par lausm Dim 8 Mar 2015 - 1:46
Oui, Deshimaru aimait bien jouer avec les grades....et certains ont pris ce jeu très au sérieux. Aujourd'hui ils n'aiment pas qu'on joue avec eux. Ils préfèrent jouer tout seul.
Sinon revenant à Kodo Sawaki, en fait il a marqué toute une génération au Japon. Plus qu'on ne l'imagine.
Tokuda raconte que dans sa jeunesse, il suivait ses conférences à l'université de Komazawa.
Il disait qu'en fait il ne se rappelait rien de précis de tout ce qu'il avait dit.
Sauf qu'un soir, il faisait une sesshin, à Eihei-ji, je crois. Très dure, il faisait très froid, au point que ses pieds, puisqu'il était debout, portant le kyosaku, donc marchant lentement, collaient sur le sol gelé.
Il était plus que fatigué, il faisait nuit.
Alors il a halluciné Kodo Sawaki, entendant sa voie forte dans la nuit, qui disait avec force "pratiquer zazen en silence avec le grand kesa".
En fait, alors qu'il a entendu plein de conférences dont il ne se rappelle pas du contenu, cette phrase résonna comme une illusion dans la nuit, pour lui exprimer la quintessence de l'enseignement de Kodo Sawaki (Deshimaru a rapporté ce truc de Sawaki : "le plus grand bonheur, c'est se raser le crane, et faire zazen en portant le kesa).
Donc oui, Kodo Sawaki a marqué bien des pratiquants de cette génération de l'après-guerre.
Tokuda nous a raconté aussi qu'en fait, il a été engagé quasi de force pour enseigner à l'université de Komazawa, car il n'avait pas les titres officiels qui le permettaient. Le responsable alla alors voir le ministre pour obtenir une dérogation. Celui-ci les accueillit avec un grand sourire, et leur dit "pas de problèmes, c'est accordé! Kodo Sawaki est mon maître!"
Donc s'il était en marge du système officiel, il avait une certaine crédibilité aux yeux de beaucoup, de toute évidence.
Et si certains font croire que Deshimaru était le seul vrai disciple, c'est spécieux comme argument.
Philippe Coupey a tenu à retrouver un disciple de Kodo Sawaki pour se faire remettre le shiho. Il l'a trouvé dans la figure singulière de Kojun Kishigami. Quand il est venu à la Gendronnière, les huiles présentes ont tout fait pour qu'il rase les murs, qu'il ne monte pas sur la chaire du maître, là où ils ont toujours fait le contraire avec des maîtres qu'ils ne connaissaient pas du tout.
Cela montre bien combien le fantôme de Kodo Sawaki est dérangeant.
L'universalité de son zen était bien plus grande que ce que certains veulent en faire de nos jours, à savoir un appareil de règles et de formes (donc un truc plus facile à objectiver et utiliser comme outil de pouvoir).