ZAZENSHIN
Taduit par M° Mokudo Taisen Deshimaru depuis l’œuvre de M° Dõgen
Un jour, après zazen, un moine demanda au grand maître Kodo Yakusan :« Pendant zazen qu'est-ce que vous êtes en train de faire alors que vous ressemblez à une montagne immobile ? » .
Le maître répondit :
« Je pratique shiryo (1) au sujet de fushiryo (2 ).
- Comment peut-on obtenir fushiryo ? ».
Le maître réppndit : Hishiryo.(3) » .....
Le seul Zen authentique a toujours été pratiqué de cette manière par ce fameux hishiryo de Maître Yakusan. Et c'est ainsi qu'il doit être transmis tel qu'il l'a été depuis le Bouddha Shãkyamuni par Ies prédécesseurs successifs des maîtres, Bodhidharma, Eno, Nyojo.
Zazen est la seule et unique façon de pénétrer le satori du Bouddha. Le hishiryo de Maître Yakusan n'est pas simplement un nouveau moyen inventé par lui-même. C’est la seule façon d'aborder le véritable bouddhisme. C'est-à-dire à travers le zazen "tel qu’il fut transmis par Bouddha et les maîtres.
Cette pratique de la pensée sur la non-pensée est le seul moyen de devenir Bouddha. Ceci est zazen.
Ce zazen pratiqué ainsi est l'essence de la vraie vie et il a été transmis depuis Bouddha, de Bouddha en Bouddha et de maître en maître. Bodhidharma transmit cette vérité à son disciple Eka en lui donnant sa moelle. Les trois autres disciples reçurent respectivement ses os, sa chair et sa peau.
1. Shiryo : la conscience, la pensée.
2. Fushiryo : non-conscience, non-pensée.
3. Hishiryo : dans ce cas, ce n'est pas l'état de conscience personnelle, c'est au-delà de la pensée.
Qu'est-ce que shiryo.(la pensée) ? Qu'est-ce que fushiryo (la nonpensée) ? Cela a été demandé très souvent, non seulement par les grands moines, mais aussi par ceux qui pratiquent zazen. Mais le moine qui demanda à Maître Yakusan : « Comment pratique-t-on shiryo au sujet de fushiryo ? » était un vrai novice.
Shiryo et fushiryo ne sont pas des entités séparées. Durant zazen, nous continuons shiryo. Shiryo est la vérité elle-même et elle est en unité avec fushiryo.
S'il vous plaît, hommes sages, étudiez fushiryo. Etudiez hishiryo. C'est un mondo profond.
Hishiryo, dans la bouche de Maître Yakusan, signifie en vérité la liberté parfaite pour nous-mêmes, juste comme une perle qui roule.
De plus, l'action de jijuyu, c'est-à-dire l'acte de se libérer soi-même par soi-même, est aussi un aspect de hishiryo. Cependant, pendant .shiryo, ou même au-delà de cela, même en hishiryo, si on essaie d'aller au-delà de son propre ego, un ego (une conscience personnelle) existe cependant encore. Mais une fois que zazen lui-même est vu comme l'acte de faire (par soi-même), alors et alors seulement, shiryo, l'ego personnel, n'existe plus.
Zazen seul réalise, zazen seul agit. Si zazen n'existe que dans l'action de zazen lui-même, alors zazen ne peut pas être shiryo (la conscience de l'ego personnel). Zazen n'est pas la pratique de shiryo.
Le zazen de Yakusan est donc la pratique de zazen lui-même. Ce point de vue n'est pas seulement le mien, pas plus que celui de Yakusan ; il remonte aux trente-six générations qui précédèrent Yakusan. C'est le point de vue du Bouddha Shakyamuni lui-même. Dans cet enseignement, s'il est transmis correctement, il y a le sens de là substance du vrai shiryo qui est lui-même fushiryo (au-delà de la conscience personnelle).
Mais depuis peu, beaucoup de personnes stupides disent que la pratique de zazen doit atteindre au vide de l'esprit. Et que si nous l'atteignons, nous arrivons à la porte de l'esprit paisible et pénétrons facilement le monde de l'esprit zen qui ne bouge pas. Mais je ne pense pas comme cela. Cette opinion ne va même pas au-delà de celle des adeptes hinayana (theravada). Ceux qui entretiennent une telle opinion sont dans une dimension encore plus basse que la masse de ceux qui croient en toutes sortes de dieux. De telles personnes ne sont pas de véritables chercheurs en quête de la vérité du Bouddha.
Nous sommes terriblement attristés que le vrai enseignement du Bouddha et des maîtres soit en train de mourir d'une telle manière.
Et puis, il y a les autres qui disent que s'efforcer de faire zazen, c'est bon pour les débutants et pour les jeunes, et que pour les maîtres Bouddhas, la pratique de zazen n'est pas tellement importante ; et ils disent que quand ils marchent, c'est le Zen, que quand ils s'assoient, c'est le Zen, et de même, qu'ils parlent ou qu'ils gardent le silence, qu'ils bougent ou ne bougent pas, ils disent que toutes les actions de leur vie quotidienne sont zen. Alors ils sont tout le temps contents et paisibles. Ils n'ont pas besoin de faire des zazen difficiles qui font mal aux jambes car leur vie quotidienne elle-même est le Zen, même s'ils ne font pas zazen, prétendent-ils. Cela est une grande erreur, bien entendu.
Certainement chaque action de notre corps et de notre esprit peut devenir le Zen, mais ce véritable état du Zen ne peut exister qu'à travers la pratique de zazen. Nulle part, il n'y a de Zen sans zazen. Zen et zazen ne sont pas séparés. Ils ne sont pas en dualité mais en unité.
Puisque le Zen est un fait subjectif, on ne peut le comprendre d'un point de vue objectif; mais plutôt, il doit être compris seulement à travers les actions de la vie quotidienne.
Nous sommes attristés que beaucoup d'adeptes de l'école Rinzaï maintiennent cette opinion erronée. Ils se justifient de ne pas transmettre véritablement la Voie du Bouddha, simplement parce qu'ils trouvent la pratique de zazen trop difficile.
En tout cas, il y a une grande différence entre débutants et non débutants.
A présent, pratiquer zazen et continuer zazen est le vrai problème essentiel. 'On doit comprendre que pratiquer la Voie du bouddhisme n'est autre que faire des efforts dans la pratique de zazen.
Le sens véritable de l'enseignement certifié est que nous ne devons pas entretenir le but de devenir Bouddha puisque c'est la pratique de la posture elle-même qui est le Bouddha. La posture est le Bouddha.
Cela ne signifie pas qu'à travers la pratique ou la méthode de zazen le Bouddha est créé. Cela signifie que zazen lui-même est le corps et l'esprit ou l'esprit infini ou le Bouddha lui-même; c'est la réalisation du satori ou l'expérience de la vérité elle-même.
Si nous brisons notre esprit d'attachement, alors aucune relation n'existera plus entre le Bouddha qui fait zazen et le Bouddha qui espère devenir le Bouddha; à ce moment-là le zazen-Bouddha seul est le vrai Bouddha. Car seulement à ce moment-là nous allons au-delà de tous les Bouddhas, seulement à ce moment-là nous pouvons devenir le véritable Bouddha, au-delà de tous les temps. Allant et venant, debout ou allongé, tout est immuable. Donc, à ce moment-là, zazen a le pouvoir unique de satisfaire toute chose.
Un jour, Maître Dotsu Baso faisait zazen dans le dojo de Maître Daie Nangaku. Il faisait toujours zazen bien qu'il eût déjà reçu le shiho comme prochain maître dans la succession après Maître Nangaku.
Alors Nangaku demanda à Baso :
« Vous êtes en train de faire zazen mais avez-vous quelque objet en cela? »
A propos de cette question, nous devons réfléchir profondément aux quatre cas suivants :
1. Avez-vous quelque objet de progrès au-delà de zazen ?
2. Avez-vous quelque autre considération que zazen lui-même ?
3. N'avez-vous pas d'autres préoccupations à part zazen ?
4. Réalisez-vous quelque objet à l'endroit où vous faites zazen ?
Nous devons être comme un vrai dragon vivant. C'est mieux que d'être une imitation sculptée ... Nous devons comprendre que les deux dragons, le dragon vivant et le dragon sculpté, possèdent le pouvoir de faire arriver les nuages et de faire tomber la pluie ... Nous ne devons pas penser que le monde de notre esprit de zazen est lointain et que notre corps de zazen est intimement proche. Et nous ne devons pas avoir de respect pour la sensation d'intimité. Nous ne devons pas être intime seulement avec la proximité de notre esprit de zazen et, nous ne devons pas, non plus, être intime avec notre corps de zazen seulement. Bien sûr, il n'y a pas à respecter le fait que l'esprit de zazen est lointain, ou que le corps de zazen est lointain. Nous ne devons pas être seulement concentré sur la proximité de notre corps de zazen. Nous ne devons pas être seulement concentré sur l'œil qui regarde seulement ce qui est près. Bien sûr, ne vous concentrez pas sur ce qui est lointain. Nous ne devons pas être seulement concentré sur les oreilles qui entendent ce qui est lointain. Bien sûr, nous ne devons pas être seulement concentré sur ce qui est proche. De cette manière, nous devons être profondément concentré sur la pensée et l'écoute à la fois proche et lointaine.
Dernière édition par Kaïkan le Sam 13 Aoû 2011 - 22:57, édité 1 fois