Mais dans ses explications concernant zazen, il me semble quand même qu'il s'agit de revenir toujours à la posture, et ce, dès qu'on pense. Il semble donc qu'il y ait pour lui une forte opposition entre "penser" et "agir" ; en zazen, quand on se retrouve à penser, il faut retourner à ce qu'on fait, à l'action, à l'assise, à ce qu'on fait avec son corps à un moment donné.
Mais toutes les pensées se valent-elles ? Est-ce que penser, ce n'est pas une action au même titre que faire attention à sa posture, respirer, s'asseoir ? Dans ce cas, pourquoi, dans les instructions concernant zazen (et pas seulement chez Nishijima mais chez tous les maîtres ou presque), il est préconisé de revenir au corps et à la posture dès qu'on se met à penser ?
Mon hypothèse, c'est qu'il y a différentes façons de penser. D'un côté, les pensées qui viennent toutes seules pendant zazen, et qui nous embarquent "malgré nous" dans des histoires pas possibles. Celles là sont des sortes de "pollutions" mentales, qui viennent sans qu'on leur demande, qui ne sont pas mauvaises en soi mais résultent certainement du fait qu'on pense beaucoup trop, tout le temps, et que c'est devenu notre mode d'existence par définition. Ce seraient celles là qu'il serait bon de remettre à leur place en revenant à l'action ici et maintenant, parce qu'elles sont un obstacle à la perception de notre nature.
De l'autre côté, il y aurait la pensée élaborée, contrôlée, celle qu'on met en pratique lorsqu'on écrit, ou qu'on raisonne, ou qu'on cherche quelque chose sur un plan. Celle la relèverait pour moi tout autant de l'action que n'importe quelle action et ne serait pas "nuisible" à la réalisation de notre nature.
Evidemment les choses doivent être bien plus complexes que cela, puisqu'on ne contrôle jamais tout de ce qu'on pense et que - comme tout - c'est nécessairement déterminé par tout un tas de facteurs qui nous échappent complètement, même pour les plus "contrôlées" de nos pensées...
Quelle attitude adopter par rapport aux pensées ? Laisser faire ? Aller contre ? Se positionner "en retrait" ? A-t-on vraiment le choix de ce qu'on fait avec ses pensées ? Je veux dire, en zazen, on se met à penser sans le vouloir, et on s'en rend compte au bout parfois d'un certain temps ; qu'est ce qui fait qu'on s'en rend compte, justement ? Est-ce qu'on fait l'effort de s'en rendre compte, ou est ce que naturellement, on s'en rend compte ? Faut-il cultiver cet effort ou laisser aller les choses naturellement ? Toujours ce paradoxe d'agir sans agir !