Le concept d'éternité
Voici un concept très discuté, surtout lorsqu'on a commencé à enseigner les philosophes grecs au XIIIème siècle.
En contradiction avec l'église qui voit l'univers créé par Dieu, Aristote dit : "le monde est éternel".
C'est donc un débat très ancien et peut-être certains ont des idées sur ce sujet. En tout cas voici quelques petits renseignements :
Dans le langage religieux, en tout cas chrétien, il s’agit d’une soustraction à l’emprise du temps. À ce titre, elle n’a ni commencement ni fin, ces termes n’y ayant pas même de sens. Elle est donc à distinguer de l’immortalité, qui a un début et pas de fin. ∞
Dans la religion catholique, le temps est une création de Dieu au même titre que l'espace, et est lié à ce dernier.
Dieu est dit éternel puisque son existence [ou mieux : son être] n'a pas de commencement. Chez les protestants, on appelle souvent Dieu : l'Éternel. Ce mot permet de traduire la réponse de YHWH (iod hé vav hé) à Moïse : "Je suis celui qui est", c'est-à-dire la plénitude d'être, donc sans commencement ni fin.
Seuls peuvent admettre l'existence de l'éternité les philosophes qui, comme Aristote, saint Thomas, Descartes, Leibniz, mettent dans l'immobilité de l'acte pur et parfait l'idéal de l'existence. Il n'y a donc qu'une philosophie qui puisse admettre l'éternité, c'est une philosophie théiste et, dans cette philosophie, le seul être qui puisse être véritablement appelé éternel est Dieu. (G. Fonsegrive).
L'éternité n'est pas un lieu, mais plutôt un état, ou mieux encore un éternel présent.
Ces petites citations vont permettre de développer les positions de ceux qui voudront exposer leurs points de vue.Kierkegaard dans \"Le concept d'angoisse" a écrit:Qu'est-ce que l'instant ?
« Le temps est donc la succession infinie ; la vie vécue dans le temps et relevant simplement du temps n'a pas de présent. Sans doute, pour caractériser la vie sensible, l'on dit communément qu'elle est dans l'instant. On entend alors par instant l'abstraction de l'éternel, qui, si elle se donne pour le présent, en est la parodie. Le présent est l'éternel ou plutôt l'éternel est le présent, et le présent est la plénitude. C'est en ce sens que le latin disait de la divinité qu'elle est praesens, et en lui appliquant ce mot, il désignait en même temps son puissant secours.
L'instant désigne aussi le présent sans passé ni avenir ; c'est en cela que consiste l'imperfection de la vie sensible. L'éternel désigne aussi le présent sans passé ni avenir, et c'est en cela que consiste la perfection de l'éternel (...).
Ainsi compris l'instant n'est pas à proprement parler l'atome du temps, mais l'atome de l'éternité. Il est le premier reflet de l'éternité dans le temps, et pour ainsi dire sa première tentative de l'arrêter. C'est pourquoi les Grecs ne comprenaient pas l'instant, car, s'ils concevaient l'atome d'éternité, ils ne voyaient pas que l'éternité était l'instant ; ils ne la plaçaient pas en avant, mais en arrière ; car l'atome d'éternité était essentiellement pour eux l'éternité ; et de la sorte ni le temps ni l'éternité ne recevaient leur plein droit. La synthèse du temporel et de l'éternel n'est pas une nouvelle synthèse ; elle est une traduction de la première selon laquelle l'homme est une synthèse d'âme et de corps portée par l'esprit. Dès que l'esprit est posé, l'instant est donné. Aussi peut-on dire à bon droit de l'homme en manière de blâme qu'il vit uniquement dans l'instant, lorsqu'il vit ainsi par une arbitraire abstraction. La nature n'est pas dans l'instant.
Il en est de la temporalité comme du sensible, car elle semble encore plus imparfaite et l'instant encore plus chétif que le maintien en apparence assuré de la nature dans le temps. Et pourtant, c'est l'inverse ; car cette assurance de la nature se fonde sur l'absence de toute signification du temps pour elle. L'histoire ne commence qu'avec l'instant. La nature sensible de l'homme se trouve posée par le péché comme culpabilité ; elle est ainsi rabaissée au-dessous de celle de l'animal, et cependant justement parce qu'ici commence sa supériorité ; à ce point, en effet, l'esprit entre en jeu.
(...) L'instant est cet ambigu où le temps et l'éternité sont en contact, posant ainsi le concept de temporalité où le temps interrompt constamment l'éternité, et où l'éternité pénètre sans cesse le temps.
C'est alors seulement que prend son sens la répartition de tout à l'heure en temps présent, temps passé et temps à venir. »
Kierkegaard, (Le concept d'angoisse)