprends les débuts de ce que nous connaissons maintenant comme les formes monastiques de la pratique du Zen est comme suit: D'abord il y a eu le premier petit groupe qui s'est formé autour du Bouddha en Inde. Une partie de ce que nous faisons aujourd'hui en dérive. Ils ont organisé leurs formes et pratiques monastiques au fur et à mesure.
Le Bouddha n'avait pas été le premier à tenter de découvrir les vérités les plus profondes en s'asseyant tranquillement et en les observant oeuvrer en dedans de lui-même. Plein d'autres l'avaient fait. L'innovation majeure du Bouddha a été de créer une méthode pour enseigner aux autres comment faire ce que lui-même avait fait, et transformer ce qui avait été une pratique individuelle en une pratique qui pouvait être menée en communauté avec les autres.
Il n'est pas parti pour organiser une religion, ni même un ordre monastique. Il s'est mis en route pour trouver la vérité pour lui-même. Une fois qu'il l'a eu découverte, il a commencé par penser qu'il serait inutile même d'essayer d'en parler à quiconque. Personne ne pourrait capter. La légende veut que le dieu Indra lui ait demandé d'enseigner aux autres ce qu'il avait appris. C'est pourquoi il a au moins essayé.
Avance rapide d'un millier d'années ou quoi, et nous voici arrivés à Bodhidharma. Bodhidharma était ce type grincheux qui voulait juste rester assis tout seul et découvrir la vérité. Il avait voyagé ver le nord de sa patrie en Inde, et s'était trouvé une caverne quelque part dans ce que nous appelons aujourd'hui la Chine. Il s'est assis dans sa caverne pendant neuf ans à méditer seul.
La rumeur s'est propagée qu'il y avait un bizarre qui restait assis dans sa grotte, et bientôt, quatre personnes — trois hommes et une femme — ont voulu se joindre à lui. J'aime à les imaginer se présenter timidement l'un après l'autre à la grotte et demander s'ils pouvaient s'asseoir avec lui. Bodhidharma était probablement tout aussi grognon et grincheux que dans les dessins et les statues qui le représentent. Il était probablement du genre, "Grrrr. D'accord. Asseyez-vous là. Et me faites pas chier ou je vous sors d'ici à coups de pieds au train!" Il leur a probablement fait nettoyer la place et faire d'autres trucs en échange de l'autorisation à rester.
C'est là la base d'absolument tout ce que nous faisons en pratique du Zen. C'est tout là, juste pour rendre possible de s'engager dans une pratique personnelle de la méditation dans un groupe. Rien d'autre. Tout ce qui ressemblerait à une tentative de standardiser les choses n'est là que pour s'assurer que la pratique de personne ne va gêner celle d'un autre. C'est tout. Nous sommes là pour nous soutenir mutuellement et rester à l'écart du chemin des autres. Les hiérarchies n'existent que pour faire en sorte que tout roule sans anicroche. Si c'est quoi que ce soit d'autre, ce n'est que des interférences inutiles.
Personne ne peut mesure la pratique d'un autre. OK, ils peuvent s'ils le veulent, mais c'est une perte de temps et d'énergie stupide. Quiconque vous raconte que votre pratique est meilleure ou pire que celle d'un autre n'a aucune idée de ce dont il parle. Quiconque vous raconte que vous avez réussi quelque chose ou résolu quelque chose ou manqué à réussir ou résoudre quelque chose ne fait que vous embrouiller. Il n'existe aucune raison au monde pour écouter ce genre de sottises.
Vos maîtres ne sont même pas des maîtres. C'est juste des personnes qui ont fait ce truc un peu plus longtemps. Ils travaillent sur le même sujet que vous. Vous pourrez parfois apprendre d'eux. Et parfois, vous feriez mieux de pas faire comme eux.
Je n'essaie jamais de rien enseigner à personne. Toute ma démarche est d'essayer d'en apprendre le plus que je peux sur zazen, et le rôle que j'ai d'être le type qui donne des conférences et des entrevues particulières durant les retraites et qui écrit des livres, m'aide à faire ça. Si d'autres que moi bénéficient de voir ça se produire, génial. C'est super. Mais je n'ai aucun message pour personne. Je n'exagère pas. Je le pense vraiment.
Un des aspects les plus brillants de la tradition zen, c'est que quiconque qui a été fait "maître" peut faire de quelqu'un d'autre un prêtre ou un "maître" de quelque manière qu'il le juge utile. Et personne n'a rien à y redire.
L'ordination de personne n'a à être approuvée par aucun comité ou organisation. Personne n'a rien à dire sur la quantité d'expérience que la personne ordonnée devrait avoir ou à travers combien de cerceaux bureaucratiques elle devrait sauter, à part l'enseignant de cette personne.
Pour moi, c'est absolument du pur génie. Certes, il y a quelques institutions religieuses et bureaucratiques qui se réclament du Zen, mais elles n'ont absolument pas plus de légitimité qu'un type quelconque qui déciderait par caprice que le type qu'il vient de croiser dans l'ascenseur mérite qu'on lui donne la transmission du Dharma.
Il y a tout un tas de types en Amérique qui aimeraient que ça change. C'est trop chaotique! C'est hors contrôle!
Mais selon moi, la nature chaotique et incontrôlable du système actuel, éprouvé par le temps, est précisément tout l'intérêt.
Par le passé, l'aspect le plus sauvage du Zen a toujours été autorisé à co-exister avec l'aspect institutionnel. On le comprend très bien en Extrême-Orient, que les grosses boîtes bouddhistes doivent leur existence même aux pionniers qui étaient totalement incontrôlés et dés-institutionnalisés. Je crains fort qu'en Amérique nous ne soyons en train de nous acheminer vers la destruction totale de cet aspect sauvage du Zen. C'est la façon américaine de faire. Pareil que ce que nous avons fait de nos traditions domestiques qui ont évolué de la même manière. Pareil que ce que nous avons fait de nos centre-villes et de nos restaurants à hamburgers indépendants.
Il me semble certain que ceux qui, en Amérique, veulent transformer tout ce chaos en Viande séchée de bête sauvage réussiront à terme. Et j'en suis très triste.Leurs descendants dans le Dharma se poseront en juges de ce qui ne peut être jugé, et le Zen américain tournera en rien d'autre que juste une autre religion institutionnelle de merde en belles robes et jolies cérémonies autour d'une coquille morte et vide de quelque chose qui jadis aurait pu être important.
Même là, j'entends continuer à me battre à mort jusqu'à la fin. Si vous voulez vous joindre aux perdants, vous avez mon soutien. Offrons leur au moins une bagarre dont ils se souviendront.