Tenza a écrit:
@Yudo,
Est-ce qu'au fur et à mesure de zazen, (donc être simplement là, rester attentif à nos pensées, observer leur va et vient..), naît une certaine compréhension en nous ? (même si je comprends qu'il ne faille pas tomber dans le piège de vouloir obtenir "quelque chose")
Tout cela fonctionne de façon typiquement paradoxale. Par exemple, il est évident qu'il faut une motivation de départ pour se mettre à la pratique. Et pourtant, dans la pratique, on recommande d'abandonner toute motivation! Cet "abandon de la motivation" ne signifie pas que la motivation de départ disparaît: de toute façon "abandonner la motivation" est bien plus facile à dire qu'à faire. Mais cela signifie qu'au fur et à mesure qu'on se désintéresse de l'objectif à quoi correspondait cette motivation, mais qu'on tient bon dans la pratique (du genre à se dire "pour le résultat, on verra"), des choses se passent qui ne se seraient pas passées si, trop tendus vers un but qui n'arrive pas on était passés à côté de ce qui était important.
De même, en se contentant de pratiquer l'assise, en se concentrant, non pas sur les pensées, mais sur ce qu'on fait à l'instant où on le fait, et plus pratiquement sur son corps, sa posture, sur la verticalité, sur l'étirement de la colonne vertébrale, sur la respiration, toutes choses pratiques, réelles; en étant attentif donc à ce qu'on est en train de faire, cela petit à petit, sans même qu'on en prenne conscience, se transpose dans le reste de la vie: vous vous brossez les dents, vous ne pensez qu'à vous brosser les dents. Vous conduisez, vous rectifiez votre posture pour être le plus alerte possible, vous posez votre regard là où vous voulez aller, vous mettez votre attention dans l'environnement de votre conduite. Ces transpositions se font de plus en plus naturellement, et cela implique que, à chaque fois que vous vous rendez compte que le turbinage de pensées dans votre tête vous distrait, vous dérange, vous revenez à ce que vous êtes en train de faire.
Alors, il arrive des moments, où un tout petit truc, qui serait passé totalement inaperçu sinon, attire votre attention. Car ce sont souvent les petits trucs qui sont importants. Et d'habitude, ils sont noyés dans un flot de trucs insignifiants mais qui prennent toute la place. Et le murmure qui vous dit les choses importantes était inaudible: là il commence à devenir plus clair, dans le silence, grâce au silence.
Pour ça, il faut, quand on pratique, ne jamais se préoccuper de "faire le vide", de "faire le silence intérieur" et autres projets admirables mais qui, de par le fonctionnement même de l'esprit deviennent inatteignables si on cherche à les atteindre.