Huanshen a écrit:Bon, je me lance aussi:
Q2 – Confirmation :
Pas d’intérêt dans la mesure où c’était tellement simple et évident, que je n’avais ni le besoin, ni l’envie d’en parler. En fait, j'aurais souhaité pouvoir être absolument seul pendant un mois ou deux.
Néanmoins, j’ai dû répondre aux questions qu'Alan, mon maître de l'époque, qui m’a longuement testé. Au cours d’un voyage aux USA j’en ai aussi passé une journée chez Kenneth, le maître theravadin qui m'avait conduit au premier 'kensho' (tableau 3), qui -après m’avoir écouté pendant une heure sans dire un mot-, a conclu par un: « magnifique ! Il y a des choses que l’on ne peut pas bluffer».
Par la suite, j’ai reçu la ‘confirmation’ tacite ou explicite de nombreux maîtres de diverses traditions (Zen Soto lignée Hoshinji, Sekkei Harada et Ch’an Linji lignée Sheng-yen, Advaita Vedanta traditions Ramana Maharishi et Nisargadatta Maharaj). Ce qui m’intéressait n’était toutefois pas leur approbation, mais de pouvoir bénéficier de leur expérience en matière d’intégration de l’éveil dans la vie quotidienne. L'aide la plus précieuse est venue de Rajiv, mon maître actuel, qui m'a récemment éclairé sur des points qui demeuraient obscures, tout en m'indiquant la marche à suivre pour la suite.
Q3 – Famille, proches :
Je n’ai strictement rien dit à mes proches, sauf à ma femme, un mois plus tard, pour la rassurer car elle pensait que j’allais bientôt me retirer dans un monastère pour chercher l’éveil en me voyant méditer pendant des heures. Je lui ai donc simplement glissé « ne t’inquiètes pas, c’est peut être déjà arrivé ». Elle n’en a pas fait grand cas. Tant mieux.
Q4 – Ce qui a changé :
Si simple, mais si difficile à dire avec des mots ! Que dire ? C’est déjà la fin de 22 ans de recherche. Une certitude inébranlable quant au fait que, fondamentalement, il n’y a ni éveil, ni illusion, ni naissance, ni mort ; rien à faire et rien à trouver ; et que malgré ça la vie continue de manière tout à fait ordinaire.
C’est aussi la certitude que l’éveil véritable ne peut pas être perdu, car, contrairement à ce que j’imaginais à l’époque, il ne s’agit pas d’un état de conscience modifié qui serait devenu permanent (mais pourrait éventuellement disparaître un jour), mais de la reconnaissance de ce qui est toujours présent et ne change jamais.
Si ce n’est pas un état, j’ai toutefois observé un changement en découvrant une nouvelle forme de présence silencieuse marquée par une forme de contentement (besoin de rien de particulier) et de silence au-delà des pensées ou de l’absence de pensées (il n’y a plus de différence essentielle entre zazen et la vie ordinaire). Ainsi, les pensées et les émotions ne s’accrochent plus comme avant. Si l’identification au corps et à l’esprit intervient encore, l'état naturel calme et silencieux revient de lui-même comme ces poupées ovales lestées avec du plomb.
Tous les états de conscience (veille, rêve, sommeil profond) ainsi que les expériences ordinaires, ou spirituelles, sont comprises et/ou vécues comme des états impermanents qui apparaissent et se fondent dans l’état naturel. Et l’état naturel n’est pas un état. C’est un rien d’où émergent toutes choses.
Et tout redevient simple et ordinaire. C’est un retour à la simplicité de ce qui est. Le parfum des poubelles, le rire des enfants, la mauvaise humeur d’un collègue : autant de visages d’une même réalité.
A part ça, rien de très spécial. En apparence, je suis exactement la même personne qu'avant, avec les mêmes défauts et qualités (éventuelles), les mêmes habitudes, la même vie... Et ce n’est pas plus mal.
Si il y a quelque-chose qui caractérise l'éveil, c'est certainement cela :
Le silence de la pensé. Je me rappelle un évènement précis, ou je me suis rendu compte que cela était possible, un jour dans ma voiture, le feu était rouge, j'attendais. Et puis je me suis rendu compte, que mon esprit était silencieux, aucune pensée, pas la moindre agitation cognitive, juste une présence attentive, au monde.
Je pense que ce silence de la pensé, devient stable chez une personne "éveillé", il s'est produit chez elle, un changement, un lâcher-prise, une relativisation de tout forme de pensé, qui passe du stade, d'instance parasite, à outil.
Lorsque ce silence devient la toile de fond des pensées, il n'y a plus de pré-occupations. Le moi illusoire est Mort, parcequ'il n'a plus le carburant de la peur.
L'intériorité, devient plus spacieuse. La pensé ne se manifeste plus que lorsqu'elle est invité, en réponse au sollicitations concrètes de la vie.
Cet état est-il permanent ? Oui sans aucun doute. C'est certainement quelque-chose d'irréversible. Cela n'empêche pas de connaitre des phases d'agitations, mais c'est toujours en réponse à la vie, qui n'est pas un long fleuve tranquille.
Cependant l'état naturel, fondamental, est ce silence. L'image proposée par Huanshen , de la poupée plombée,qui revient à sa position initiale aprés avoir été ballotée me semble très juste.
Fa