Peaceful a écrit:Bonjour
lausm Il s'agit surtout de vivre l'expérience ET d'en être détaché à la fois.
La non-dualité s'accomode mieux de la conjonction de coordination "et", inclusive, que du "ou" exclusif.
Et la non-dualité, c'est assumer la dualité pleinement.
Sinon c'est encore la dualité entre le monde spirituel, et le monde "normal".
En fait, il faut juste accepter plutôt d'être la question, de se laisser travailler par elle, corporellement, que de trouver une réponse. Et si réponse il y a, d'en percevoir la relativité, et de l'abandonner à ce qu'elle est : une pensée comme une autre.
« Vivre l’expérience et en être détaché », cela m’évoque bien quelque chose. Mais, à vrai dire, il ne s’agit pas pour ce qui me concerne d’un détachement total. Des émotions malgré tout surviennent même s’il est évident qu’elles sont très amoindries. Mais si c’est de cela dont vous parlez ce n’est pas ce qui m’intéresse.
Et que dois-je comprendre à votre propos? Je précise, à toutes fins utiles, que je pars de l’hypothèse qu’il existe peut-être une méthode spécifique de repérage des pensées et que cette gymnastique particulière de l’esprit ne m’est pas connue. Remettez-vous en cause le bien-fondé de mon questionnement ? Expliquez-vous.
Et concernant la pensée, Dogen disait clairement dans le Fukanzazengi, qui explique comment méditer, concernant la pensée, qu'il faut "...penser du tréfonds de la non-pensée...".
Donc on pense....mais à partir de la non-pensée!
Cette pratique a de l'avenir : elle n'est jamais achevée, et c'est ce qui en fait toute sa force et sa valeur!
Et surtout : aucune réponse ne la limitera jamais! Ce qui prévient tout totalitarisme de la pensée!
En bref, le jour où un maître vous donne une réponse, vous pouvez penser qu'il est juste en train de vous rendre dépendant de lui, et de ne pas vous rendre service.
Je ne m’étendrai pas sur cette posture du « Maitre » qui délivre des formules totalement ineptes mais sachez que je ne souscris pas à votre conception de l’enseignement et du "service" , qui n’est pas sans rapport avec à la conception d’une certaine thérapie ou « le sujet est supposé savoir » ou encore serait capable découvrir par lui-même. Mais que faites-vous alors sur ce forum si vous ne pensez pas que vous puissiez apprendre des autres ou apprendre aux autres ?
Bonjour
Fa Qui observe les pensées ?
Qui est l'observateur ?
Personnellement, ces questions me semblent étranges, un peu décalées par rapport à mon propos : l’important n’est pas tant de savoir « qui » mais plutôt
comment être attentif aux pensées perturbatrices. Et plutôt que des questions qui nous conduiraient, à mon sens, à un long détour bien inutile, je souhaiterai plutot des réponses et de préférence, si ce n'est trop demander, claires.
Bonjour Peacefull, et tout le monde.
Oui, que fais-je sur ce forum si je ne pense pas pouvoir apprendre aux autres, et apprendre des autres??
C'est effectivement une autre façon de poser la question de qui observe.
En effet, "qui" pense que je pense pas pouvoir apprendre des autres, ou aux autres?? "Qui" me prète des intentions que peut-être je n'ai même pas?? Perso, je ne prétends pas détenir un statut particulier, ni n'avoir rien à apprendre, ni à transmettre.
Il faut se demander pourquoi, quand tu demandes un conseil, tu sembles ne pas accepter ce que je dis à partir du moment où je ne me réfère même pas à moi-même ni mes conclusions personnelles, mais à l'enseignement transmis, que je ne fabrique pas, ni ne répète comme un perroquet.
Et là, si tu trouves que ça renvoie aux mêmes conclusions que Jacques Lacan sur le sujet supposé savoir, je trouves ça plutôt flatteur!
Car le zen est une voie aride, apophatique. Ca veut dire qu'on ne dit pas les choses, on ne donne pas de recettes. On dit plus ce que ce n'est pas que ce que c'est. Car c'est inépuisable, donc plus facile comme ça. On renvoie plutôt la personne à elle-même, et sa pratique, sans pour autant la laisser tomber. On la laisse se démerder à construire son autonomie. La compassion résidant à cependant rester là. A accepter que cela ne soit pas bien vu. On incompris.
Tu demandes en fait une réponse, alors que quand on te la donnes, tu ne la vois pas, car tu cherches un mystère caché derrière ce qui est.
Et en d'autres temps, les maîtres répondaient pas une baffe, parfois!
Alors, si tu veux, je peux en rajouter une couche dans le paradoxe, et là tu vas rentrer un peu plus dans le grand mystère du zen : Deshimaru expliquait dans "concentration et observation", que si on n'arrive pas à se concentrer, et qu'on a épuisé tous les trucs consistant à souvent renforcer l'observation, et bien la dernière chose à faire était....approfondir la concentration! Et de même pour l'observation! On est bien avancé! Ca veut dire : continuer, continuer, l'effort de pratique, d'investigation personnelle. Tout le monde te le dis ici : la réponse est en toi. On peut t'en parler mais toi seul peut la réaliser.
En fait ça te rassurerait probablement d'avoir une réponse bien définie, mais ce dont tu parles n'es pas définissable.
C'est pour ça que Dogen parlait de penser du tréfonds de la non-pensée. C'est sa claire indication sur la pratique de zazen concernant la pensée, c'est d'ailleurs la seule, qui se résume par un seul mot : Hishiryo. Hi: au-delà. Shiryo: pensée. Au-delà de la pensée et de la non-pensée, pour préciser son propos tenu dans le Fukanzazengi.
Et j'insiste lourdement. Je ne fabrique rien de perso à te dire cela, mais je te le dis parce que aujourd'hui, après plus de quinze ans de coussin, je suis profondément persuadé que c'est vrai. Et pas à partir d'une conception, mais d'une expérience. Et j'assume te transmettre ce fruit-là. Et quand je te le dis, je ne dis rien d'autre que des dizaines de génération de pratiquants qui ont fait la même chose.
Mais entre savoir intellectuellement, et comprendre, il y a un monde, qui est celui de l'incarnation de l'expérience.
Mais cette expérience, tu l'as faite : tu décris très bien ce rapport que tu as donc expérimenté entre relâchement du corps et perception claire des pensées. Donc on n'a rien à t'apprendre que tu ne saches. Par contre ton job est d'apprendre à reconnaître cela quand ça se produit. Et de transposer cette conscience dans ton quotidien. Ca s'apprend, faut du temps, de la persévérance, de la patience...et surtout recommencer, ç'est comme ça qu'on se perfectionne. Mais le zen d'un débutant n'a rien de différent de celui d'un maître. C'est la même chose, à la fin. Sauf que le débutant croît que le maître ou les anciens, savent des trucs qu'il ne sait pas. La différence, c'est que le maître, ou les anciens, sont conscients qu'ils n'en savent pas plus, et l'assument, s'ils sont sains.
C'est pour ça que le grand secret du bouddhisme, c'est l'attention. C'est un secret de polichinelle, mais c'est tellement simple que c'est plus facile de chercher un truc ailleurs, qu'on appellerait satori. Satoru, en japonais, ça parle de comprendre.
La psychanalyse, en particulier de Lacan, n'a rien inventé que le zen n'ait déjà mis en pratique et en transmission. C'est juste un peu plus physiquement exigeant, et un peu moins cher financièrement.
Un maître ne donne pas un objet-pratique, pas une technique. Même zazen ne peut être réduit à une technique. Zazen, ce n'est pas pour s'éveiller plus tard en appliquant la technique bien, mais c'est être bouddha assis, c'est être éveillé, prendre conscience qu'on est conscient, ici, maintenant. Directement.
Quand tu prends conscience que pour toi le rapport entre sensation, et pensée, entre ton corps et les processus psychiques qui s'y produisent, ne sont pas forcément clairs, c'est déjà une forme d"éveil. C'est l'éveil a sa propre confusion, et c'est bien plus profond que de se fabriquer une illusion de pureté ou une clarté d'esprit artificielle. On peut le faire, mais ça finit toujours par être soufflé par le vent de l'impermanence. C'est ça, la non-dualité. Notre esprit ordinaire est déjà le bouddha, même si on n'est pas parfait. Surtout quand on n'est pas parfait. Etre bouddha, c'est reconnaître son imperfection et son insuffisance. Et aussi sa grandeur. Et tout nos aspects ordinaires. Deshimaru insistait sans cesse, et Kaikan confirmera, sur le fait que le zen, c'était retrouver sa condition normale.
Donc je ne remets pas en cause ton questionnement, mais ton rapport à ton questionnement. Ta question contient en elle-même la réponse, et tu dois apprendre à reconnaître ta capacité de conscience dans ton esprit-même, et non pas attendre que quelqu'un te donne une réponse : tu pourrais après nous en vouloir de ne pas te laisser devenir libre par toi-même. A chercher une réponse de quelqu'un que tu penses en savoir plus que toi, tu ne vois pas que dans tes questions, tu as déjà des réponses, que tu as déjà conscience de processus. Que tu n'es pas ignorant. Qu'en toi, il y a déjà l'Eveil, un être éveillé.
Vivre l'expérience et être détaché, ça veut dire que les émotions qui surgissent ont simplement à être reconnues en tant que tel, et non pas amoindries, émoussées, refoulées. Bien sûr, assis on est plus tranquille. Justement ça permet de reconnaître plus facilement les phénomènes qui se produisent. La technique de zazen n'est pas plus compliquée. C'est comme l'eau qui est agitée, et se calme : quand la surface est plane, tu peux te regarder dedans, c'est une image claire.
Et pour finir, Dogen enseignait que zazen, c'était abandonner corps et esprit.
Donc abandonner aussi le désir de conscience.
Car il n'y a rien à faire pour être conscient.
Juste à être.